Notre France, sa géographie, son histoire
seigneurs. Qu'il dresse sa tente de velours rouge sous une forêt de
la Comté, les ambassadeurs des princes, les princes eux-mêmes y viendront de
l'Orient, de l'Occident.
Où est le roi de France, où est Louis XI ? A peine on pourrait le
dire. Il ne réside guère dans son triste hôtel des Tournelles. A peine roi, il
a pris l'habit de pèlerin, la cape de gros drap gris avec les houseaux de
voyage, il ne les ôtera qu'à la mort. Apre chasseur, il va regagnant des places
à la France. L'ambition démesurée, insatiable de son rival, à la longue,
servira aussi sa fortune.
Au moment où Charles le Téméraire vient de prendre la Gueldre à son
héritier légitime, un enfant de six ans, il apprend la mort du duc de Lorraine
et trouve tout simple, dans sa brutale avidité, d'enlever le jeune René de
Vaudemont, croyant prendre l'héritage avec l'héritier. Pour plus de garanties,
il se fit donner en Lorraine, quatre places fortes aux frontières et de plus le
libre passage, c'est-à-dire, la faculté d'occuper tout quand il voudrait. Il
avait déjà, disait-on, désigné Nancy pour la capitale de son empire.
Mais là, le doigt de Dieu le toucha. Les Suisses qu'il s'apprêtait à
combattre pour se frayer la route de l'Italie, ne l'attendirent pas, il reçut
d'eux un solennel défi. Muet de fureur, il part en plein hiver pour les
châtier, il trouve au pied des Alpes ses premières défaites :
Granson !
Morat ! Le terme fatal était venu pour lui.
Il donna sa dernière bataille sous les murs de Nancy.
A la même heure, Angelo Cato, disait la messe devant le roi à
Saint-Martin de Tours. En lui présentant la paix, il lui dit ces paroles :
« Sire, Dieu vous donne la paix et le repos ; vous les avez si vous
voulez : consummatum est ; votre ennemi est mort. »
C'était, en effet, pour la France le droit d'exister. Louis XI né
avide, mais plus avide encore comme roi et royaume allait faire une âpre curée.
La faim s'aiguisait des obstacles ; il souffrait de tous les fiefs qu'il
n'avait pas encore. Il allait tous les recueillir, soit par rachat, soit par la
mort de leurs possesseurs. Le duc de Bourgogne trépassé, il semblait que tous
dussent le suivre. Et la mort, en effet, active, infatigable, frappait partout
à son profit. D'abord ce fut le frère du roi. Cette mort lui rendait la Guyenne
et presque toute l'Aquitaine qu'il lui avait données comme à son héritier, pour
le détacher de l'ennemi. Maintenant, c'était la mort de son cousin Charles du
Maine qu'il apprenait. A peine il entrait en jouissance du Maine, de la
Provence, de ces beaux ports, de la mer d'Italie, qu'une nouvelle lui vient du
Nord, inattendue, saisissante : la maison de Bourgogne est éteinte, tout
comme celle d'Anjou ; la fille de Charles le Téméraire, Marie, est
morte !... Voilà son duché réuni pour toujours à la couronne.
Ainsi, la proie, elle-même, venait au chasseur. Il avait déjà repris
toutes les places du Nord : Péronne, Arras, Abbeville, Boulogne. Arras
deux fois barrière, et contre Calais et contre la Flandre. Boulogne, ce
vis-à-vis des dunes qui regarde l'Angleterre.
Restait à prendre la Bretagne, de tous les grands fiefs, le seul
encore qui eût vie et gardât son indépendance. Une fois, le roi essaya de
saisir le Breton en lui jetant au col son collier de saint Michel, comme on
prend un cheval sauvage ; mais celui-ci n'y fut pas pris, il continuait de
vivre dans son obstination insulaire.
Louis XI eut son continuateur dans sa très ferme et politique fille,
Anne de Beaujeu. Plus heureuse que son père, elle eut raison des résistances de
la Bretagne, prit son unique héritière et la maria à son frère Charles
VIII.
Voilà donc la France désormais fermée et toute province garantie.
L'orgueil sauvage et meurtrier de Bourgogne n'effraye plus le Nord. Les
Nemours, les Armagnacs ne sont plus en position d'ouvrir la Gascogne à
l'Espagne. L'Île-de-France, en profonde paix, travaille, laboure derrière la
Picardie ; et celle-ci est abritée par l'Artois. La Champagne, le
Bourbonnais sont gardés par la Bourgogne. Le Languedoc garanti par les
acquisitions nouvelles, redevient le grand et magnifique centre du Midi.
C'est là notre vieille France bien complète et bien gardée aussi par
ses naturelles frontières, les montagnes et la mer.
1 Avant de donner séparément la géographie et
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