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Romandie

Romandie

Titel: Romandie Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Maurice Denuzière
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générosité.
    — C’est Zélia, c’est Zélia ! Tu penses si on se
connaît ! Je la croyais morte depuis longtemps. Faut la soigner, Pernette.
Je vais la porter dans ma chambre, apporte de l’eau chaude et aussi de l’alcool.
    — Dans ta chambre ! Tu n’y penses pas ! Que
dira le maître…
    — Le maître la connaît, Zélia ! Et depuis longtemps !
C’est…
    — Je la connais en effet et depuis longtemps, dit Axel
qui, attiré par les éclats de voix, venait d’entrer dans la cuisine.
    — On peut la garder ici, un peu ? Le temps qu’elle
tienne debout ? demanda Lazlo, qui soutenait la femme à nouveau prise de
faiblesse.
    — Le temps qu’il faudra, Lazlo. Porte-la dans l’ancienne
chambre de l’institutrice. Il y a une baignoire. Pernette va la débarbouiller, la
mettre au lit et brûler ces hardes puantes. Et toi, va dire au docteur Vuippens
de venir ici tout de suite.
    Devant l’air effaré de la cuisinière, horrifiée par la
saleté de la Tsigane et, plus encore, rebutée par la tâche peu ragoûtante que
lui confiait son maître, Axel crut indispensable de rassurer celle qui servait
à Rive-Reine depuis trente années.
    — Cette malheureuse mérite tes soins, Pernette. C’est
une brave et courageuse fille. Elle a dû faire un long et pénible chemin pour
arriver jusqu’à nous, dit-il en caressant avec émotion la tignasse bouclée et
graisseuse de Zélia, abandonnée sans force dans les bras de Lazlo.
    — Et d’où qu’elle vient, comme ça ? demanda
Pernette, un peu contrariée, les mains sur les hanches.
    — Du bagne, sans doute, dit M. Métaz avec naturel,
comme s’il se fût agi d’une provenance honorable.
    Cette remarque du maître valut à Zélia, l’ancienne suivante
de la défunte Adrienne, un bain chaud auquel, ayant retrouvé ses esprits, elle
prit plaisir et, sur tout le corps, une vigoureuse friction à la brosse de
chiendent, qui lui plut moins et fit virer à l’incarnat sa peau brune de fille
des Carpates.
    Axel attendit la fin de l’après-midi pour informer Élise, encore
dolente mais ravie d’être mère, de la présence à Rive-Reine « d’une
Tsigane de la tribu de Lazlo, qui avait autrefois servi sa défunte demi-sœur
Adrienne de Fontsalte ». Cette présentation sommaire ne provoqua, sur le
moment, aucune réaction d’Élise, tout à la contemplation du bébé que langeait, après
sa première tétée, la garde envoyée par Vuippens.
    Le lendemain matin, Élise Métaz – bien qu’obligée
toutes les trois heures de donner le sein à son fils, car elle tenait à le
nourrir elle-même afin de lui conférer, disait-elle, force et santé – avait
retrouvé toute son alacrité. Elle avait aussi questionné Pernette sur la bohémienne
accueillie à Rive-Reine par son mari. Aussi, quand ce dernier vint lui offrir
un diamant superbe, monté sur un anneau d’or par Gallopin, l’orfèvre genevois
le plus réputé, se montra-t-elle plus curieuse que la veille. Le moment de
tendre émotion passé, après qu’Axel eut glissé la bague au doigt de sa femme, cette
dernière évoqua la présence de l’étrangère dans la maison.
    — Cette Jenisch malade et désemparée, Axel, que
comptez-vous en faire ?
    — Peut-être une sorte de nourrice sèche, comme disent
les Français, ou une nurse à la mode anglaise. Car, avec l’arrivée de notre
petit bonhomme, qui va beaucoup vous occuper, ne serait-ce que par ses nombreux
repas, il faudra quelqu’un pour le bichonner dès que vous serez en mesure de
reprendre votre vie normale de maîtresse de maison, dit Axel souriant.
    Élise ouvrit tout grands ses yeux pers et parut suffoquée
par cette proposition.
    — Faire de cette bohémienne qui, paraît-il, sort du
bagne, la nourrice, même sèche, de notre enfant ! Y pensez-vous
sérieusement ? D’ailleurs, sans vous consulter, je le confesse, j’ai
demandé, il y a trois semaines, à Françoise, qui m’a élevée et que vous avez
vue chez moi à Clarens, de venir ici. Elle s’ennuie dans son village de la
Gruyère. Ce sera une aide dévouée, compétente et en qui j’ai toute confiance. Elle
se présentera dans quelques jours.
    Devant le ton catégorique de son épouse, M. Métaz s’inclina
sans plaisir. Il avait subodoré, dès le premier moment, qu’Élise, déjà méfiante
envers Lazlo, n’admettrait pas aisément la Tsigane qui, pour elle comme pour la
plupart des Vaudois, ne pouvait être qu’une intouchable.
    Quant à Axel,

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