Révolution française Tome 1
libéraux – le
vicomte de Noailles et le duc d’Aiguillon – puis les membres du clergé, les
représentants des provinces et des villes abandonnent leurs privilèges. Dans
les jours qui suivent, l’Assemblée décide l’abolition du régime féodal, l’égalité
devant l’impôt, la suppression des dîmes.
En fait, l’Assemblée annulait seulement les charges
seigneuriales qui « avilissent l’homme » – servitude, banc à l’église,
armoiries –, les droits réels devaient être rachetés…
Mais l’enthousiasme empêche de s’attarder à ces différences
pourtant capitales.
À l’Assemblée, « on pleurait. On s’embrassait. Quelle
nation ! Quelle gloire, quel honneur d’être français ! ».
À trois heures du matin, le 5 août, Lally-Tollendal s’écrie :
« Que l’union du peuple couronne l’union de tous les
ordres, de toutes les provinces, de tous les citoyens ! Que l’Assemblée
proclame Louis XVI restaurateur de la liberté française. »
Les députés scandent : « Vive le roi ! Vive
Louis XVI, restaurateur de la liberté française ! »
Le 10 août, afin de rétablir l’ordre, l’Assemblée arrête que
les municipalités peuvent requérir l’armée. Les officiers à la tête de leurs
troupes devront jurer de rester fidèles « à la nation, au roi, à la loi ».
Puis, le 26 août, l’Assemblée adopte en préambule à la
Constitution la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen.
« L’oubli et le mépris des droits de l’homme sont les
seules causes des malheurs publics », énonce le préambule, placé sous les « auspices
de l’Être suprême ».
C’est l’esprit des Lumières, le déisme des philosophes qui s’exprime
ici.
« Le but de toute association politique est la
conservation des droits naturels et imprescriptibles de l’homme. Ces droits
sont la liberté, la propriété, la sûreté et la résistance à l’oppression. »
« Les hommes naissent et demeurent libres et égaux en
droits. Les distinctions sociales ne peuvent être fondées que sur l’utilité
commune. »
« Nul ne doit être inquiété pour ses opinions, même
religieuses, pourvu que leur manifestation ne trouble pas l’ordre public établi
par la loi. »
Mirabeau s’emporte. Il regrette qu’on ne « prononce pas
sans équivoque la liberté religieuse ».
D’autres s’inquiètent qu’il n’y ait pas de droit d’association,
ni de réunion, de pétition. Mais la plupart s’enthousiasment devant « les
tables de la loi » de la révolution.
La Déclaration n’est pas seulement une arme contre l’arbitraire
du régime monarchique. Elle a un caractère universel. Elle peut s’appliquer à
toutes les sociétés humaines.
Et Barnave applaudit, déclare : « La Déclaration
des droits de l’homme et du citoyen est notre catéchisme national. »
Louis a suivi jour après jour l’élaboration et le vote des
arrêtés du 4 août, et de la Déclaration des droits. Il reste à élaborer la
Constitution. Mais d’abord, il peut approuver ou refuser les décrets du 4 août.
Il sait par certains députés que les « monarchiens »
– Mounier, Lally-Tollendal, Malouet – et les « patriotes » – le
triumvirat, Barnave, Lameth, Duport – se sont rencontrés à l’initiative de La
Fayette chez l’ambassadeur américain Jefferson pour une tentative de
conciliation.
Les monarchiens estiment que l’Assemblée leur est favorable,
qu’ils peuvent imposer dans la Constitution une deuxième chambre, peuplée de
sénateurs à vie, et donner au roi un droit de veto sur les lois.
Ils oublient les « patriotes du café de Foy », cette
« assemblée » du Palais-Royal, qui menacent de marcher sur Versailles
si l’on donne au roi un droit de veto.
On discute. On tergiverse entre députés. On se sépare en « droite »
et « gauche » pour ou contre le veto.
Le roi, habilement, ne publiera les décrets du 4 août « que
si on lui accorde un droit de veto, fût-il suspensif, pour une durée de deux
législatures ». Et la publication ne vaut pas acceptation pour le roi !
L’accord se fait pourtant le 22 septembre.
« Le gouvernement est monarchique, le pouvoir exécutif
est délégué au roi pour être exercé sous son autorité par des ministres. »
Il dispose d’un droit de veto suspensif.
L’article 1 de la Constitution affirme : « Le
gouvernement français est monarchique. Il n’y a point en
Weitere Kostenlose Bücher