Alexandre le Grand "le fils du songe 1"
cadavres déchiquetés, qu'ils transportaient au bord du défilé o˘ d'autres coupaient des arbres et érigeaient des b˚chers funéraires.
quand il eut reçu les balistes, CoÔnos ordonna aux Agrianes de décapiter tous les cadavres de Scythes massagètes, puis il gagna les confins de leurs terres, délimités par le fleuve Artacoénès et surveillés par deux détachements de la cavalerie ennemie, à une faible distance de là. Il arma les balistes et pro jeta les têtes coupées de l'autre côté, o˘ elles atterrirent et rou lèrent au sol jusqu'aux pieds des chevaux. Alors, il rebroussa chemin pour s'unir au reste de l'armée. Ils marchèrent vers Bactres et reçurent la soumission de tous les villages qui avaient adhéré à
la révolte de Spitaménès.
La première armée, qui avait participé à la campagne d'Alexandre, s'était établie à Maracanda. Les officiers perses recrutaient autant de jeunes gens qu'ils le pouvaient en Bactriane et en Sogdiane: à présent, l'armée royale n'avait plus grand-chose à voir avec celle qui avait quitté Pella sept ans plus tôt. Mais de cette façon, il restait peu de ressources humaines à la disposition de l'ennemi pour alimenter sa résis tance.
Il demeurait toutefois que cette expédition avait obtenu un succès relatif, ce qui pesait sur le prestige du roi, d'autant plus que nombre de ses compagnons avaient tenté de le dissuader d'adopter cette tactique.
Alexandre voulut donc leur faire oublier cette situation en donnant des fêtes et des banquets auxquels il invita également les of ficiers perses, suscitant ainsi un nouveau motif de tension parmi les Macédoniens et ses propres amis. Certains d'entre eux nourrissaient également de l'antipathie à l'égard d'Héphestion, qui paraissait apprécier les coutumes perses autant que le roi, et qui arborait tout comme lui des vêtements orientaux.
De nombreuses ambassades vinrent négocier des traités avec le roi, dont celle d'une tribu scythe qui vivait de l'autre côté de l'Oxus. Le roi exigea qu'elles observent le protocole des audiences perses, marqué par la proskynèse, et il reçut cer tains invités vêtus de la kandys et coiffé de la tiare, ce qui accentua encore la mauvaise humeur de ses compagnons.
Attirés par la renommée du roi et plus encore par les rumeurs qui circulaient au sujet des immenses richesses dont l'armée s'était emparée, des philosophes, des devins, des rhé teurs, des poètes et des acteurs avaient quitté la Grèce et
l'Anatolie pour se présenter à la cour. Alexandre les recevait et les invitait à ses banquets: de cette façon, il lui semblait qu'un morceau de Grèce était transplanté dans ces régions loin taines. De plus, il était heureux d'entendre des conversations philosophiques ou des disputes rhétoriques. Mais tous ces gens ne poursuivaient qu'une fin: se gagner les faveurs du sou verain. Aussi l'adulaient-ils de toutes les façons possibles, masquant souvent leurs intentions avec un art subtil. Tout cela irritait les Macédoniens, habitués à entretenir des rela tions de camaraderie, parfois bourrues, avec leur roi, si l'on exceptait le traditionnel baiser sur la joue, exclusivement réservé aux intimes.
Un jour, un homme apporta à Alexandre un chargement de figues, d'amandes et de noix venues de Grèce. Alexandre les
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trouva si bonnes qu'il voulut en céder une partie, en signe d'af fection, à
Cleitos le Noir, à qui il s était opposé, parfois vio lemment, au sujet du cérémonial et de sa volonté d'introduire des Perses et des Asiatiques non seulement à la cour mais aussi dans l'armée.
Le Noir, qui avait un caractère irascible et suffisant, était également très religieux. Il était en train d offrir quelques moutons en sacrifice aux dieux quand l'envoyé du roi lui remit sa convocation. Il s'interrompit et se rendit aussitôt au palais, suivi à son insu par deux moutons.
Lorsqu'il pénétra dans la cour avec cet étrange cortège, Alexandre éclata de rire. " Le Noir ! s'exclama-t-il. Tu as donc embrassé le metier de berger ? " Mais il fut troublé en appre nant que ces deux animaux étaient destinés à un sacrifice. Il donna les fruits secs à Cleitos et se h‚ta de convoquer Aristandre après son départ. Le devin s'assombrit et répondit: ~< C'est un mauvais signe. Cela porte malheur. "
Cette nuit-là, influencé peut-être par les paroles du devin, Alexandre rêva de Cleitos: vêtu
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