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Perceval Le Gallois

Perceval Le Gallois

Titel: Perceval Le Gallois Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean Markale
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envoyé un innocent à la mort (13) . Par ma foi, je vais me rendre au pré pour savoir ce qui s’est passé. – Tu as raison, intervint Arthur. Je m’en veux de ne pas avoir coupé court à la méchanceté de Kaï. Va, et vois si tu peux faire quelque chose en faveur de ce jeune fou. »
    Yvain s’en alla donc dans le pré. Et comme il s’attendait au pire, il ne fut pas peu surpris de voir le jeune Gallois s’acharner sur le cadavre de son adversaire. « Que fais-tu là ? demanda-t-il. – Par Dieu tout-puissant, répondit Perceval, je ne sais trop… Je veux prendre les armes de ce chevalier, puisque l’Homme Long m’en a donné l’ordre. Mais j’aurai plutôt déchiqueté son corps pour en faire des grillades que mis la main sur une seule de ses armes. Elles tiennent à lui si étroitement que le dedans et le dehors m’ont tout l’air de ne faire qu’un : l’un ne veut pas venir sans l’autre ! »
    Yvain ne put s’empêcher de rire en voyant la mine déconfite du jeune homme. « Mon ami, dit-il enfin, ne t’inquiète de rien. Je me chargerai de la besogne, si tu le veux bien. » Et, sans plus de commentaires, Yvain dépouilla le mort de ses armes et de ses habits. « Tiens, reprit-il, tu peux maintenant quitter ta méchante vêture pour celle-ci : elle est digne d’un prince. » Mais le Gallois ne l’entendait pas de cette oreille. Yvain avait beau dire, il ne voulait pas se défaire des vêtements et des brodequins que lui avait donnés sa mère. « Comment ? s’écria-t-il. Est-ce une plaisanterie ? Échanger ma grosse chemise de chanvre contre celle-ci qui est molle et tendre, et qui ne me protégerait même pas du froid et des épines ? Honni soit le fou qui troquerait ses bons habits contre les mauvais d’autrui ! »
    Yvain n’insista pas. Il se contenta de lui faire endosser l’armure, lui laçant les chausses et lui fixant les éperons sur ses brodequins. Puis il lui enfila le heaume et le ceignit de l’épée. Après quoi, il lui mit le pied à l’étrier et lui fit enfourcher le cheval de bataille. Jamais le jeune Gallois n’avait vu d’étrier, et il ignorait à quoi servent les éperons : il ne connaissait guère que les baguettes ou les liens d’osier. Enfin, Yvain lui tendit la lance et le bouclier en disant : « Maintenant que te voici à peu près correctement vêtu, suis-moi auprès du roi Arthur afin de te faire armer chevalier. M’est avis que tu l’as amplement mérité !
    — Que je perde mon honneur si j’y vais ! s’écria Perceval. Je te remercie de ton aide. Prends mon cheval gris pommelé. Il est robuste et te rendra service, j’en suis sûr. Et si tu retournes auprès du roi Arthur, emporte la coupe : tu la donneras de ma part à la reine Guenièvre. Dis aussi à Arthur qu’en quelque endroit que je me trouve, je serai son homme, et si je puis agir pour son service et profit, je n’y manquerai pas. Tu ajouteras enfin que je n’irai pas à la cour que je n’aie d’abord rencontré l’Homme Long et vengé l’outrage subi par le nain et la naine. » Après avoir salué le jeune Gallois, Yvain s’en retourna auprès d’Arthur. Il remit la coupe à Guenièvre qui en fut tout heureuse, et il raconta l’aventure à toute l’assistance, et sans omettre la menace proférée à l’endroit de Kaï.
    Revenu de son évanouissement, le nain se tenait près du foyer. Quand il eut entendu le récit d’Yvain, il se redressa d’un bond et se précipita devant le roi, manifestant une telle joie qu’il se mit à danser et à trépigner. « Seigneur Arthur ! s’écria-t-il, voici qu’approche l’heure des aventures prophétisées par le sage Merlin à propos du Graal. Ces aventures seront pénibles et redoutables, et nombre de tes compagnons n’en reviendront pas. Le jeune homme que tu as vu ici tout à l’heure, et dont tout le monde s’est moqué, sera l’un des héros qui les accompliront, car il est vraiment le chef des guerriers et la fleur de la chevalerie de ce temps. Quant à Kaï, crois-moi sur parole, il se repentira fort d’être en vie et d’avoir si mauvais caractère ! Avant qu’il ne soit quarante jours, celui que vous preniez pour un jeune fou lui aura fait payer très cher le soufflet que j’ai reçu et le coup de pied qu’il a donné à la naine. Entre le coude et l’aisselle, il aura le bras droit brisé. Qu’il en fasse son deuil dès maintenant : il devra porter son bras suspendu à son cou pendant

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