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Byzance

Byzance

Titel: Byzance Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michael Ennis
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naître certainement des soupçons, et en fait l’allure exceptionnellement vive de la procession pouvait tourner à l’avantage de l’Écureuil.
    Les premiers rangs de Varègues passèrent, puis le démon à leur tête, l’hétaïrarque aux yeux bleus étincelants. Derrière l’hétaïrarque, Sa Majesté. L’Écureuil agita son rameau d’un geste fou et cria :
    — Hommage, hommage, les rayons de soleil sont sur nous !
    Le myrte à bout de bras, il se précipita comme pour suivre le cortège au pas de charge et il bouscula le fonctionnaire ventru. Synchronisation parfaite.
    Ouhhhh ! Le fonctionnaire ventru gronda comme si le vent d’ouest dégorgeait de son ventre. L’Écureuil passa un bras au-dessus de l’épaule du bonhomme pour l’empêcher de tomber, et de l’autre main exécuta son travail quotidien.
    — Je suis déshonoré, Votre Honneur ! s’exclama l’Écureuil d’une voix plaintive après avoir terminé son affaire. C’est mon amour sans réserve pour notre saint Père… Pardonnez-moi, Votre Honneur, pardonnez-moi au nom du salut de votre âme et parce que votre charité chrétienne rivalise sans doute avec vos autres innombrables vertus.
    — File d’ici, petit… rien du tout sans cervelle, lança le fonctionnaire d’un ton mauvais, avant que je ne te fasse escorter par ces hommes à la Numéra, où tu passeras ta vie sans mettre en danger les personnes dignes d’entourer Sa Majesté impériale. Va-t’en, ordure !
    L’Écureuil s’inclina et amorça une lente retraite pour ne pas soulever de soupçons. La bourse du bonhomme était déjà en sécurité entre les plis volumineux de sa tunique mal ajustée. « Un beau coup ! » songea le plus adroit des coupe-bourse du Stoudion. Cette oie grasse avait une bourse aussi lourde que celle de Judas. Mais que se passait-il donc ? Le cortège impérial s’était arrêté et les Varègues mettaient pied à terre. Par Théotokos ! L’empereur n’était-il pas tombé de cheval ? Oui, il était par terre, et – l’Écureuil n’en croyait pas ses yeux – les sons qui sortaient de la gorge de Sa Majesté ! Quoi ? L’Écureuil vit alors l’un des Barbares se diriger directement vers lui. À gauche, à droite, ils couraient tous comme des taureaux en colère, pour rassembler tous les autres témoins. Mais ils n’étaient que des crachats de pute ; ils pourraient réunir tous ces dignitaires au ventre de porc et les jeter dans le Bosphore, mais pas l’Écureuil !
    Il fila à travers les jardins et le vent souffla dans ses oreilles. S’il parvenait à atteindre le bosquet autour de Sainte-Irène, la petite église au nord de Sainte-Sophie, il pourrait sauter par-dessus le mur et se perdre au milieu des entrepôts, derrière les chantiers navals. La peur lui donnait des ailes quand il s’élança entre les troncs ; il ne regarda par-dessus son épaule qu’en arrivant près du mur du cimetière, au nord de Sainte-Irène. Maudite soit son âme ! Le Barbare le suivait toujours et se rapprochait à chaque enjambée. L’Écureuil bondit, ses doigts s’agrippèrent. Ses bras le hissèrent et projetèrent son corps trapu par-dessus le mur.
    Derrière le mur, le sol était beaucoup plus bas que l’Écureuil ne s’y attendait. Non ! Quelque chose se brisa, la douleur le fit frissonner. Il se releva et s’éloigna en clopinant du pied du mur jonché de détritus vers l’énorme masse de briques de l’entrepôt voisin. Il n’était qu’à vingt pas, mais à chacun d’eux la douleur était plus déchirante. Si seulement il pouvait trouver une porte, un couloir. Il tourna la tête, le Barbare tomba du haut du mur comme un grand félin. « Ô Théotokos, prie pour moi, car je n’ai jamais connu ne serait-ce que le confort d’un orphelinat ; j’ai toujours fait ce que j’avais à faire, j’ai volé seulement ce qu’il me fallait pour manger et peut-être pour quelques luxes mineurs ; il m’est sans doute arrivé de forniquer, mais jamais, je le jure, je n’ai pris une seule vie. Ô Théotokos ! »
    L’Écureuil aperçut la petite porte, à peine visible au bout du bâtiment, du côté de l’est. Il se força à courir et plongea dans l’obscurité accueillante. L’odeur de moisi s’ajouta à la douleur cuisante de sa cheville et son cœur se souleva. Des sacs s’entassaient partout, des sacs de jute moisis, recouverts de poussière. Il se mit à ramper et s’enfouit dans un tas renversé. Quelque

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