Qui étaient nos ancêtres ?
celui qui dicte son testament est précisé « étant toutefois en son bon sens, ferme propos, entier jugement et parfaite connaissance ». L’enfant qui reçoit une donation le fait « humblement remerciant et acceptant ». La femme qui intervient dans un acte le fait « de l’advis, consentement et authorité » de son mari.
Ces formules, si elles allongent et alourdissent les actes, traduisent et intègrent les gestes symboliques qui les ont ponctués, véritable rituel accompli en public.
Lorsqu’il achète un verger, Pierre Naville, habitant de Salon-de-Provence, est ainsi « mis en possession, réelle, actuelle et corporelle dudit verger », le notaire « le faisant entrer et sortir par trois fois dans icelui et cueillir et rompre des branches et rameaux d’olivier (…) en signe de vrai imission de possession ». Au fils qu’il émancipe officiellement, devant le viguier assis sur son siège, le père « tenant ses mains entre celles de sondit fils, requis humblement par lui, l’a émancipé et en signe de ladite émancipation a ouvert et séparé ses mains d’entre celles de sondit fils ».
Le symbolisme du geste est suffisamment fort pour dispenser de parler. Le « pot de vin », dont le sens a glissé au cours des siècles, n’est à l’origine qu’un petit supplément de prix, payé en nature pour offrir ces gobelets de vin ou d’eau-de-vie que l’on va choquer pour sceller concrètement l’accord. On a déjà remarqué qu’au Moyen Âge le seigneur concédant une terre à un manant lui remettait un objet qui en symbolisait la possession, comme un fétu de paille ou une motte de terre…
Une histoire de pot et de roses
« Découvrir le pot aux roses » est très certainement une des expressions populaires qui est restée parmi les plus obscures.
Au Moyen Âge, la rose était une fleur rare et recherchée, soigneusement cultivée et bien évidemment chargée de propriétés et de symboles en raison de sa perfection. Elle est à l’Occident ce qu’était le lotus à l’Orient. Dans l’iconographie chrétienne, elle symbolise le cœur du Christ et la coupe ayant recueilli son sang, dont elle est la transfiguration. Son image évoque le Graal, mais aussi la rosée céleste de la Rédemption. Elle est associée à la fois à la Vierge et à l’âme, à la Résurrection et à l’immortalité. La rose d’or, bénie par le pape le quatrième dimanche de Carême, symbolise quant à elle la puissance, et la rose des vents, dans l’art gothique, rejoint le symbolisme de la roue… Les troubadours en feront le symbole de l’amour, et les alchimistes, celui de l’impossible, leurs traités étant souvent intitulés Rosiers des philosophes… On ne saurait dès lors s’étonner que l’expression latine sub rosa (sous la rose) signifie « en grand secret ».
À notre « pot aux roses », on a évidemment proposé maintes explications. On l’a d’abord rapprochée des pots dans lesquels nos aïeules avaient coutume de garder ces fleurs, et surtout leurs pétales, dont elles appréciaient le parfum, qui s’échappait lorsque l’on en soulevait le couvercle. On a également évoqué que l’on avait coutume, au cours d’une réunion dont le sujet devait rester secret, de recouvrir symboliquement un vase ou une coupe (un pot). Selon le dictionnaire de Furetière, datant du XVII e siècle, cette formule remonterait au XIII e et signifierait « faire voir le secret d’une affaire où il y avait quelque turpitude ; découvrir imprudemment une affaire que l’on voulait tenir secrète, le secret d’une affaire où il y avait de l’ordure ». Dès lors, on peut se demander de quel pot il s’agissait… Non pas du « pot de chambre », qui n’apparaîtra qu’au milieu du XVI e siècle, mais sans doute de celui autour duquel on tourne, dans l’autre expression, moins ancienne, « tourner autour du pot »… ce que nous pourrions sans doute faire nous-même longtemps et vainement ici, sans pour autant arriver à découvrir vraiment ce « pot aux roses » qui pique notre curiosité…
À un autre niveau de la société, le cérémonial de l’adoubement était constitué lui aussi d’une succession de gestes symboliques, insistant tout autant sur sa signification religieuse que sur sa portée politique et sociale. Il commençait, la veille, par un bain purificateur que prenait le futur chevalier avant d’entamer une nuit de prières. Au matin, il
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