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Voyage en Germanie

Voyage en Germanie

Titel: Voyage en Germanie Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Lindsey Davis
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m’avait finement jaugé, mais Xanthus eut l’air interloqué. Il ignorait que j’avais passé mon enfance à fouiner dans les échoppes de brocante de la Sæpta Julia. Je me dis en outre qu’il serait avisé d’acheter un cadeau d’anniversaire à Helena, pour le cas où le hasard nous mettrait tout à coup en présence. Elle me manquait. Cela faisait de moi une proie rêvée pour le premier marchand dont les colifichets témoignent du plus léger semblant de goût.
    Sentant que ma bourse était désormais fermement close, Dubnus entreprit d’exercer à nouveau son charme geignard sur Xanthus. L’homme était un artiste. En tant que fils d’un directeur d’enchères, je me régalais presque à observer son manège. Nous ne descendions pas tout le fleuve jusqu’au delta, heureusement, sans quoi le barbier aurait acheté l’intégralité du stock du colporteur. Il ne put résister à la corne d’aurochs, sectionnée des propres mains de Dubnus – au dire de ce dernier – sur l’un de ces bovins sauvages de la Gaule dont le caractère irascible est légendaire…
    — J’aimerais bien en voir un, Falco !
    — Estime-toi heureux de ne pas en avoir l’occasion !
    — Il t’est déjà arrivé d’en apercevoir au cours de tes pérégrinations ?
    — Non. Je ne suis pas fou, Xanthus : je n’ai jamais cherché à le faire.
    Il venait de faire l’acquisition d’une coupe passablement utile, qui ne goutta pas trop sur le devant de sa tunique lorsqu’il l’essaya. Il réussit même à lui redonner un semblant de lustre à force de l’astiquer. Je m’abstins de lui révéler que les aurochs n’ont jamais eu les cornes torses.
    Pendant que le chaland de vin voguait vers sa destination, Dubnus remballa tranquillement ses trésors. Xanthus entreprit de manipuler un casque. Soucieux dans une certaine mesure de lui épargner la faillite – ce qui signifierait que je devrais tout payer de ma propre poche –, je lui ôtai l’objet des mains.
    Au premier abord, on aurait dit un casque de l’armée, mais il présentait certaines différences. Le casque moderne comporte un couvre-nuque plus large qui protège le cou et les épaules, ainsi que des garde-joues et des renforts d’oreillons. Je pense que l’article réformé que j’avais en main avait été conçu pour parer aux dégâts produits par les grands coups d’épée celte à deux tranchants. Le modèle d’origine était obsolète longtemps avant mon époque, mais c’était pourtant bien un de ceux-là que je contemplais pour l’heure.
    — Ça doit être une sacrée antiquité, Dubnus.
    — Moi j’appelle ça une relique de la déroute de Varus ! confia-t-il aimablement, comme s’il avouait avoir produit un faux.
    Son regard croisa alors le mien, et d’autres idées lui vinrent. Je réussis à m’arrêter de frémir.
    — Où as-tu trouvé ça ?
    — Oh… quelque part, dans les bois.
    Il laissa mourir sa voix, évasivement.
    — Où ça ? insistai-je.
    — Oh… par là-haut dans le nord.
    — Dans un coin comme la forêt de Teutobourg ?
    Il rechigna à préciser. Mettant un genou à terre, j’examinai son stock avec plus d’attention. Il m’avait catalogué parmi les empêcheurs de tourner en rond, aussi n’apprécia-t-il guère mon intérêt. Je fis mine d’ignorer son agacement. Cela le perturba encore plus.
    Je remarquai alors un bout de vieux bronze qui aurait pu être le pommeau d’un glaive romain, des épaulettes ressemblant à celles que j’avais jadis vues chez mon grand-père, le porte-plumail d’un casque… un autre licou réformé, à présent transformé en anneau de suspension.
    — Tu en vends beaucoup de ces « reliques de Varus » ?
    — Les gens croient ce qu’ils ont envie de croire.
    Il y avait aussi un objet noirci que je me refusai à manipuler, car je devinai qu’il s’agissait d’un crâne humain.
    Je me redressai.
    Germanicus, le petit-fils adoptif d’Auguste, avait, dit-on, découvert le lieu où le massacre fut perpétré, rassemblé les restes épars des morts et donné à l’armée perdue de Varus un semblant de funérailles correctes… mais qui peut croire que là-bas, dans cette forêt hostile, Germanicus et ses soldats, sur le qui-vive, laissèrent durer le moment où ils s’offraient comme nouvelle cible ? Ils firent de leur mieux. Ils rapportèrent à Rome les étendards perdus. Nous pûmes alors tous dormir sur nos deux oreilles, la conscience nette. Mieux valait ne pas penser au fait

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