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Nord et sud

Nord et sud

Titel: Nord et sud Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Elizabeth Gaskell
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cherche pas non plus
à les copier. J’appartiens pour ma part à la race teutonne, dont le sang, dans cette
partie de l’Angleterre, est moins mélangé que dans d’autres. Nous avons gardé leur
langue dans une large mesure, et plus encore leur façon de penser. Nous considérons
la vie comme un temps à consacrer non pas au plaisir, mais à l’action et à l’effort.
Notre gloire et notre beauté viennent de notre force intérieure, qui nous permet
de vaincre les résistances matérielles ainsi que des difficultés plus sérieuses
encore. Ici, dans le Darkshire, nous sommes teutons à d’autres égards aussi :
nous détestons que nous soient imposées des lois faites par des étrangers à notre
région. Nous aimerions qu’on nous laisse faire droit à nous-mêmes, au lieu d’intervenir
chez nous avec une législation défectueuse. Nous aimerions nous gouverner nous-mêmes
et nous sommes opposés à toute centralisation.
    — Autrement dit, vous aimeriez voir l’heptarchie [92] rétablie. En tout cas, je reviens sur ce que je disais ce matin, à savoir que vous
autres gens de Milton ne vénériez pas le passé. Vous êtes de fidèles adorateurs
de Thor.
    — Si nous n’avons pas comme vous à Oxford le culte du passé,
c’est que nous voulons quelque chose de plus adapté au présent. Si le passé sert
de base pour imaginer l’avenir, c’est parfait. Mais pour des hommes qui essaient
tant bien que mal de s’adapter à des circonstances nouvelles, il serait préférable
que l’expérience nous permette de mieux adapter nos actions à nos besoins fondamentaux
et immédiats, ce qui représente un certain nombre de difficultés à résoudre ;
et c’est de notre façon de les aborder et d’en venir à bout que dépend notre avenir.
Que la sagesse du passé nous permettre de mieux comprendre le présent. Hélas !
Les gens parlent des utopies beaucoup plus facilement que des tâches à accomplir
le lendemain ; et lorsque ces tâches sont accomplies par d’autres, ils sont
prêts à crier haro sur le baudet.
    — Et moi, je ne comprends toujours pas ce dont vous parlez.
Pourquoi vous autres, hommes de Milton, ne daignez-vous pas nous exposer vos difficultés
d’aujourd’hui à Oxford ? Vous n’avez pas encore mis nos compétences à l’épreuve.
    Cette remarque fit franchement rire Mr Thornton.
    — Vous savez, mes remarques faisaient allusion à un certain
nombre de choses qui nous ont préoccupés ces derniers temps. Je pensais aux grèves
que nous avons eues, et qui sont aussi fâcheuses que préjudiciables à nos intérêts,
comme je m’en aperçois à mes dépens. Pourtant, la dernière grève en date, dont je
subis encore les conséquences, était respectable.
    — Respectable ! Une grève ? s’exclama
Mr Bell. À vous entendre, on vous prendrait pour un vrai disciple de Thor !
    Margaret sentit plutôt qu’elle ne le vit, que Mr Thornton
était contrarié de voir ses sentiments les plus sérieux tournés en dérision. Elle
chercha à faire dévier un sujet de conversation qui, indifférent à l’un des interlocuteurs,
présentait pour l’autre un intérêt d’autant plus profond qu’il le concernait personnellement.
Elle se força à intervenir.
    — Edith affirme qu’elle trouve à Corfou des calicots de
meilleure qualité qu’à Londres et meilleur marché.
    — Vraiment ? s’étonna son père. Je pense que cela doit
être l’une des exagérations dont elle est coutumière. Tu en es sûre, Margaret ?
    — Je suis sûre qu’elle l’affirme, papa.
    — Alors, je suis sûr du fait, dit Mr Bell. Margaret,
j’ai une si haute idée de votre attachement à la vérité que je suis prêt à l’étendre
à votre cousine. Je ne pense pas que votre cousine puisse exagérer.
    — Miss Hale est-elle donc si attachée à la vérité ?
lança Mr Thornton d’un ton amer.
    À l’instant même où il prononçait ces mots, il se fût volontiers
coupé la langue. Pour qui se prenait-il ? Et pourquoi lui jeter ainsi son indignité
à la figure ? Comme il était déplaisant, ce soir : dévoré par l’exaspération
de s’être trouvé contraint de rester longtemps dans une pièce loin de Margaret ;
irrité en entendant mentionner un nom pour la seule raison qu’il le prenait pour
celui d’un heureux rival ; et à présent, de fort méchante humeur parce qu’il
avait été incapable de répondre avec légèreté à un homme qui s’efforçait, par ses
remarques

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