Bonaparte
ayant vu l’ennemi se glisser entre ses hommes et Bonaparte, a pris sur lui d’attaquer l’arrière-garde autrichienne et, étant parvenu à la vaincre, débouche ainsi sur le champ de bataille, musique en tete et drapeaux déployés. Cette arrivée, racontera un témoin, « fit un effet dont nous avions besoin et, retournant le moral des soldats, changea notre situation au point de faire succéder chez le plus grand nombre, l’enthousiasme au découragement. »
Bonaparte, « incapable de ne pas tirer le plus grand parti de cette arrivée », se porte aussitôt au galop sur le front de la demi-brigade.
— Bravo 18 e ! crie-t-il, vous avez cédé à un noble élan, vous avez ajouté à votre gloire ; pour la compléter, en récompense de votre conduite, vous aurez l’honneur d’attaquer les premiers les troupes qui ont eu l’audace de nous tourner.
Des vivats lui répondent et la 18 e demi-brigade, en colonne d’attaque par bataillons, accompagnés de quelques troupes disponibles et tout en tirant « de bas en haut », fonce vers les crêtes occupées par l’ennemi, en arrière des positions de Bonaparte. Les assaillants entendent avec joie le sourd grondement des boulets français passer par-dessus les têtes et préparer le terrain au sommet. Haletants, ils débouchent sur les positions autrichiennes et jouent avec tant d’ardeur de la baïonnette que, nous rapporte le futur général Thiébault, « la terre est jonchée de cadavres, des centaines d’ennemis sont précipités dans les abîmes ». Murat galope à la tête de ses escadrons, fonce sur l’ennemi et achève la victoire, cette victoire qui assure non seulement « le sort des troupes présentes, mais aussi de toute notre armée ». Les conquêtes françaises, fort compromises une heure auparavant, sont sauvées !
À la tête de son régiment, le jeune colonel Lasalle, âgé de vingt-trois ans, fait merveille. Aussi, le soir venu, lorsque Bonaparte le voit prêt à défaillir de fatigue, il lui dit en souriant, en montrant le « tas » des drapeaux ennemis :
— Couche-toi dessus, Lasalle, tu l’as bien mérité !
Le lendemain – dimanche 15 janvier – Bonaparte fait « achever » les dernières troupes ennemies – celles d’Alvinczy – puis se met au lit à Roverbella et écrit à sa femme : « J’ai battu l’ennemi. Kilmaine t’enverra la copie de la relation. Je suis mort de fatigue. Je te prie de partir tout de suite pour te rendre à Vérone. J’ai besoin de toi, car je crois que je vais être bien malade. Je te donne mille baisers. Je suis au lit. »
Bien que « mort de fatigue », dès le lendemain il monte à cheval, se tourne vers Mantoue, et y « jette » Masséna. À La Favorite, « l’enfant chéri de la victoire » – le surnom a été donné à Masséna par son chef – bat les troupes de Provera qui tentent de délivrer la ville, et le général autrichien se rend avec ce qui reste des débris de son corps.
Wurmser, dès le lendemain, capitule. Mantoue ouvre ses portes aux Français.
À Paris, la nouvelle de la bataille de Rivoli et l’annonce de la chute de Mantoue, venant après les dépêches de Lodi et d’Arcole, déclenchent un immense enthousiasme. Peu importe que les royalistes témoignent leur rancoeur en traitant le vainqueur d’Arcole de « bâtard de Mandrin » et ses victoires de « gloire de tréteaux » ! Les agents de Louis XVIII ont beau se faire l’écho de prédictions envoyant « le jeune héros » se faire fusiller place de la Révolution, la joie populaire est indescriptible et ne se trouve ternie que par la crainte de voir Bonaparte trop s’exposer aux balles ennemies. Les gazettes placent Napoléon « au-dessus de l’homme », et le Directoire, ne pouvant plus endiguer le flot, prend le parti de se laisser emporter par lui. Il ne saurait maintenant plus être question de mettre le vainqueur de l’Italie en tutelle ! Les directives lui sont adressées avec d’infinies précautions. « Ce n’est point au surplus un ordre que vous donne le Directoire exécutif, lui écrira-t-on, c’est un voeu qu’il forme. » On recommande même à Clarke de ne point prêter l’oreille aux propositions autrichiennes « sans l’avis de Bonaparte ».
En attendant de traiter avec Vienne, il faut abattre la puissance de Rome. Le Pape – on le comprend – ne s’est pas remis des conditions draconiennes qui lui ont été imposées l’été dernier. Il a relevé la tête. Tous les anciens
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