Alexandre le Grand "le fils du songe 1"
de se coucher. Olympias menait depuis longtemps une vie reti rée, même si elle conservait encore un pouvoir considérable à la cour, en qualité de mère de l'héritier du trône.
Désormais, ses rencontres avec Philippe se limitaient presque exclusive ment aux occasions prévues par le protocole.
Le roi avait entre-temps épousé d'autres femmes pour des rai sons politiques, mais cela ne l'empêchait pas de respecter 58 ALEXANDRE LE (,RAND ~ SDNGk S9
Olympias; et si la reine avait été dotée d'un caractère moins revêche et moins ‚pre, il lui aurait peut-être prouvé que son ancienne passion n'était pas complètement morte.
La souveraine était assise dans un fauteuil, près d'un can délabre de bronze à cinq branches, un papyrus déployé sur ses genoux. Hors du rayon de cette lumière, sa chambre était plongée dans l'obscurité.
Alexandre entra d'un pas léger. " que lis-tu, maman ? "
Olympias leva la tête: " Sapho, répondit-elle. Ses vers sont merveilleux et son sentiment de solitude est si proche du mien... "
Le regard tourné vers le ciel étoilé, elle s'approcha de la fenêtre et répéta d'une voix vibrante et mélancolique les vers qu'elle avait lus: La nuit est à mi-course.
La lune et les Pléiades se sont couchées,
Et je gis dans mon lit... seule.
Alexandre la rejoignit et vit dans la lumière incertaine de la lune une larme trembler un mornent sur ses cils, avant de couler sur sa joue p‚le.
Le maître de cérémonie donna l'ordre d'emboucher les trompettes et les dignitaires perses firent leur entrée solen nelle dans la salle du trône.
La délégation était menée par le satrape de Phrygie, Arsamès, accompagné
par le gouverneur militaire de la province et par d'autres notables, qui le sui vaient à quelques pas.
Ils étaient flanqués d'une escorte de douze Immortels, les soldats de la garde impériale, tous choisis pour leur grande taille, la majesté de leur port et la dignité de leur lignage.
Le satrape portait une tiare molle--le couvre-chef le plus prestigieux après la tiare rigide, que seul l'empereur pouvait arborer--, une veste de bysse vert, sur laquelle se détachaient des dragons de fil d'argent, une culotte ouvragée et des babouches en cuir d'antilope. Les dignitaires aussi étaient habillés de vêtements incroyablement riches et raffinés.
Mais l'attention de l'assistance se concentrait sur les Immortels du Grand Roi. Ils mesuraient près de six pieds, avaient le teint oliv‚tre, une barbe noire et crépue, des che veux somptueusement coiffés et frisés au fer. Ils étaient vêtus d'une veste de samit d'or tombant jusqu'à leurs pieds, d'une tunique de bysse bleu et de culottes de la même couleur, bro dées d'abeilles en or, et arboraient à l'épaule leurs arcs meur triers à
double courbure et leurs carquois de cèdre à incrusta tions d'ivoire et de feuilles d'argent.
Ils avançaient d'un pas cadencé en posant sur le sol les hampes de leurs lances, qui se terminaient par des pommeaux d'or en forme de grenades, et exhibaient à leur côté la plus belle arme de parade qu'on e˚t jamais vue: l'éblouissante akinaké, une dague en or massif rangée dans un fourreau travaillé en bosselage, o˘ rampait une série de griffons aux yeux de rubis.
Le fourreau, également en or pur, était accroché à un cli quet fixé au ceinturon: l'arme oscillait donc librement en ryth mant le pas des majestueux guerriers, que scandait aussi l'on doiement de ce précieux métal.
Philippe, qui s'attendait à une telle démonstration de luxe, avait préparé un accueil adéquat en disposant sur les côtés de la salle deux rangées de trente-six pézétairoÔ, les puissants sol dats de son infanterie lourde de ligne. Enfermés dans leurs cuirasses de bronze, ils tenaient des écus frappés de l'étoile en argent des Argéades et brandissaient des sarisses, immenses lances de cornouiller mesurant douze pieds. Leurs pointes de bronze, si bien astiquées qu'on pouvait se mirer dedans, tou chaient le plafond.
Revêtu de sa première armure, qu'il avait lui-même dessi née, et entouré
de sa garde personnelle, Alexandre était assis sur un trépied à côté de son père. La jeune Cléop‚tre, d'une beauté enchanteresse, lui faisait pendant aux pieds d~olympias. Elle portait un péplum attique qui découvrait ses bras et ses épaules et retombait en plis élégants sur sa poi? trine~ ainsi que des sandales composées de rubans en argent.
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