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Bonaparte

Bonaparte

Titel: Bonaparte Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: André Castelot
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Dès lors, j’ai prévu ce que je pouvais devenir ! Je voyais déjà le monde fuir sous moi, comme si j’étais emporté dans les airs... »
    Fonder une dynastie ? Certes pas ! Il ne pense encore qu’à devenir « le Brutus des rois et le César de la République ». Oui, tout paraît réuni pour faire de Bonaparte le plus heureux des hommes. Tout, sauf Joséphine. Le soir du 21, avant de retrouver son lit de camp, il lui écrit une nouvelle lettre passionnée : « Je vais me coucher, ma petite Joséphine, le coeur plein de ton adorable image, et navré de rester tant de temps loin de toi ; mais j’espère que, dans quelques jours, je serai plus heureux et que je pourrai, à mon aise, te donner des preuves de l’amour ardent que tu m’as inspiré. Tu ne m’écris plus, tu ne penses plus à ton bon ami, cruelle femme ! Ne sais-tu pas que sans toi, sans ton coeur, sans ton amour, il n’est pour ton mari ni bonheur ni vie. Bon Dieu ! que je serais heureux si je pouvais assister à l’aimable toilette, petite épaule, un petit sein blanc, élastique, bien ferme ; par-dessus cela, une petite mine avec le mouchoir à la créole, à croquer. Tu sais bien que je n’oublie pas les petites visites, tu sais bien, la petite forêt noire, je lui donne mille baisers et j’attends avec impatience le moment d’y être. Tout à toi, la vie, le bonheur, le plaisir ne sont que ce que tu les fais.
    « Vivre dans une Joséphine, c’est vivre dans l’Élysée. Baiser à la bouche, aux yeux, sur l’épaule, au sein, partout, partout... »
    Il peut enfin – le 25 novembre – quitter Vérone et mettre le cap sur Milan, après avoir écrit à sa chère créole deux autres lettres. Comme chaque jour, il lui crie son amour et son désir, il lui reproche son éternel silence, il la menace même : « Quel peut être ce merveilleux, ce nouvel amant qui absorbe tous vos instants, tyrannise vos journées, et vous empêche de vous occuper de votre mari ? Joséphine, prenez-y garde, une belle nuit, les portes enfoncées, et me voilà ! »
    Le coeur battant —le 29 – sa voiture approche de Milan. Il a bien du mal à ne pas se pencher à la portière pour crier :
    — Plus vite ! Plus vite !
    Enfin, après ces six longues semaines, il va pouvoir la tenir dans ses bras. Le vainqueur d’Arcole aura sa récompense !...
    Mais en arrivant il apprend qu’elle est partie pour Gênes – sans doute avec l’espoir d’y retrouver Charles. Est-ce en pensant à cette désillusion qu’il dira :
    — L’amour est une sottise faite à deux ? La gorge serrée, les larmes prêtes à jaillir, il écrit à l’infidèle : « J’arrive à Milan, je me précipite dans ton appartement, j’ai tout quitté pour te voir, te presser dans mes bras... tu n’y étais pas : tu cours les villes avec des fêtes ; tu t’éloignes de moi lorsque j’arrive ; tu te ne soucies plus de ton cher Napoléon. Un caprice te l’a fait aimer, l’inconstance te le rend indifférent... »
    Avec rage, il trace ces dernières lignes : « Ne te dérange pas, cours les plaisirs, le bonheur est fait pour toi. Le monde entier est trop heureux s’il peut te plaire, et ton mari seul est bien, bien malheureux. »
    Le lendemain, il lui dira encore : « Quand j’exige de toi un amour pareil au mien, j’ai tort ; pourquoi vouloir que la dentelle pèse autant que l’or... mais ce que je mérite de la part de Joséphine ce sont des égards, de l’estime, car je l’aime à la fureur et uniquement... Adieu femme adorable, adieu, ma Joséphine. Puisse le sort concentrer dans mon coeur tous les chagrins et toutes les peines ; mais qu’il donne à ma Joséphine des jours prospères et heureux. Qui le mérite plus qu’elle ? Quand il sera constaté qu’elle ne peut plus aimer, je renfermerai ma douleur profonde, et je me contenterai de pouvoir lui être utile et bon à quelque chose. »
    Craignant de lui avoir fait de la peine, il rouvre sa lettre « pour lui donner un baiser », et il ajoute : « Ah ! Joséphine, Joséphine ! »
    Il était ce jour-là, nous dit un témoin, « hâve, maigre, la peau collant aux os, les yeux brillants d’une constante fièvre ». Ce nouveau coup de griffe lui a déchiré le coeur. La blessure est encore légère, cependant, depuis ces quatre jours où il a vainement attendu son retour, il s’est rendu compte avec quelle indifférence elle lui a manqué d’égards – le mot est de lui – il lui écrira sans doute encore tendrement, mais ne

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