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Remède pour un charlatan

Remède pour un charlatan

Titel: Remède pour un charlatan Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Caroline Roe
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ils ont dit qu’ils ne pouvaient se permettre de nourrir une bouche de plus. Alors ils m’ont vendue.
    — Comment ont-ils pu faire ça ? s’écria Yusuf, indigné, tout en sachant à quel point cela avait dû leur être facile.
    Elle haussa les épaules et grimaça de douleur.
    — Mon premier maître voulait seulement une fille pour aider à la cuisine, et ce n’était pas trop dur, mais j’ai grandi et ma maîtresse est devenue jalouse, je crois, et elle m’a vendue à Sancho qui m’a revendue à Marieta.
    — Allons, Yusuf, les interrompit Nicholau. Il est temps que Zeynab s’installe confortablement. Elle est toute blême de ses blessures.
     
    Le dîner s’était déroulé de manière assez triste dans la maison de Pons Manet, le riche marchand de laine. De tempérament habituellement doux, son admirable épouse avait fait de son mieux pour oublier son chagrin et posé sur la table des mets tentateurs, des viandes épicées, des olives, des fruits de saison et des légumes au vinaigre, suivis d’un gigot de mouton et d’un lièvre braisé, mais chaque plat était reparti pratiquement tel qu’il était arrivé. Le fils aîné de Manet, Jaume, et sa femme, Francesca, n’étaient pas d’humeur plus joyeuse que les parents.
    — C’est chose fort difficile, dit le fils en repoussant son assiette, de ne pouvoir pleurer un frère parce que l’on a l’esprit empli de peur.
    — De peur ? répéta le père en regardant sa femme qui, le visage livide, ne réussissait même plus à faire semblant de manger.
    — Oh, Jaume, dit Francesca, n’en parlez pas, je vous en prie.
    — Oui, insista-t-il. De peur. J’ai vu ce matin Romeu, l’ébéniste, sous le porche sud de la cathédrale, et il m’a demandé si les rumeurs qu’il a entendues à notre propos étaient fondées. Et ce n’était pas la première fois que j’entendais parler de ces rumeurs.
    — Mais quelles rumeurs ? fit sa mère d’une voix tranchante.
    — Que je serai le prochain à mourir comme Lorens. Et que vous… nous tous sommes au bord de la faillite. Il a proposé de nous aider. Que se passe-t-il ? S’il y a du vrai là-dedans, vous ne devez pas me laisser dans l’ignorance.
    — Ce sont des absurdités doublées de méchancetés, répliqua Pons avec amertume, dignes des commères de cette ville.
    — Je suis aussi brave que le premier venu, je pense, dit Jaume, très pâle. Mais il n’est pas facile de penser que l’on peut mourir si jeune et de manière aussi horrible que mon pauvre frère. Que je laisserais mes parents dans le désarroi et Francesca seule avec un enfant que je ne verrai jamais, sans le moindre sou.
    — La pauvreté n’est rien, dit Pons, qui s’accrocha à ce détail pour ne pas envisager le problème en son entier. Quand j’étais petit garçon, notre garde-manger était souvent vide. Mon père travaillait dur, mais les temps étaient difficiles, et il n’avait pas l’audace nécessaire à la bonne marche d’un négoce. On survit à la faim quand elle n’est qu’occasionnelle. Puis mon frère a tenté d’accroître notre fortune, mais il n’avait pas la patience nécessaire à un dur labeur et à un investissement prudent. C’est seulement lorsque j’ai épousé…
    — Votre frère, trancha Joana Manet, était un homme paresseux et malhonnête, qui pensait pouvoir s’enrichir en trompant ses clients et ses fournisseurs.
    Elle était la plus jeune fille d’un poissonnier honnête et prospère. La modeste dot qu’elle avait apportée à son mari au jour de ses noces – des économies et des talents commerciaux acquis auprès de son père – avait été l’une des principales causes de leur prospérité.
    — Peut-être est-ce vrai, mon amour, dit tristement Pons, mais il est mort jeune.
    — Comment est-il mort ? demanda Francesca d’une voix tremblante de peur.
    — Des fièvres. Après avoir quitté le royaume. Ce fut une mort cruelle, m’a-t-on dit. Très cruelle. Il a payé le prix de ses erreurs.
    — C’est nous qui avons payé le prix de ses erreurs, reprit Joana. Ainsi que sa pauvre veuve et les bébés qu’il a abandonnés quand la loi s’intéressait à lui. Il a laissé les affaires en piteux état et sa famille sans un sou, comme vous le savez fort bien, mon mari. Quoi que demain puisse nous apporter, le Seigneur et tous Ses saints auront été bons pour nous, Jaume. Ton père a pu rembourser les dettes de ton oncle, retrouver ses clients et

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