Spartacus
d’un entraînement intense. Un entraînement qui, pour ne pas être économe de la sueur des légionnaires, parvient le plus souvent à épargner leur sang.
La dernière carte de Spartacus
Face à une armée romaine bien commandée, Spartacus n’a qu’une seule chance : frapper à la tête. Plutarque rapporte que le général des esclaves « voulut se frayer un chemin jusqu’à Crassus lui-même, en bravant armes et blessures, mais il ne l’atteignit pas et tua seulement deux centurions qui l’attaquaient ». Il est probable que Spartacus ait fait porter le gros de son effort en direction de Crassus. Pour soutenir le moral de ses troupes et pouvoir intervenir sur un point menacé, Crassus, comme tous les généraux de Rome, doit tout voir du champ de bataille tout en étant vu de tous, y compris de l’adversaire. Spartacus est quant à lui au milieu de ses meilleurs soldats. Autour de lui se trouvent certainement les anciens gladiateurs qui le suivent depuis Capoue et d’autres qui l’ont rejoint depuis et ont lié leur sort au sien. L’histoire n’a pas retenu leurs noms mais, contrairement à Crixus et Oenomaus, ils lui sont restés fidèles durant toute l’aventure. Ensemble, ils constituent un véritable commando de choc. Confiants dans l’efficacité de leur redoutable technique de combat, ils ont certainement prévu de pénétrer au cœur du dispositif romain. Le fait que Spartacus ait renoncé à son cheval lui donne l’avantage de passer pour un combattant parmi les autres et de ne pas devenir la cible privilégiée des Romains. Si Spartacus rejoint Crassus, s’il parvient à le tuer de sa main, il sait que le sort de la bataille peut basculer. Malgré les flèches et les javelines, malgré ses blessures, l’ancien gladiateur pénètre sans doute profondément au cœur des cohortes. Le fait qu’il tue deux centurions dans la mêlée ne doit pas nous étonner. Son expérience militaire et l’enseignement reçu au ludus le rendent redoutable en combat singulier, même contre un centurion expérimenté. Mais les Romains sont trop nombreux. Leurs rangs se resserrent face à la poussée désespérée de Spartacus et de ses compagnons ; les blessés romains peuvent être remplacés par des troupes fraîches tandis que le chef rebelle n’a plus de réserves. Chaque esclave qui tombe laisse un vide qui n’est pas rempli. Crassus fait montre d’autant de bravoure que son adversaire ; lui aussi « a payé de sa personne » durant la bataille. Lui aussi anime le courage de ses légionnaires comme un véritable général romain. Chacun de ses hommes brûle de bien faire et de combattre avec bravoure en sachant que son chef le regarde et le récompensera. Les efforts de Spartacus sont vains et l’étau se referme peu à peu sur lui et ses derniers compagnons. Avec des termes différents, les principaux auteurs anciens témoignent tous du courage des révoltés. Appien, pourtant si méprisant pour les esclaves révoltés, le reconnaît lui-même. « Spartacus fut enfin blessé à la cuisse d’un coup de flèche. Il tomba sur son genou et, se couvrant de son bouclier, il lutta contre ceux qui le chargèrent jusqu’à ce que lui et un grand nombre d’hommes autour de lui, encerclés, succombassent. » Florus, tout aussi hostile qu’Appien aux esclaves, témoigne également de leur courage : « Ils se jetèrent sur les Romains et moururent en braves. Comme il convenait aux soldats d’un gladiateur, ils ne demandèrent pas de quartier. Spartacus lui-même combattit vaillamment et mourut au premier rang, comme un vrai général. » Plutarque rend un hommage particulier à la bravoure des esclaves et de leur chef. Pour l’historien grec, Spartacus meurt en combattant. Sa fin est digne d’une tragédie : « A la fin, ceux qui l’entouraient ayant pris la fuite, il resta seul ; enveloppé par de nombreux ennemis, il continua à se défendre jusqu’à ce qu’il fût percé de coups. »
Les esclaves sont morts en hommes libres
Les esclaves sont presque tous morts dans cette bataille. Appien raconte que l’armée de Spartacus « fut mise en pièces en masse. Le nombre des morts, du côté des gladiateurs, fut incalculable ». Selon cet auteur, dont le témoignage est repris par Orose, les Romains font seulement 6 000 prisonniers. On peut donc estimer les pertes de l’armée des esclaves ce jour-là à environ 60 000 morts, d’après Tite-Live et Orose. Plutarque donne un
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