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Qui étaient nos ancêtres ?

Qui étaient nos ancêtres ?

Titel: Qui étaient nos ancêtres ? Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean-Louis Beaucarnot
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légende.
    Les uns tenaient entre leurs mains l’instrument qui avait servi à les martyriser : saint Laurent son gril, sainte Catherine sa roue, saint André sa croix en forme d’« X », sainte Apolline la tenaille avec laquelle on lui avait arraché les dents, saint Étienne une pierre (il avait été lapidé). Saint Denis tenait sa tête, revêtue de sa tiare d’évêque, du fait qu’après qu’on la lui eut tranchée, il avait marché de Paris à Saint-Denis, en la portant sous le bras. Saint Sébastien, enfin, était représenté le corps criblé de flèches, sans oublier la petite sainte Agathe, présentant humblement sur un plateau les seins qu’on lui avait tranchés…
    D’autres portaient des objets rappelant leur vie ou leur patronage. Sainte Madeleine tenait un flacon de parfum destiné à embaumer le corps du Christ, sainte Barbe avait à ses pieds la tour dans laquelle son père l’avait enfermée, saint Nicolas la cuve d’où sortaient les trois enfants qu’il avait sauvés. Saint Christophe portait le Christ sur son dos avec un bâton en main, alors que saint Fiacre, patron des jardiniers, était représenté avec une bêche, sainte Marthe, patronne des aubergistes et des ménagères, avec une louche ou une marmite, et saint Pierre, évidemment, tenait l’énorme clé toute dorée du Paradis…
    C’est encore tout un bestiaire, très parlant pour nos ancêtres : le cochon tapageur qui empêcha saint Antoine de se concentrer pour prier, le chien qui sauva saint Roch de la faim en lui apportant un pain, le cerf que saint Hubert chassait au moment de sa conversion, la coquille « Saint-Jacques »…
    Dragon ou taureau, calice ou balai, ces symboles achevaient de rendre vivants et présents à nos ancêtres tous ces personnages dignes de nos bandes dessinées, dans un monde où l’objet et le dessin avaient une place privilégiée.
    Le blason des chevaliers, qui n’était à l’origine que leur logo, était pareillement avant tout un signe de reconnaissance, et l’on ne connaît finalement guère d’autre moyen de publicité que le recours au signe. C’est ainsi que le criminel est marqué au fer rouge, ou que l’auberge se signale par l’enseigne du « lit-on-dort ». L’image, sous toutes ses formes, est l’ancêtre de notre pictogramme, et remplace elle aussi bien des mots…
    A-t-on moins de vocabulaire ? Sans doute, et plus certainement chez les humbles, bien qu’aucune étude n’ait pu être valablement menée à ce jour sur cette question. Mais au fait que les mots sont, sans nul doute, moins nombreux, vient s’ajouter celui que certains sont à la fois évités et remplacés par des périphrases ou des métaphores, comme on l’a vu pour la mort, moment crucial où le silence règne à nouveau, mode d’expression du deuil éprouvé, du respect et de la crainte et de l’incompréhension qu’elle inspire. Lorsqu’elle survient, le gestuel s’aligne sur elle. On arrête tout travail et l’on met tout l’environnement au même régime, en allant dételer les animaux. Même les abeilles doivent s’arrêter de butiner et de bruire, pour laisser toute la place aux prières murmurées à voix basse et que rompent seules cet immense silence qui leur permettra de monter plus directement au ciel. Les choses dites à voix basse bénéficient d’un poids plus fort encore, en ce qu’elle suscitent davantage attention et curiosité.
    Silencieux mais bruyants et plus encore
susceptibles et procéduriers
    Tout ce qui brise le silence n’en revêt donc que plus d’importance. En ville, ce sont les cris des marchands ambulants vantant leurs marchandises, et partout, ce sont les sonneries de cloches, qui rythment la vie et la journée, annoncent les nouvelles ou sonnent le tocsin pour assembler la population. On les sonne si fort, notamment pour éloigner les orages, qu’il arrive parfois qu’elles se fendent… C’est aussi le son du tambour du garde champêtre, héritier du crieur public qui s’en allait crier les informations sur les places et dans les rues. À Gallargues, en mai 1550, nous l’entendons crier ainsi les amendes que les consuls viennent de tarifer : «  Las penos derenegadous sus la peno de dix sols, las penos de labar los tripos près des poses sus la peno de quatre sols  » (« Les peines des blasphémateurs dix sous, les peines pour laver les tripes près des puits quatre sous… »). Pour qui a pris « le bois des arbres fruitiers », ce

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