Nos ancêtres les Gaulois et autres fadaises
qui cherchent à faire triompher l’athéisme satanique.
Ferry et ses lois scolaires ont mis les plaies à vif. Une dizaine d’années plus tard, l’affaire Dreyfus y ajoute un peu de sel, qui voit l’immense majorité des hiérarchies catholiques et de leurs journaux afficher la plus franche hostilité au régime.
Au début des années 1900, des gouvernements très anticléricaux – en particulier celui d’Émile Combes, « le petit père Combes » comme on le nomme familièrement – veulent en finir avec les nombreux ordres religieux qu’ils perçoivent comme emplis de « moines ligueurs », complotant contre la liberté. Ils promulguent différents textes qui rendent la vie très difficile aux congrégations : nouvel exil horrifié de leurs membres, par dizaines de milliers cette fois. Nouvelle colère du Vatican. Beau prétexte pour la République, qui décide de rompre les relations diplomatiques. C’est le détail qui manquait pour accomplir le geste final. Si les liens avec Rome sont coupés, le Concordat est caduc. La République doit bien trouver un statut pour gérer ses relations avec l’Église, d’où notre texte de 1905, qui officialise le divorce.
Il ne met pas fin pour autant à cette guerre entre « les deux France », plus près de dégénérer que jamais. La loi prévoit que les édifices religieux construits jusqu’alors restent propriété de l’État mais qu’ils seront mis à la disposition des fidèles. Comme cela se passe entre un propriétaire et un locataire, il faut procéder au recensement précis de ce que les locaux renferment. Ces inventaires sont menés avec plus ou moins de délicatesse par les fonctionnaires – on exige même parfois d’ouvrir les tabernacles pour compter les hosties. Ils sont plus ou moins bien acceptés par les fidèles. On en arrive ici et là à envoyer la troupe pour défoncer les portes des églises où se sont barricadés les « persécutés » et leurs curés. C’est la « querelle des inventaires ». En mars 1906, dans le département du Nord, une manifestation dérape et un homme est tué. Clemenceau, ministre de l’Intérieur, estime sagement que « quelques chandeliers ne valent pas une révolution » et pousse à l’apaisement. La paix vient donc. Elle est relative.
L’histoire des relations entre l’Église catholique et la République, au xx e siècle, est celle d’un feu mal éteint, qui se refroidit parfois, couve toujours et qu’une étincelle suffit à rallumer. En 1914, catholiques et anticléricaux se retrouvent temporairement face à l’ennemi commun ; de nombreux congrégationistes rentrent d’exil ; les prêtres endossent l’uniforme, c’est l’« union sacrée ». Dix ans plus tard, en 1924, le gouvernement de gauche cherche à étendre l’égalité républicaine où elle n’est pas : il veut faire appliquer la loi de Séparation en Alsace-Moselle, qui y avait échappé, les trois départements étant allemands en 1905. Furie locale, manifestations monstres et défaite des laïcards . L’Alsace-Moselle continuera (et continue toujours) à appliquer le Concordat. La parenthèse de Vichy est une divine surprise – selon le mot de Maurras – pour les vieux ennemis de la République : d’innombrables catholiques feront de la résistance, mais dans sa grande majorité l’épiscopat ne ménage pas son soutien à Pétain. Du coup, la Constitution de la IV e République est résolument laïque, comme le sera celle de la V e : « La France est une République indivisible, laïque , démocratique et sociale » précisent les deux textes. Mais dans les années 1950-1960, quelques lois d’influence chrétienne-démocrate ravivent la question par le biais de l’enseignement : les laïques refusent que l’argent public aille à une autre que l’« école publique » et organisent de grandes manifestations contre les textes qui visent à subventionner l’école que les catholiques appellent « l’école libre ». Après la victoire de la gauche de 1981 et sa volonté de réaliser son programme, le camp inverse descend aussi massivement dans la rue pour refuser toute perspective d’un « grand service public unifié de l’éducation » qui conduirait, selon eux, à la nationalisation de leurs écoles. Le statu quo finit par s’établir. Est-il temporaire ? Quoi qu’il en soit, à partir de la fin du xx e siècle, le mot même de laïcité ne semble plus faire peur à grand
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