Qui étaient nos ancêtres ?
entendait la messe et se voyait remettre, avec des gestes mesurés, l’épée, le casque – qu’on appellait le heaume –, la cotte de maille – qui était le haubert –, le bouclier, que l’on nommait écu (d’où notre écusson ) et la lance. Notons que notre chevalier ne portait pas l’armure sans laquelle on n’arrive pas à l’imaginer aujourd’hui. Sous sa cotte de maille, il avait un gambeson, sorte de gilet rembourré, et se contentait en fait, par-dessus, d’un simple surcot, qui était une tunique souple, destinée à empêcher l’éblouissement que risquaient de provoquer les reflets de sa cotte renvoyant les rayons du soleil. Ce n’est que dans la seconde partie du XIV e siècle, lorsqu’il devra se protéger contre les premières armes à feu, qu’apparaîtra notre armure de cinéma.
C’était donc à genoux, signe d’humilité et de soumission, et les mains jointes dans celles de son seigneur, pour bien exprimer sa volonté de devenir l’homme d’un autre homme, que le bachelier , comme on nommait l’aspirant chevalier, recevait de celui-ci la paumée ou collée , consistant en un coup donné du plat de la main ou de l’épée, laquelle épée, évidemment, avait été préalablement bénite. Ces gestes accomplis, et l’ayant été en public, le seigneur relevait alors le jeune homme et, après lui avoir parfois donné un baiser, lui remettait son ceinturon et ses éperons. Il lui passait au bras son bouclier, auquel le prêtre présent ajoutait souvent une bannière.
Chapeaux à plumes et exhibitionnisme :
le choc des photos
Au poids des mots, qui sont rares, correspond bien sûr, déjà, le « choc des photos ». Choc de l’objet et de l’image, nécessité des signes de reconnaissance en tous domaines et en toutes occasions. Au Moyen Âge, la fourche patibulaire donne la mesure du pouvoir du seigneur haut-justicier, comme l’exprime aussi le colombier à pied , édifié en tourelle, alors que les girouettes, réservées aux toits des seuls gentilshommes, indiquent, selon qu’elles sont de forme pointue ou carrée, la place que ceux-ci occupent dans la hiérarchie féodale. À l’église, le seigneur a son banc d’œuvre et ses parents sont inhumés dans le chœur. Partout, l’habit fait le moine, comme la coquille de Saint-Jacques fait le pèlerin, comme le bâton blanc fait l’entremetteur, l’aumusse le chanoine, comme plus tard l’écharpe fera le maire et la plaque de cuivre le garde champêtre.
Aux louées de la Saint-Jean, foires où les domestiques se proposent pour les travaux d’été, le charretier s’exhibe un fouet autour du cou, le farinier un sac vide à l’épaule, le berger une touffe de laine à sa blouse, le faucheur un épi de blé à son chapeau et la servante de ferme une rose à son corsage. De la même façon, les écôleurs du Queyras qui passent l’hiver en se plaçant comme instituteurs dans les villages provençaux s’affichent, lors des grandes foires automnales de Digne, de Gap, de Valence, de Nyons ou de Carpentras, en arborant à leur chapeau des plumes, dont le nombre indique traditionnellement leurs compétences. Une seule pour celui ne sachant enseigner que la lecture, deux pour ceux qui y ajoutent l’écriture, une troisième pour le calcul, une quatrième pour le latin.
Tous ces objets et toutes ces images sont ressentis comme d’autant plus nécessaires que l’on ne savait justement ni lire ni écrire. Dans les rues, les enseignes des échoppes, comme à l’église les attributs des saints, tout est organisé en fonction de ce principe.
L’étrange catalogue des attributs des saints
Puisque chaque saint patronnait un métier et protégeait certains groupes sociaux, il importait qu’il soit reconnaissable et identifiable lorsque nos ancêtres le « rencontraient » à l’Église, où il était statufié.
Heureusement, ces saints étaient le plus souvent très familiers aux populations d’autrefois, pétries, comme on l’a dit, de religion. Pour elles, saints et saintes étaient autant de héros, parfaitement comparables à ceux que nous proposent aujourd’hui nos séries télévisées, et dont on connaissait suffisamment les vies et les légendes pour pouvoir les reconnaître au plus petit indice. Chaque saint avait donc un attribut bien à lui, qui s’imposait à chacun, et relevait à la fois d’un vaste bestiaire et de toute une quincaillerie directement approvisionnés par leur
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