Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
C’était le XXe siècle T.4. De Staline à Kennedy

C’était le XXe siècle T.4. De Staline à Kennedy

Titel: C’était le XXe siècle T.4. De Staline à Kennedy Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Alain Decaux
Vom Netzwerk:
qui a tenu à garder l’anonymat, et qui était alors de service à la base radar de La Réghaïa, témoigne que le Dassault a décollé le premier, bien qu’il ne fut pas équipé pour le vol de nuit : « Le pilote du Dassault accepta de décoller si je le guidais “serré”. Je le lui promis. À cette époque, je n’étais pas encore qualifié de nuit, mais j’avais confiance en moi. Je quittai alors la base de La Réghaïa pour Rumba, station radar d’où je pouvais contrôler l’interception en laissant mon adjoint continuer la coordination. J’ai pu effectuer l’interception très au large alors que l’avion semblait prendre le cap vers le Maroc. L’ Ouragan , décollé entre-temps, était également prêt à intervenir. L’ Ouragan était un chasseur de nuit bien équipé, bien activé. Dans le cas d’une non-obéissance de l’équipage, les consignes étaient de tirer dans un moteur. C’est la voix du pilote qui, en passant sur la longueur du CCR, intima au commandant de bord de prendre le cap pour Alger, qu’à défaut il l’y contraindrait. C’est ce qui s’est passé cette nuit-là. »
    Le commandant Grellier a témoigné que ce dernier message n’a pas été entendu à bord du DC3. Il a précisé à mon intention qu’une menace n’aurait pu le décider à se poser à Alger. S’il l’avait connue, il n’y aurait pas cru : « Pensez-vous que, de nuit, viser un moteur de DC3 soit vraiment possible sans prendre le risque de descendre l’avion en flammes ? Je ne pense pas qu’un chasseur aurait commis ce crime  (58) . »
     
    Entre-temps, un autre appareil s’est posé à Alger : celui de Robert Lacoste. Seuls le colonel Ducournau et Roger Détrie l’accueillent. En quelques phrases brèves, ils lui content toute l’affaire. Selon certains, Lacoste se serait écrié :
    — Formidable ! Quelle histoire ! C’est une affaire de tonnerre de Dieu !
    Il aurait ajouté :
    — Les chefs de la rébellion se trouvent au-dessus du territoire français. Ils passent à portée de ma main, nous sommes en guerre. Au point où en est l’affaire, mon devoir me commande de les arrêter. Je les arrête  (59) .
    Selon le témoigne de Roger Détrie, la réaction de Lacoste aurait été tout autre : « Je profitai de l’occasion qui m’était offerte pour informer M. Lacoste de l’opération en cours. À ce moment-là, le pilote du DC3 venait de demander des instructions à sa compagnie Air-Atlas à Rabat. J’avais fait dire au contrôleur de mobiliser l’attention du radio, de façon à l’empêcher de recevoir une réponse d’ Air-Atlas .
    « M. Lacoste m’écouta sans prononcer un seul mot. Par contre, le colonel Ducournau me félicita de mon initiative et m’encouragea à continuer. Je pris donc le silence du ministre-résidant pour une approbation. Et ceci me poussa à faire dire au pilote, toujours réticent, que c’était le chef du gouvernement lui-même qui l’invitait à venir à Maison-Blanche.
    « L’approbation tacite de Robert Lacoste intervenait à un moment où il était très facile de décommander l’opération, l’avion n’ayant pas encore dévié de sa route vert Tunis. Ceci est important , car certains “historiens” prétendent que le pouvoir politique a été mis par les militaires devant le fait accompli. »
    De la difficulté d’écrire l’histoire contemporaine.
     
    L’équipage du DC3 a pris sa décision. Cap sur Alger. Le radio annonce : « Nous survolons Cherchell. Tout va bien à bord. Ils ne s’aperçoivent de rien. Des mesures de sécurité sont-elles prises au sol ? »
    Alger : « Tout est paré. »
    Depuis 18 h 30, des forces imposantes quadrillent l’aérodrome de Maison-Blanche. « Plusieurs escadrons de gendarmes et CRS me furent envoyés, dit Roger Détrie, beaucoup plus qu’il n’en fallait. » Des hommes armés jusqu’aux yeux. Cinq généraux, dont le général Lorillot.
     
    Dans le DC3, les chefs algériens aperçoivent, à travers les hublots, une incroyable densité de lumières. L’un d’eux interroge Mlle Lambert :
    — Est-ce que c’est Tunis ?
    — Oui. Nous nous y poserons dans un quart d’heure.
    La double inscription clignote : « Attachez vos ceintures. Fasten Seatbelt . » Mais pourquoi l’appareil plonge-t-il si vite vers le sol ? Le train d’atterrissage prend contact avec la piste  (60) . La voix de l’hôtesse se veut toujours rassurante :
    — Vous êtes priés de

Weitere Kostenlose Bücher