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Romandie

Romandie

Titel: Romandie Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Maurice Denuzière
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dégringolé toute une volée de l’escalier du Marché. Il n’a pas repris
connaissance. Le médecin pense à une fracture du crâne ou, même, de la colonne
vertébrale, car il est sans réflexe et gémit dès qu’on le déplace. Montez vite
le voir.
    À son entrée dans la chambre, Axel trouva sa mère
agenouillée près du lit et tamponnant doucement, avec un linge mouillé, le visage
du professeur, d’une pâleur effrayante. Aricie tenait une cuvette, qui
tremblait dans ses mains. De grosses larmes glissaient sur ses joues.
    — Il ne s’est trouvé personne pour l’accompagner quand
il a quitté l’Académie ! C’est à peine croyable. Ces étudiants d’aujourd’hui
n’ont aucune éducation. Laisser un aveugle descendre l’escalier du Marché !
Quel abandon criminel ! s’insurgea M me  de Fontsalte
avant même d’embrasser son fils.
    — Je lui avais dit : « J’irai te chercher à
cinq heures, car la nuit tombe tôt », mais, comme toujours, impatient, il
ne m’a pas attendue. Quand je suis arrivée à l’Académie, on m’a dit qu’il était
parti seul. Je l’ai retrouvé chez l’apothicaire de la Palud, où les gens qui l’avaient
vu tomber l’ont transporté, expliqua Aricie entre deux sanglots.
    Puis elle ajouta :
    — C’est de ma faute, ce qui arrive. Je ne dois plus le
laisser sortir seul. Il ne voit pas ses pieds. Vous pensez, il a dû manquer une
marche et… oh ! mon Dieu, pourvu qu’il guérisse !
    Le médecin, qui tenait le poignet du blessé, salua Axel d’un
signe de tête et, répondant à l’interrogation muette de ce dernier, constata à
voix basse, pour ne pas être entendu des femmes :
    — Le pouls file, file. À peine si je le sens encore.
    — Vuippens est prévenu, dit Axel à sa mère, toujours
penchée sur Martin, dont les traits se creusaient, avec une crispation des
paupières et des lèvres, signe de souffrance, estima Axel, désemparé.
    Blaise, qui avait suivi son fils, lui toucha l’épaule.
    — Venez. Laissons les femmes s’occuper de lui avec le
médecin. J’ai vu assez de blessés de la colonne vertébrale pour savoir qu’il n’y
a, hélas, pas grand-chose à faire. Si la moelle épinière s’écoule par la
fracture, c’en est fait, mon petit. Je crains le pire, Axel, pour votre vieux
maître.
    Quand Vuippens arriva, une heure à peine après Axel, l’état
de Martin Chantenoz semblait stationnaire. Le poète ne gémissait plus mais son
visage, parfois secoué par des tics nerveux, révélait une souffrance latente. Ses
membres, en revanche, restaient inertes, et ses doigts, dans la main d’Aricie, ne
réagissaient à aucune pression. Louis s’entretint avec le médecin, puis demanda
aux femmes de quitter la chambre et requit Axel et Blaise pour soulever avec précaution
le blessé. Il voulait voir et palper son dos, couvert d’ecchymoses. La tête eût
basculé sur la nuque si Vuippens ne l’eût retenue en constatant une forte
tuméfaction entre les deux épaules.
    — Couchez-le doucement, dit-il en ôtant l’oreiller, afin
que le blessé reposât complètement à plat sur le matelas.
    — Alors ? dit Axel.
    — Il y a lésion grave, ou fracture, au rachis, comme l’indique
la quadriplégie que mon confrère a déjà constatée. Il aurait pu mourir sur le coup,
dit le médecin.
    — Et que peux-tu faire ? demanda Axel, anxieux.
    — Mon pauvre vieux, pas grand-chose ! Tenter de
lui faire avaler un peu de calomel à doses fractionnées mais je crains bien que
ce ne soit impossible et, si nous y parvenons, sans effet.
    — Une saignée, peut-être, proposa l’autre médecin.
    — À quoi bon ? Ne nous leurrons pas. C’est une
question d’heures, peut-être de minutes. Il y a déjà paralysie du diaphragme. Martin
est perdu. Il n’est plus conscient, mon pauvre vieux, acheva Vuippens en posant
une main affectueuse sur l’épaule de son ami.
    Le médecin lausannois confirma d’un hochement de tête.
    — L’issue de ce genre d’accident est, hélas, ordinairement
funeste. Nous sommes impuissants devant ces fractures indirectes, reconnut le
praticien.
    — Rappelle les femmes, je vais leur parler, dit
Vuippens.
    Quand Aricie et Charlotte, pâles et défaites, apparurent, le
regard plein d’interrogations, Louis les prit l’une et l’autre par le bras.
    — Il y a très peu de chances pour que le professeur se
rétablisse et, s’il devait se rétablir, mes pauvres amies, il resterait sans
doute

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