Carnac ou l'énigme de l'Atlantide
fortifie
les villes, on y entasse des réserves. Toute la flotte est assemblée chez les
Vénètes qui font vraiment figure et fonction de chefs de cette confédération
maritime. Elle part de la Loire et va jusqu’au Pas-de-Calais en groupant non
seulement les peuples de la péninsule armoricaine, mais aussi les Diablintes de la Mayenne, les Lexovii du pays d’Auge, les Ménapes et les Morini du nord. On demande même aide et
assistance aux peuples de la Bretagne insulaire qui sont les frères et les
clients des peuples de la confédération.
César, prévenu aussitôt par Crassus, juge la situation fort
dangereuse. Il ne perd pas de temps : il ordonne qu’on construise des
navires de guerre sur la Loire. Pour éviter que les Belges, dont il n’est pas
sûr de la fidélité, ne lui tombent sur le dos, il envoie Labienus surveiller
cette partie de la Gaule. Pour empêcher les Aquitains de fournir des renforts
aux Armoricains, il dépêche Crassus de l’autre côté de la Loire, ce qui
permettra d’ailleurs aux Romains de consolider leurs positions dans cette
région encore très mal soumise. Il place Titurius Sabinus dans le centre de la
Normandie, établit des garnisons chez les Redones afin de surveiller les
arrières de la confédération. Ayant ainsi, avec une étonnante précision, isolé
la révolte, il entreprend de combattre lui-même ceux qui en sont la cheville
ouvrière, c’est-à-dire les Vénètes.
Les difficultés ne manquent pas. Si les Vénètes sont « supérieurs
aux autres par la science et l’expérience de la navigation » (César, III, 8),
les Romains, eux, ignorent et redoutent la navigation sur l’océan dont les marées
et les tempêtes les inquiètent et les déconcertent souvent. Les navires vénètes
sont plus plats que ceux des Romains, et plus aptes non seulement à naviguer
sur des bas-fonds mais également à soutenir l’assaut des vagues. Leurs voiles
sont en cuir et leur masse en chêne si solide que les éperons romains sont sans
effet sur eux.
César se méfie. Il ne se sent pas à l’aise sur mer parce qu’il
sait que les Vénètes s’y trouvent très bien. Il essaie donc de prendre sa
revanche sur terre en visant les villes des Vénètes. Mais, là encore, il y a un
problème : les forteresses des Vénètes sont « situées à l’extrémité
de langues de terre et de promontoires, en sorte qu’on ne peut y accéder à pied
quand la mer est haute, et qu’elles ne sont pas plus accessibles aux navires, ceux-ci
s’échouant inévitablement à marée basse » (III, 12). César décide alors d’attendre
les renforts de navires qu’il fait construire en hâte sur la Loire. Quand ces
navires arrivent, une flotte vénète de vingt unités surgit d’un port et vient
se ranger face aux Romains.
On a beaucoup discuté du lieu de cette rencontre. On a
proposé tour à tour la Grande Brière, l’embouchure de la Vilaine, le goulet du
golfe du Morbihan entre Port-Navalo et Kerpenhir en Locmariaquer, et même l’entrée
de la rivière d’Auray, à l’intérieur du golfe du Morbihan.
Certes, au premier siècle avant notre ère, la Grande Brière
était encore un bras de mer, avec de nombreuses îles et des bas-fonds. On a retrouvé
les vestiges d’une forteresse celtique à Sandun (Sandunum) et, non loin, un
véritable port que localement on identifie à Corbilo, et qui passe pour avoir
été le lieu du débarquement de César en Armorique. D’autre part, le territoire
des Vénètes descendait effectivement jusqu’à la Loire, englobant la presqu’île
de Guérande, Le Croisic et Saint-Nazaire, comme en témoignent les anciennes
limites de l’évêché de Vannes et la persistance de la langue bretonne dans la
presqu’île guérandaise jusqu’à la fin du siècle dernier. Mais il est plus
vraisemblable de voir en Corbilo la tête de pont de César, et dans la Brière, si
proche de la Loire et alors son prolongement naturel, l’endroit où furent
construits les navires romains de renfort.
L’embouchure de la Vilaine ne paraît pas devoir retenir l’attention :
la flotte vénète, précise César, sortit immédiatement d’un port à l’arrivée des
navires romains. Or, il n’y a jamais eu de port sur la Vilaine en aval de La
Roche-Bernard, qui est situé beaucoup trop loin pour permettre cette rencontre
immédiate.
Tout laisse à penser que la bataille navale contre les
Vénètes s’est déroulée en plein cœur du pays vénète, c’est-à-dire
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