Qui étaient nos ancêtres ?
un bon repas au terme de son étape. Si le petit migrant couche à la grange, le bourgeois, et plus tard le « roulier » (transporteur professionnel), le « voyageur de commerce » ou le colporteur aisé préféreront loger à l’auberge. Soit dit en passant, notre auberge fonctionna longtemps sur le fameux modèle « espagnol ». Lorsque l’on suit le sire de Gouberville dans ses petits voyages en Cotentin, au milieu du XVI e siècle, on le voit régulièrement arriver à l’auberge avec son « manger ». À l’auberge du Vey, il débale ainsi deux lapins ; ailleurs du boudin, ailleurs encore « un flacon de deux pots » (vraisemblablement de vin) et « trois quartiers d’un gros cochon, un chaponneau, du mouton, du lard », que le tenancier lui prépare. Un règlement de l’époque ne prévoyait-il pas que « le passant pourra apporter (des viandes) ou en envoyer quérir par la ville au marché ou ailleurs », ajoutant que « l’hostellier sera tenu de les faire cuire, en faisant payer raisonnablement la cuisson et l’appareil », autrement dit la préparation. Le tenancier devait de même fournir au passant « bois et chandelle », mais encore « linge, paille et avoine et aussi du foin de première herbe et non de seconde », cela bien évidemment pour la monture.
Comment le « lion d’argent » avait tout faux !
Nos ancêtres, ne sachant ni lire ni écrire, usaient énormément de pictogrammes et de logos, seules façons pour eux de faire passer une idée de façon simple et efficace.
En ville, les enseignes, de bois ou de fer forgé, émaillaient ainsi les rues, se balançant et grinçant au gré des vents.
Enseignes dans leur majorité simples et parlantes, telle la botte du bottier ou du cordonnier, la paire de lunettes du lunettier, le cercle de tonneau pour indiquer l’atelier du tonnelier. La taverne était ainsi indiquée par un bouchon (à l’origine des petits « bouchons » lyonnais) dont le nom était le frère de celui de notre « buisson », désignant une touffe de végétation. Le bouchon de la bouteille avait été à l’origine une petite touffe d’herbe très serrée, utilisée avant l’exploitation du liège, pour boucher les fûts et les tonneaux. Il avait ensuite trouvé sa place à l’extrémité des bouteilles, dans lesquelles le vin avait longtemps été recouvert d’une couche d’huile surnageant. Ce bouchon d’herbes et cette couche d’huile sont l’un et l’autre à l’origine de l’habitude des quelques gouttes que l’on verse ostensiblement dans son verre, avant de servir les invités.
Enseignes parfois plus sophistiquées, liées à la religion, souvent par le biais du saint protecteur, dont la boutique arborait l’image, et ce qui lui valait d’être dénommée « À l’image de saint Crépin » (de saint Honoré, de saint Joseph…) » ou passant par une saynète amusante, elle aussi reproduite comme une image de bande dessinée, avec des enseignes « Au chien qui rit » ou « qui fume », « À la pie qui boit », « À l’âne qui veille », « Au veau qui tète », « À la truie qui file », ou comme chez Balzac « Au chat qui pelote ».
Beaucoup enfin usaient de jeux de mots ou de rébus, comme la consonne K, traversée d’une barre, indiquant le cabaret , et pour plus d’une auberge la classique enseigne du « Lion d’or », signifiant ici lits, on dort, qui se vit ensuite déclinée en des « Lions d’argent » ne rimant plus à rien. Beaucoup de ces établissements arboraient encore une croix, en signe de l’asile charitable, ou un cheval blanc, voire une botte de paille, très prosaïquement évocatrice de la paillasse sur laquelle on pourrait passer la nuit, comme le suggéraient encore la laine du « Grand mouton » ou le duvet du « Cygne » ou de la « Poule blanche ».
Auberge, taverne, cabaret, café : autant de lieux de sociabilité, dont les tenanciers seront des personnages influents, issus d’une profession gui évolua lentement.
Dans les villes du Moyen Âge, on avait eu d’un côté les queux, autrement dit les cuisiniers, et les maîtres-sauciers, puis les cuisiniers-oyers , spécialisés dans la préparation des oies, qu’ils ne vendirent d’abord que bouillies, avant de se voir autoriser à les rôtir et à devenir rôtisseurs. C’est alors qu’ils prirent l’habitude de les livrer à domicile, – en plats préparés – tels les actuels coursiers
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