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Sir Nigel

Sir Nigel

Titel: Sir Nigel Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Arthur Conan Doyle
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au thé et que le
pauvre pouvait se préparer sans bourse délier : les tisanes de
mauve, de tanaisie et autres dont nous ne connaissons plus le
secret maintenant.
    Mais dans les classes plus aisées régnait la
profusion ; il y avait toujours dans le charnier d’immenses
quartiers de viande, de gros pâtés, des bêtes entières, produits
d’élevage ou de chasse, avec de l’ale et des vins de France ou du
Rhin pour les arroser. Les plus riches avaient atteint un haut
degré de luxe dans leur alimentation, et un art culinaire était né,
dans lequel l’ornementation des mets était presque aussi importante
que la préparation : ils étaient dorés, argentés, peints ou
flambés. Depuis le sanglier et le faisan, jusqu’au marsouin et au
hérisson, tous les plats avaient leur présentation propre et leurs
sauces étonnantes de complication, parfumées aux dattes, aux
raisins, aux clous de girofle, vinaigre, sucre et miel, ou à la
cannelle, au gingembre, au bois de santal, au safran, au fromage de
hure ou aux pommes de pin. D’après la tradition normande, il
convenait de manger avec modération mais d’avoir une profusion de
mets les plus fins et les plus délicats, parmi lesquels les invités
pouvaient choisir. C’est ainsi que naquit cette cuisine compliquée,
si différente de la rude et parfois gloutonne simplicité de la
coutume teutonne.
    Sir John Buttesthorn appartenant à la société
fortunée, la gigantesque table de chêne ployait sous les pâtés
généreux, les imposants quartiers de viande et les flacons ventrus.
Au bas de la salle se trouvait la domesticité ; plus haut,
sous un dais levé, la table de la famille, avec des sièges,
toujours prêts à recevoir les hôtes fréquents qui arrivaient de la
grand-route. C’est ainsi que venait de se présenter au château un
vieux prêtre, faisant route de l’abbaye de Chertsey jusqu’au
prieuré de Saint-Jean à Midhurst. Il parcourait souvent ce chemin
et ne passait jamais sans interrompre son voyage pour s’asseoir un
moment devant la table hospitalière de Cosford.
    – La bienvenue, bon Père Athanase !
s’écria le chevalier. Venez donc prendre place à ma droite et me
donner les nouvelles de la région, car il n’est jamais un scandale
que les prêtres ne soient les premiers à connaître.
    Le religieux, homme calme et brave, jeta un
coup d’œil vers le siège libre de l’autre côté de son hôte.
    – Et Damoiselle Édith ?
demanda-t-il.
    – Mais oui, au fait, où donc est ma
fille ? cria le père, impatient. Mary, je te prie de souffler
de la trompe une fois encore, afin qu’elle sache que le repas est
servi. Que peut-elle faire encore dehors à pareille heure de la
nuit ?
    Les yeux doux du religieux parurent troublés
lorsqu’il tira légèrement le chevalier par la manche.
    – J’ai vu Damoiselle Édith, il y a moins
d’une heure, dit-il. Et je crains bien qu’elle n’entende point
sonner du cor, car elle doit se trouver à Milford, pour
l’heure.
    – À Milford ? Mais qu’irait-elle
faire là ?
    – Je vous prie, bon sir John, de baisser
quelque peu la voix. Il s’agit là d’une question privée puisqu’elle
touche à l’honneur d’une dame.
    – Son honneur ?
    Le visage rubicond de Sir John était devenu
écarlate tandis qu’il dévisageait les traits troublés du
prêtre.
    – Son honneur, dites-vous ?…
L’honneur de ma fille ? Faites en sorte de me prouver que vous
dites vrai ou ne remettez jamais plus le pied à Cosford !
    – Je crois n’avoir point mal fait, sir
John, mais il me faut bien dire ce que j’ai vu, sous peine d’être
un faux ami et un prêtre indigne.
    – Vite, bonhomme, vite ! Au nom du
diable ! qu’avez-vous vu ?
    – Connaissez-vous un petit homme difforme
et, dénommé Paul de la Fosse ?
    – Oui, je le connais. C’est un homme de
noble famille, puisqu’il est le fils cadet de Sir Eustace de la
Fosse de Shalford. Il fut un temps où j’ai cru pouvoir l’appeler
mon fils, car il ne se passait point un jour qu’il ne vînt rendre
visite à mes filles, mais je crains bien que son dos bosselé ne
l’ait mal servi dans son désir.
    – Hélas, sir John, je crains, moi, que
son esprit ne soit plus difforme encore que son corps. C’est un
homme dangereux pour les femmes, car le démon l’a doué d’une langue
et d’yeux tels qu’il les charme tout comme le basilic. Elles
songent peut-être au mariage mais lui, jamais, si bien que j’en
peux

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