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Qui étaient nos ancêtres ?

Qui étaient nos ancêtres ?

Titel: Qui étaient nos ancêtres ? Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean-Louis Beaucarnot
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notaire, contenant plumes, encre, poudre à sécher et papier, pour rentrer le soir, souvent crotté et fourbu, chargé d’œufs, de lard, de poulets, de lapins ou de jambons, qui constituent souvent l’essentiel de ses honoraires : « J’ai reçu deux poulets. J’en aurai un autre à Noël », note couramment en marge de ses actes un notaire provençal.
    Il n’empêche que toutes les tractations du secteur, tant mobilières qu’immobilières, passent entre ses mains, qu’il est au courant des affaires de famille et de tous les projets de mariage, qu’il préside aux entrées en apprentissage et à celles des fermiers, aux ventes de terres et aux achats de cure. Outre ces actes traditionnels, il intervient à plusieurs niveaux et on trouvera au nombre de ses minutes les actes les plus divers : celui régissant l’embauche d’un maître d’école ; un acte de notoriété, permettant à quelqu’un qui ne peut fournir d’extrait baptistaire en bonne et due forme de prouver son identité ; un acte d’émancipation, ou un certificat d’honorabilité, délivré à un garçon désireux de s’engager dans l’armée ; une sommation respectueuse établie pour un fils majeur, contrarié par ses parents dans ses projets matrimoniaux et tenu, avant de passer outre leur refus, à leur demander, par principe et une dernière fois, leur bénédiction. C’est chez lui que se règle le sort d’un enfant « faible d’esprict et incommodé », auquel on attribuera une pension. C’est chez lui que l’on vient se porter caution pour garantir un prêt d’argent ou d’outillage. C’est chez lui que l’on verra les filles séduites venir déclarer leur grossesse. Faute de pouvoir divorcer, c’est encore à lui que recourent des époux pour organiser une séparation de fait. Arpentages, quittances et reconnaissances de dettes, ventes aux enchères, baux en tout genre… ; rien ne lui échappe, sans oublier des actes au contenu plus grave et politique, telles les abjurations d’hérésie, dont beaucoup ont été témoins, au XVII e siècle, dans les provinces du Sud. Au XIX e siècle, l’âge d’or de la conscription et du tirage au sort, qui contraignait celui tirant un « mauvais numéro » à sept longues années de service militaire, lui donnera une nouvelle occasion d’instrumenter, par la rédaction de contrats dit « de remplacement », aux termes desquels, moyennant des sommes rondelettes, des gars qui avaient tiré de « bons » numéros acceptaient de partir à la place des fils de famille malchanceux. Ces tractations étaient parfois organisées et gérées par le notaire lui-même, qui se transformait alors en recruteur pour mettre en relation les contractants.
    L’encre, la grosse et la minute
     
    Le tabellion écrivant ses « tablettes » et le notaire prenant ses « notes », en un temps où tout était cher, non seulement usaient de divers artifices, dignes de notre moderne sténographie, pour économiser l’encre, mais s’efforçaient également d’économiser au maximum le papier en rédigeant leurs actes originaux d’une écriture aussi serrée que menue et minutieuse, d’où l’appellation de « minutes » donnée aux documents dont ils devaient assurer la conservation.
    Pour ce qui était des exemplaires destinés aux parties concernées, il s’agissait d’actes rapidement recopiés, d’où leur nom « d’expédition » et, faute de papier carbone et de photocopieuse, d’actes écrits – là encore pour gagner du temps – d’une écriture plus grossière, d’où leur nom de « grosse ».
    Aujourd’hui encore, on parle de la « grosse » d’un jugement, qui est le texte délivré au gagnant d’un procès et revêtu de la formule exécutoire, par laquelle « la République française mande et ordonne… » à toute personne requise de prêter main-forte pour faire exécuter le jugement en question.
    L’encre, elle aussi, était précieuse, souvent fabriquée directement par ses utilisateurs, comme elle le sera plus tard par l’instituteur. Chaque curé, chaque notaire avait donc sa recette, qu’ils s’échangeaient parfois et prenaient toujours beaucoup de soin à noter par écrit, quitte à le faire parfois au beau milieu d’un registre baptismal. Pour obtenir de « l’ancre perpétuel », tel notaire de la Drôme conseille ainsi de prendre « deux pots de vin blanc ou daret, une livre de galle à l’espine romaine, quatre onces de

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