A bicyclette... Et si vous épousiez un ministre ?
balcon du château de Prague, le jour de son élection, gauche et emprunté dans son pantalon trop court. Elle racontera à quel point la chute du communisme aura été un traumatisme psychologique pour certaines personnes, comment elles auront dû réapprendre à vivre normalement, sans double langage permanent, et à faire confiance à leurs voisins de palier. Elle écrira pourquoi c'est difficile pour les personnes âgées qui ont connu l'avant-guerre et la liberté, puis quarante années de joug communiste, et qui se sentent trop vieilles aujourd'hui pour pouvoir profiter de la liberté retrouvée. Elle expliquera comment elle a vu peu à peu, depuis quatre ans, les magasins s'ouvrir, les femmes s'habiller en couleur, les échoppes fleurir sur le pont Charles. Mais elle dira aussi que, depuis
quelques mois, la crise pointe son nez, le chômage fait son apparition, les retraites n'augmentent pas. Elle contera la liberté retrouvée, mais vite rattrapée par les excès du libéralisme...
A mille lieues de l'Est et de ses rigueurs, j'allais, quelque temps plus tard, rencontrer d'autres femmes pleines de vie, venues de l'autre côté de l'Atlantique, de cet autre monde que l'on dit pendant des décennies être celui des libertés.
Tout d'abord une Américaine à Paris : Pamela Harriman, ex-Pamela Leyland, ex-Pamela Churchill, ex-Pamela Digby, véritable personnage de roman. Fille d'un lord anglais, lord Digby, mariée la première fois au fils de Winston Churchill, divorcée puis venue à Paris après la Seconde Guerre mondiale pour y vivre une dizaine d'années, Pamela Churchill s'était exilée aux Etats-Unis, puis remariée avec un producteur américain. Veuve ensuite, elle avait refait sa vie pour la troisième fois, en épousant un milliardaire démocrate américain, Averell Harriman, avec lequel une idylle sans espoir était née plus de vingt ans auparavant. C'est lui qui la propulsera dans la
politique, du côté démocrate. Elle deviendra vite proche de Bill Clinton, travaillera d'arrache-pied pour sa victoire à la présidentielle et obtiendra en juin 1993 sa récompense : le retour à Paris, comme nouvel ambassadeur des Etats-Unis. Blondeur toujours ingénue, yeux bleus toujours angéliques et poigne toujours de fer, « Pam » a fait la pluie et le beau temps à Washington et ravagé des cœurs d'hommes à la pelle...
Je l'avais rencontrée pour la première fois à Washington, en mai dernier, chez l'Autre Reine de Washington, Kate Graham, la patronne du Washington Post. Les deux femmes partageaient le même amour pour Georgetown, ce quartier à l'atmosphère vieille Europe de la capitale fédérale.
La délicatesse de ses traits et son raffinement très british m'avaient frappée. Elle s'apprêtait à partir pour Paris et empaquetait sa collection privée de tableaux (Picasso, Cézanne, Matisse) qui allait arriver avant elle en France. Elle-même ne franchirait l'Atlantique qu'au mois de juin, pour ne présenter ses lettres de créance au président de la République à l'Elysée que trois semaines plus tard.
Auparavant, à Washington, elle avait d'abord dû passer l'épreuve de sa prestation
de serment devant le Sénat américain. Les plus réticents à sa nomination (quelques sénateurs républicains et même certains démocrates qui protestaient avec force contre la nomination comme ambassadeur d'une amie personnelle et, pire, bailleuse de fonds du Président) avaient tous succombé à son charme au terme de son audition. L'un d'eux s'était même ridiculisé en lui reprochant d'être membre d'une association veillant sur les intérêts de l'Européen Jean Monet, alors qu'il s'agissait en fait du peintre Claude Monet ! La presse avait relaté l'anecdote en long et en large.
Je la retrouvai quelques semaines plus tard à Paris, au cours d'un dîner organisé chez des amis communs... Elle était à nouveau la Reine du Tout-Paris. Le 22 septembre suivant, c'était à son tour de donner un grand dîner à l'ambassade américaine, en pleine guerre du Gatt. La réception très chaleureuse sur fond de crise franco-américaine ne manquait pas de piquant... Le sourire et le charmant accent « du » nouvel ambassadeur portant un « toast » à l'amitié entre nos deux pays promettaient d'huiler les rouages...
Au premier abord, Esther Coopersmith ne ressemble pas à Pamela Harriman. Loin de la silhouette gracile et raffinée de l'ambassadeur à Paris, Esther affiche une robuste stature d'Américaine bien
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