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Stefan Zweig

Stefan Zweig

Titel: Stefan Zweig Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Dominique Bona
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meilleur. Zweig ne cessera jamais de se référer à Rilke comme au poète dont les racines plongent au cœur de l’histoire humaine, dans le melting-pot de l’Europe, et dont l’œuvre est le plus pur exemple d’une alchimie réussie.
     
    A côté de Rilke, quoique dans un exil plus douloureux et moins rayonnant, Zweig est fasciné par James Joyce, l’Irlandais de nulle part. En 1911, Gens de Dublin , son premier livre, un recueil de nouvelles, est brûlé dans sa ville natale, comme aux temps de l’Inquisition. L’auteur, à figure de maudit, erre désormais en Europe, de Paris à Trieste et de Trieste à Zurich, cherchant un havre où écrire ses romans en liberté. Le lieu n’est, semble-t-il, pas facile à trouver. L’un des hommes les plus cosmopolites de ce début de siècle, Joyce, exilé malgré lui, parle toutes sortes de langues, le français, l’italien, l’allemand, l’anglais bien sûr, et même le norvégien. Par esprit d’ouverture, il a refusé de prendre le parti de la petite république d’Irlande et de se cantonner au gaélique. Il déteste autant – comme Erasme – l’enfermement que l’embrigadement. Il dira un jour à Zweig, plein d’admiration pour cet écrivain méconnu, qu’il juge rétréci le fait de penser et d’écrire en anglais, et qu’il est dans son œuvre en quête d’« une langue qui serait au-dessus de toutes les langues, une langue que toutes serviraient ». Il achève d’écrire Dedalus en Autriche, en 1913, et illustre tristement dans une vie semée d’obstacles la difficulté immense qu’un individu peut rencontrer, quand il essaie de penser hors des normes et des castes. L’érasmien, ce type d’homme idéal, qui réclame le droit à la paix et la liberté de penser, est à l’image de cet artiste incompris, voué à la solitude et aux quolibets.
     
    7 Briefe 1897-1914 , op. cit.
     
    8 Publié dans la collection Cahiers rouges, Grasset.
     

    Dostoïevski
     
    En 1913, Zweig entame un Dostoïevski . Le portrait de l’écrivain russe le plus tourmenté, le plus douloureux est aussi une réflexion sur l’art et la mission d’écrire. Dostoïevski, pourquoi pas Tolstoï ? Toute la démarche intellectuelle de Zweig se lit dans ce premier choix. Hanté par la phrase célèbre de Goethe, « Homme, quand comprendras-tu que ne pas aboutir fait ta grandeur ? », qu’il place en exergue du livre et qui sera le nerf conducteur de toutes ses biographies futures, il vient de comprendre que ce qui l’intéresse dans une vie d’homme, ce qui l’émeut et lui importe, c’est l’inachèvement. La souffrance d’un individu, ses doutes et ses peurs, ses tentations et ses faiblesses plaident en sa faveur. Il n’y aura jamais dans son œuvre de héros en majesté. Tous ses personnages, de Marie Stuart à Erasme en passant par Marie-Antoinette, Fouché, Balzac, ou Nietzsche sont des vaincus, des offensés, dont l’échec même fait la grandeur. Telle se définit la vision du monde de Zweig. Seul est homme, dans le plein sens du mot, qui a éprouvé des blessures et ressenti l’humiliation. Le « gagneur », ce monolithe, n’a pas sa place dans un monde où l’échec est plus révélateur que la victoire, plus propice à l’épanouissement d’un cœur. Même Magellan, dont il écrira plus tard la biographie, fut en son temps renié par le Portugal, spolié par l’Espagne, frustré de sa course autour du monde, un perdant. Si la postérité a su reconnaître son génie, vivant il ne connut que luttes et obstacles, privations, oubli. Il est mort, sans savoir que des hommes lui voueraient une reconnaissance éternelle et que le détroit qu’il découvrit porterait son nom. Mais – cela seul compte aux yeux de Zweig, fils de Goethe, poète du destin tragique des grands hommes – Magellan est mort fidèle à lui-même, à ses idées et à ses rêves.
     
    La biographie de Dostoïevski n’est pas un récit factuel, chronologique, mais une analyse perspicace et profonde : une descente aux abîmes, dans l’enfer d’un créateur. « Dostoïevski n’est rien si on ne le revit pas en soi-même », écrit Zweig. Chaque vie offre un exemple, une invitation à comprendre pour mieux aimer. Cet essai n’est pas d’ordre objectif, universitaire et froid. C’est une démarche de sympathie, puissamment émotive et subjective qui pousse le lecteur ébloui sur la piste de L’Idiot et des Frères Karamazov , de Crime et Châtiment , des Souvenirs

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