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Nord et sud

Nord et sud

Titel: Nord et sud Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Elizabeth Gaskell
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eux. Je veux croire
qu’ils le feront. Sa tante Shaw l’aimait bien, à sa façon discrète ; mais pour
elle, loin des yeux, loin du cœur.
    — C’est un défaut commun. Quelle sorte de gens sont-ils,
ces Lennox ?
    — Lui est un bel homme, beau parleur et charmant. Edith
est une jolie petite personne très gâtée. Margaret l’aime de tout son cœur, et Edith
aime Margaret avec le bout de cœur dont elle dispose.
    — Écoutez-moi, Hale. Vous savez que votre fille a fait ma
conquête. Je vous l’ai déjà dit. Bien sûr, je m’intéressais déjà beaucoup à elle
avant de la voir dernièrement, car c’est votre fille et ma filleule. Mais depuis
cette visite que je vous ai faite à Milton, je suis son esclave. Je suis allé là-bas,
telle une victime consentante, pour suivre le char de mon vainqueur. Car elle a
l’air aussi impressionnante et sereine qu’une femme qui a beaucoup lutté, qui lutte
peut-être encore, mais dans la perspective de la victoire. Oui, malgré ses multiples
inquiétudes actuelles, voilà ce que suggérait son expression. Ainsi donc, tout ce
que je possède, je le mets à sa disposition si besoin est, et elle en sera maîtresse
à ma mort, qu’elle le veuille ou non. De plus, je serai son preux chevalier servant,
tout goutteux et sexagénaire que je sois. Sérieusement, mon vieil ami, votre fille
sera mon principal souci dans la vie, et toute l’aide que mon esprit, ma sagesse
ou mon cœur empressé pourront lui donner lui appartiendra sans qu’elle soit pour
moi une source de tourments. Je n’ai pas l’intention de me ronger d’inquiétude à
son sujet. Vous, il vous faut toujours vous faire du souci, faute de quoi, vous
n’êtes pas heureux, je le sais depuis longtemps. Mais vous allez m’enterrer et me
survivre longtemps. Vous autres, les hommes maigres et secs, vous passez votre temps
à vous jouer de la mort ! Ce sont les gros gaillards qui ont bonne mine, comme
moi, qui partent toujours les premiers.
    Si Mr Bell avait eu l’œil prophétique, il aurait pu voir
la torche aux proportions presque inversées, et l’ange de la mort, le visage grave
et composé, qui se tenait tout près de son ami et lui faisait signe [97] .
Ce soir-là, Mr Hale posa sur l’oreiller une tête qui ne devait jamais plus
en bouger. Le domestique qui entra dans sa chambre le matin suivant ne reçut aucune
réponse à ses paroles ; il s’approcha du lit et vit le beau visage calme qui
reposait, pâle et froid, marqué du sceau indélébile de la mort. L’attitude du défunt
était parfaitement paisible : il n’y avait eu ni douleur, ni lutte. Le cœur
avait dû cesser de battre lorsqu’il s’était couché.
    Mr Bell fut assommé par le choc. Il ne retrouva ses esprits
que sous l’effet de l’exaspération provoquée chez lui par les diverses hypothèses
de son valet.
    — Une enquête du coroner ? Bah ! Vous ne croyez
tout de même pas que je l’ai empoisonné ! Le docteur Forbes dit que c’est une
issue naturelle à une maladie de cœur. Pauvre cher Hale ! Vous avez usé votre
cœur trop tendre avant l’heure. Pauvre vieil ami ! Comme il parlait de sa...
Wallis ! Préparez-moi un sac de voyage d’ici cinq minutes. Je perds du temps
à parler. Préparez-moi ça, je vous dis. Il faut que je prenne le premier train pour
Milton.
    Le sac fut préparé, la voiture commandée, et le voyageur déposé
à la gare vingt minutes après avoir pris sa décision. Le train de Londres arriva
à toute vitesse, recula de quelques mètres, et un chef de gare impatient pressa
Mr Bell de monter. Il s’adossa à son siège, les yeux fermés, essayant de comprendre
comment un homme hier en vie pouvait être mort aujourd’hui ; et des larmes
ne tardèrent pas à perler à ses cils gris. En les sentant, il ouvrit ses yeux vifs
et s’efforça de prendre l’air aussi sévèrement jovial que sa volonté le lui permettait.
Il n’allait pas pleurnicher devant des étrangers. Pas lui !
    En fait d’étrangers, il n’y avait qu’un voyageur, assis à l’autre
extrémité de la banquette, du même côté que lui. Mr Bell eut tôt fait de le
regarder à la dérobée, pour voir quelle sorte d’homme avait été susceptible de surprendre
son émotion momentanée ; or derrière les grandes pages du Times largement ouvert,
il reconnut Mr Thornton.
    — Tiens ! Thornton, c’est vous ! dit-il en s’approchant
vivement.
    Il secoua sa main avec vigueur, jusqu’à ce qu’il dût

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