Nos ancêtres les Gaulois et autres fadaises
curiosité est le beau vice de l’époque.
Repères
– Les Lumières : all. Aufklärung /angl. Enlightenment /esp. Ilustración /ital. Illuminismo
– 1687 : publication à Londres de Principia Mathematica , livre majeur d’Isaac Newton, découvreur de la gravitation universelle
– 1689 : publication à Londres du Traité sur l’entendement humain de John Locke
– 1716 : mort à Hanovre du philosophe allemand Leibniz
– 1748 : première édition à Genève de la grande œuvre de Montesquieu De l’esprit des lois
– 1751 : premier volume de l’ Encyclopédie de Diderot et d’Alembert
– 1759 : publication à Genève de Candide de Voltaire
– 1762 : Du contrat social de Rousseau
– 1784 : Qu’est-ce que les Lumières ? du philosophe allemand Emmanuel Kant
Ainsi posés, ces principes nous paraissent évidents. Ils ne l’étaient pas. La religion était encore braquée dans une opposition frontale à la connaissance. Pour un Bossuet, le grand idéologue du règne de Louis XIV, seule la Providence règle le destin du genre humain. Si les rois gagnent des batailles ou si les peuples souffrent de mauvaises récoltes, il n’y a rien à y comprendre, il faut se contenter de voir à l’œuvre la main de Dieu. Lui seul dispense les châtiments et les récompenses, selon un dessein qu’il est seul à connaître.
Les mentalités de la première moitié du xviii e siècle sont encore imprégnées de cette façon de penser. Un des plus gros succès littéraires d’alors, nous rappelle Hubert Méthivier dans sa savoureuse synthèse du Siècle de Louis XV 1 , s’intitule le Spectacle de la nature (1732). Il est signé d’un certain abbé Pluche, un brave curé interdit d’enseigner parce qu’il a des tendances jansénistes. Un esprit ouvert et sympathique au demeurant, et d’une splendide candeur. Si Dieu a donné la couleur verte au feuillage, explique-t-il dans un livre que des milliers de lecteurs lisent avec le plus grand sérieux, c’est pour reposer les yeux des hommes. S’Il a fait des marées, c’est pour permettre aux bateaux de rentrer dans les ports. Les Lumières vont nous apprendre à nous passer de Dieu pour poser des questions, et à regarder les choses comme elles sont, sans présupposés sur la façon dont elles ont été faites. Les Lumières vont nous apprendre à renverser les perspectives : en langage scientifique, cela s’appelle opérer une révolution .
Droits naturels et Encyclopédie
Le mouvement est cosmopolite dans son principe, c’est-à-dire qu’il entend parler à tous les hommes du monde. « Je suis homme avant d’être français », écrit Montesquieu. Se met en place la théorie des « droits naturels » qui, comme leur nom l’implique, appartiennent à tous les humains, sans considération de nation, de race, de culture. Nos « droits de l’homme » modernes en sont issus. Il est clair toutefois que cet embrasement intellectuel nouveau est surtout européen. Dans tout le continent, les esprits éclairés se connaissent, correspondent, se répondent. Les souverains eux-mêmes se montrent avides d’idées nouvelles et prétendent en appliquer les principes, sans rien céder pourtant de leur autorité, d’où leur nom de « despotes éclairés ». Frédéric II de Prusse, Catherine II de Russie ou plus tard Joseph II qui règne sur l’Autriche sont parmi les plus connus.
La fougue de renouveau dépasse le seul monde de la philosophie, elle embrasse tous les champs de la connaissance que l’on veut défricher, labourer, ordonner autrement. Le suédois Linné (1707-1778) est le père de la taxinomie moderne, l’art de donner un nom aux plantes, aux animaux, aux minéraux. Son grand rival français, naturaliste hors pair et styliste incomparable, est Buffon (1707-1788), qui comme lui a l’amour de la compréhension et du classement. La science suscite, dans les milieux les plus divers, une vraie passion, qui ferait rêver les scientifiques d’aujourd’hui, bien isolés dans leurs laboratoires. On a parlé déjà de la façon dont Louis XVI s’était investi dans la préparation du voyage autour du monde de La Pérouse. Louis XV assiste lui-même à l’expérience de grande ampleur de l’abbé Nollet, un savant du temps qui travaille sur le courant. Grâce à une bouteille électrique, il réussit à montrer l’onde du spasme qui saisit une ligne entière de deux cents gardes se tenant par la main. Le roi,
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