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Romandie

Romandie

Titel: Romandie Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Maurice Denuzière
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Genève en 1815 par le traité de Turin. Les
dispositions de ce traité, qui assurait, face au gouvernement genevois, la
légalité de la religion catholique, Vuarin s’en était toute sa vie servi comme
d’une arme, pour alimenter des chicanes, parfois mesquines, avec les autorités.
On lui reconnaissait aussi le génie de la provocation et rien ne semblait
autant le réjouir qu’un pasteur dans l’embarras ! Le peintre Joseph
Hornung, membre du Trois-Mars, convoqué pour faire le portrait de l’abbé sur
son lit de mort avait dit : « En vérité, voilà bien la figure d’un
homme qui est mort en paix. »
    Genève fit de grandioses funérailles à son curé et les
catholiques n’eurent pas longtemps à attendre pour connaître le nom de son successeur.
Dès le lendemain de la mise en terre du prêtre, M gr  Pierre-Tobie
Yenni, évêque de Genève, Lausanne et Fribourg, annonça que, suivant le vœu
souvent exprimé par le défunt, le nouveau curé de Genève serait son vicaire, l’abbé
Etienne Marilley, un Vaudois né à Châtel-Saint-Denis, au foyer d’un serrurier
père de sept enfants. Cette nomination avait été, déjà, recommandée par le
comte Crotti, ministre de Sardaigne, au nonce apostolique en Suisse.
    L’abbé Marilley, âgé de trente-neuf ans, carrure de paysan, jovial
et bonhomme, regard pétillant, avait été l’élève des jésuites, au collège
Saint-Michel, à Fribourg, avant de devenir précepteur chez les Gottrau de la
Riedera, une riche famille aristocratique. Il avait été ordonné en 1831, après
quatre années de théologie chez les jésuites, suivies de deux années de
séminaire. D’abord vicaire à Berne, puis à Échallens, il avait été, une
première fois, envoyé à Genève, auprès du curé Vuarin. Les Genevois, qui l’appréciaient,
avaient regretté qu’il les quittât deux ans plus tard pour devenir directeur au
séminaire de Fribourg. Ils s’étaient réjouis de son retour, en 1839, comme premier
vicaire du curé de Genève. Qu’il succédât à Vuarin paraissait donc naturel à l’immense
majorité des catholiques genevois, sauf à un groupe d’intrigants où l’on rencontrait,
au côté d’un prêtre mondain, des protestants convertis et certains curés, dont
les ambitions avaient été déçues. Cette désignation ne plaisait pas, non plus, aux
protestants, pour qui l’abbé Marilley apparaissait comme le continuateur
intransigeant de la politique du curé Vuarin. Quant au Conseil d’État genevois,
dont la ratification était indispensable pour que la nomination du nouveau curé
devînt légale et effective, il eût préféré un prêtre d’origine genevoise, plutôt
qu’un Vaudois, ancien élève des jésuites, bêtes noires des radicaux et dont on
craignait déjà, dit le Premier syndic Rigaud à M gr  Yenni,
« qu’il ne continue un système dont nous avons gémi pendant près de trente
années » !
    Axel n’avait pas revu Alexandra depuis le mois de mars, à
cause de ses occupations qui le retenaient à Vevey, mais aussi parce qu’il redoutait
l’obstination amoureuse de sa pupille, autant qu’il doutait de sa capacité à
résister à ses avances. Sa liaison avec Marthe Bovey, née de la rencontre de
deux sensualités épicuriennes et continuée par habitude, ne le contentait plus.
Le commerce d’amitié conjugale entretenu avec Élise ne le satisfaisait pas
davantage. Il avait cru ces relations complémentaires : elles n’étaient
que fragments hétérogènes d’un bonheur tronqué. Au fil des mois, il s’était
résigné à admettre que le plaisir est incomplet sans l’amour. Or, Alexandra
offrait l’amour et promettait le plaisir. Axel ne pouvait récuser le premier
mais s’interdisait le second.
    En dépit de ses craintes, il fut heureux de retrouver sa
filleule, à l’aise dans sa situation de banquière. Elle avait su, en quelques
mois, capter la confiance des associés de Pierre-Antoine, qui lui demandaient
maintenant de faire chaque matin la synthèse des informations reçues des
Bourses étrangères, des dépêches des correspondants particuliers, des articles
traitant de l’industrie, des mines et du commerce international.
    — Le dimanche, je suis souvent invitée chez un Cottier
ou chez un autre, car tous ont des fils ou des petits-fils à marier ! Si
je cherchais un mari, je n’aurais, parrain, que l’embarras du choix, dit-elle à
Axel.
    — Tu devras, un jour où l’autre, te choisir un époux,

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