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Spartacus

Spartacus

Titel: Spartacus Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Eric Teyssier
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rapidement intenable. Que le blé vienne à manquer et la famine se fait vite sentir dans les estomacs des fils repus de la louve. Dans une ville qui frôle déjà le million d’habitants, chaque émotion populaire peut avoir des conséquences incalculables. Or, en cet hiver 72, les caisses et les greniers de la République sont vides. Plusieurs facteurs participent à cette disette financière et frumentaire. Depuis qu’elle s’est lancée dans une production intensive de vin et d’huile, l’Italie produit moins de blé qu’autrefois. Pourquoi en effet semer du blé pour obtenir des rendements médiocres alors que les bonnes terres et le soleil de l’Italie du Sud peuvent faire mûrir le raisin et les olives ? Le vin et l’huile des grandes exploitations se vendent beaucoup mieux et rapportent infiniment plus que le blé des petits propriétaires de jadis. Ce phénomène est aggravé par la multiplication des troupeaux. Ces derniers sont également plus rentables que la culture du blé et demandent beaucoup moins de main-d’œuvre. Trois générations plus tôt, Caton l’Ancien soupirait déjà de nostalgie en évoquant le temps révolu où la République romaine s’appuyait solidement sur ses paysans rustiques et modestes. Au temps de Spartacus, le progrès c’est le grand domaine, l’exploitation servile de masse et l’exportation. Certes, il faut bien nourrir les Romains et les Italiens, qu’ils soient libres ou esclaves. Mais les provinces et les alliés d’outre-mer sont là pour ça. La province de Sicile constitue un grenier à blé capable de fournir à la capitale des milliers de tonnes de grain à bas prix. L’Afrique romaine produit également des surplus importants et en cas de besoin il reste encore l’Egypte et ses moissons fabuleuses. Les pharaons de la dynastie des Ptolémées descendent d’un général d’Alexandre le Grand et ils sont les meilleurs amis du Sénat et du peuple de Rome. Conscients de la supériorité militaire des Romains, ils savent que cette amitié conditionne leur survie politique : Rome peut donc compter sur le blé moissonné sur les terres limoneuses du Nil.
    Le système d’agriculture spécialisée et les grands échanges inégaux constituent une immense source de richesse pour les Romains. Du moins quand tout va bien. Or, tout va mal. Plusieurs guerres lointaines simultanées dévorent le Trésor public. De plus, les pirates, alliés aux deux principaux adversaires du moment, entravent dangereusement le commerce maritime. A cause d’eux le transfert du blé est moins bien assuré et les entrepôts des bords du Tibre se vident inexorablement. Enfin, ces maudits esclaves sèment le désordre en Italie du Sud, terrorisent les villes, pillent les campagnes opulentes et interdisent les liaisons terrestres avec la Sicile. Déjà la plèbe crie son mécontentement. Dans ces conditions, la guerre civile peut reprendre. Un vent de panique souffle sur les braises mal éteintes des passions qui divisent les humiliores et les honestiores . Les premiers, plébéiens attachés au souvenir de Marius, brûlent de prendre leur revanche politique. Les seconds, défenseurs de l’aristocratie et des mânes de Sylla, campent sur leurs positions. Le peuple, passif tant qu’il est satisfait, risque de s’en prendre au Sénat si le pain vient sérieusement à manquer. Au début de l’année 72, deux nouveaux consuls entrent en fonctions, Lucius Gellius Publicola et Cnaeus Cornelius Lentulus. C’est sur eux que repose la lourde responsabilité de résoudre cette crise majeure. Presque un an après le début de la révolte, le Sénat prend enfin la mesure du danger et consent à dresser contre elle une véritable armée. D’après Plutarque, « dès lors le Sénat ne fut plus seulement ému de l’indignité et de la honte d’une telle rébellion ; la crainte et le danger le déterminèrent, comme s’il s’agissait d’une guerre des plus graves et des plus difficiles, à envoyer les deux consuls à la fois ». Mais, avant d’en découdre, c’est la situation du peuple de Rome qui semble la plus préoccupante pour les nouveaux consuls. Ils ne souhaitent pas partir en campagne sans avoir au préalable trouvé une solution à la crise frumentaire que connaît la capitale.
    Sans doute pour prévenir une éventuelle sédition à Rome du fait de la cherté du blé, les consuls « plein d’anxiété et d’incertitude » tentent de pourvoir au soulagement de la

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