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Remède pour un charlatan

Remède pour un charlatan

Titel: Remède pour un charlatan Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Caroline Roe
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La fin d’Aaron fut étrange, mais elle n’a pas grand-chose à voir avec vous ou votre famille. Deux autres jeunes gens, tous deux amis de votre frère, sont morts récemment de manière semblable.
    — Des amis de mon frère ? Quels amis ? Morts tous les deux, dites-vous ?
    — Oui. Votre frère avait des amis, de bons amis, même s’il faisait de son mieux pour vous les dissimuler. De jeunes hommes dont le cadre familial était très différent du vôtre. Ils étaient tous deux chrétiens, l’un était le fils d’un tisserand et travaillait auprès de son père, l’autre étudiait au séminaire. Ils ne sont pas morts parce que vous êtes l’héritier de votre oncle. Dites-moi, fit Isaac sans la moindre pause dans son discours, votre frère a-t-il reçu une lettre peu avant sa mort ? Une lettre troublante ?
    — Non, pas que je sache. Ma mère ou la servante sont peut-être au courant. Si vous voulez, je peux leur poser la question.
    — Si vous n’en savez rien, Daniel, je doute qu’elles soient au courant.
    Isaac se leva pour dire au revoir au jeune homme.
    — Maître Isaac, je vous en prie, dit Daniel en se levant à son tour, encore un mot. Vous m’avez demandé pourquoi je suis venu vous voir, et cela me semble à présent avoir si peu d’importance que j’ai presque honte d’accaparer votre temps. Vous m’aviez demandé de quoi nous parlions ces dernières semaines, ces derniers mois. Il m’a entretenu d’un grand mage, un lettré venu d’un pays étranger, qui l’a beaucoup impressionné par sa sagesse et son savoir. Il a ajouté qu’il était allé une ou deux fois chez Marieta pour entendre son cours de théologie.
    — Chez Marieta ? Au bordel ?
    — Je crois bien, oui, dit Daniel, gêné.
    — Vous êtes certain qu’il ne se moquait pas de vous ? Qu’il n’allait pas plutôt chercher du plaisir chez Marieta ?
    — Non ! s’écria Daniel avec force. Ce n’est pas possible. Pas Aaron. Maître, il faut me croire. Aaron était un ascète, il avait renoncé au plaisir…
    — Pas à tous, certainement, trancha Isaac. Il passait beaucoup de temps chez Rodrigue, à boire du vin et à discuter avec ses amis.
    — Disons que les femmes ne l’intéressaient pas. Je sais que les hommes mentent à propos de ce genre de choses, surtout à leur famille, mais nous en avons beaucoup parlé. Il paraissait capable de les ignorer, pas seulement de se confronter à la tentation, tantôt pour perdre et tantôt pour l’emporter, comme nous tous. Cela l’irritait que notre mère cherche sans cesse à lui donner une femme – n’importe laquelle –, rien que pour améliorer son tempérament, comme s’il était un taureau qu’il faut castrer pour qu’il tire la charrue sans broncher.
    — Il devait être malheureux, dit Isaac d’un air pensif. Mais cela n’a rien à voir avec le fait qu’il était l’héritier de son père plutôt que de son oncle.
    — Je ne comprends pas, maître Isaac.
    — C’est peut-être aussi bien, répliqua le médecin. Je ne comprends peut-être pas moi-même.
     
    Ce soir-là, dans la taverne de Rodrigue, Ramon le tisserand accepta le gobelet de vin qu’on lui tendait et, un peu ivre, s’apprêta à raconter une fois encore son histoire. Sa renommée grandissait dans le sillage des contes sensationnels qui circulaient en ville et sa façon de boire changeait de même. Au lieu d’un gobelet de vin avec ses amis dans la petite taverne, il passait ses soirées à donner des versions de plus en plus élaborées de la mort de son fils et cherchait un public de plus en plus vaste pour ses épouvantables récits.
    — Et j’ai entendu frapper à ma porte, comme je vous le dis, fit-il en se lubrifiant la gorge avec le meilleur vin de Rodrigue. Il était tard et je m’apprêtais à me coucher. Une nuit sombre et ventée, oui, une nuit propice à la sorcellerie et aux vilenies.
    — Qui était-ce ? demanda un étranger, la seule personne de l’assistance qui ne connût pas encore cette histoire, sous une forme ou une autre.
    Les autres consommateurs de Rodrigue avaient depuis longtemps cessé de l’écouter.
    — Une dame en noir, grande et voilée. Je ne pouvais voir son visage, mais j’ai compris, à sa façon de se déplacer et à sa voix, que c’était une beauté, et qu’elle était mauvaise. Il y avait quelque chose de maléfique dans sa voix.
    — Que voulez-vous dire ? s’enquit l’étranger.
    — Elle était grave,

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