Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Trois Ans Dans Une Chambre à Gaz D'Auschwitz

Trois Ans Dans Une Chambre à Gaz D'Auschwitz

Titel: Trois Ans Dans Une Chambre à Gaz D'Auschwitz Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Filip Muller
Vom Netzwerk:
au travail !
    Dans la salle du déshabillage, 500 corps environ étaient étendus comme des bûches. Au premier abord, ils se différenciaient assez peu les uns des autres. Il fallut par conséquent les classer en quatre lots suivant leur combustibilité, les cadavres des détenus les mieux nourris devant faciliter la combustion des morts cachectiques.
    Sur les indications des kapos, les hommes de corvée de cadavres trièrent alors les corps en quatre tas. Le plus important se composait des hommes robustes, le second, des corps de femmes, puis venait en troisième lieu celui des enfants. Le dernier, de petit volume, ne comprenait que des « musulmans », c’est-à-dire des morts amaigris jusqu’aux os. Ainsi faisant, Voss améliorait le « régime express », qui remontait aux essais de l’hiver 1943, dans le crématoire V, quand on recherchait le moyen d’économiser le coke. Parfois, des commissions de S.S. et de civils y participaient. J’avais compris à l’époque, aux propos échangés entre Voss et Gorges, que les visiteurs civils étaient des techniciens de la société Topf und Söhne, d’Erfurt, qui avaient construit et installé les fours d’incinération. Au cours de ces essais, les corps étaient sélectionnés et réduits en cendres par catégorie corporelle bien déterminée et suivant une durée d’incinération correspondante. On procédait aussi à des essais avec différentes sortes de coke, de calibrage variable. Les résultats obtenus étaient soigneusement enregistrés et à la fin de ces recherches, on ordonna de classer les corps en quatre catégories, en fonction de leurs caractéristiques physiques, correspondant à une quantité de coke déterminée.
    Mais comme le nombre des gazés augmentait sans cesse, les quatre installations crématoires de Birkenau ne suffisaient plus, même en assurant une marche continue avec deux équipes en roulement. Il fallait, en effet, toujours refroidir les fours, réparer les dommages, assurer l’entretien courant et nettoyer les canalisations qui conduisaient aux cheminées. Les interruptions de marche indispensables à ces opérations avaient pour conséquence l’application exceptionnelle de la « norme » des trois morts par four. La décision de travailler en « régime express » ou en « régime normal » incombait aux chefs de commando. Lorsque survenait une inspection du crématoire par un fonctionnaire de l’extérieur ou même par le commandant du camp, on passait bien entendu immédiatement au « régime normal ».
    Mais pour nous, ce soir, les ordres étaient différents !… Lorsque, à l’aube, Voss se réveilla, il sauta de son lit de camp, enfila ses bottes, sa veste de campagne et se rendit dans la salle des cadavres. Il n’y en avait plus qu’un petit nombre. L’incinération « express » avait été accomplie conformément à ses instructions. Le sentiment d’avoir mené à bien une tâche difficile le remplissait de satisfaction, et il ne s’en cachait pas. Mais déjà nous entendions une musique de marche militaire, provenant du secteur B. II du camp. L’équipe de jour allait bientôt nous relever. Il en était grand temps !
    Évidemment j’étais conscient de la nécessité immédiate de porter secours aux malheureux du camp des familles, visés par la lettre laissée à Voss, et cette pensée ne cessait de m’obséder. Mes amis Errera, Jankowski et Handelsmann faisaient partie de l’équipe de nuit, et j’espérais qu’avant de rentrer au camp l’un d’eux aurait trouvé un moyen de sauver ces hommes. Tandis que Voss dormait, j’avais mis mes camarades au courant de ce que je venais d’apprendre. Comme à moi il leur paraissait évident et urgent d’avertir les gens du camp des familles de la menace de mort qui planait sur eux, et de les pousser à la résistance. Mais personne ne savait encore comment l’organiser. La hâte avec laquelle se préparait cette nouvelle extermination nous avait tous bouleversés. Il n’y avait pourtant aucun doute : tous allaient être gazés la nuit suivante. Il n’y avait pas une minute à perdre. Mais, comment les prévenir, comment les convaincre que la résistance ouverte était leur seule chance de survie ?
    La relève arriva enfin et nous saisîmes cette occasion pour informer des événements nos camarades de l’équipe de jour. Nous proposâmes en même temps d’avertir nos camarades des crématoires II et III. Il était en effet

Weitere Kostenlose Bücher