Comment vivaient nos ancêtres
chez eux est, notons-le, féminin) que l’humanité tout entière était née… L’œuf, symbole par ailleurs de la perfection, représentait aussi bien la création que la re-création et la renaissance. En Russie et en Scandinavie, on plaçait parfois des œufs d’argile dans les sépultures, comme images du retour à la vie. À se demander donc, ici, si nos œufs pascals n’auraient pas eu, en fait, eux aussi cette valeur et cette signification-là…
À ce niveau donc, la réponse à la question de Censorinus s’impose : l’œuf exista avant la poule !
Les cloches, donc, rythment la vie aux champs comme elles rythment la vie de l’homme. Baptêmes, mariages et morts sont des événements carillonnés. Les cloches en font part à la communauté villageoise, comme elles lui annoncent toutes les nouvelles importantes : réunions, incendies, orages. En 1914, ce sont les cloches qui ont annoncé à nos grands-parents la déclaration de la guerre. De plus, elles savent aussi protéger, ayant le pouvoir d’éloigner les tempêtes et les nuages de grêle lorsqu’ils s’amoncellent au-dessus du village. Certes appréciée, cette qualité ne va pas sans poser de problèmes car il arrive qu’une cloche trop efficace indispose la paroisse voisine en lui renvoyant régulièrement les grêlons, ce qui lui vaut parfois les représailles des voisins qui, un soir, viendront la décrocher.
Le métier de sonneur n’est pas sans risques. Il arrive que le malheureux soit foudroyé pendant qu’il s’acharne au bout de sa corde, sans oublier ce pauvre Savoyard, lapidé par les villageois pour ne pas avoir accompli sa tâche par temps d’orage violent. Le métier demande aussi tout un art et un talent consommé. Le sonneur, qui est souvent le marguillier, doit savoir moduler les sonneries, ce qu’il fait souvent en s’aidant du rythme d’une chanson. Encore n’est-il pas donné à tout le monde d’arriver à faire tinter la cloche selon les règles. Car chaque cloche a une voix. Elle pleure en certains jours, pour être joyeuse en d’autres.
Dotée d’un parrain, d’une marraine et d’une voix, pourquoi la cloche ne pourrait-elle pas voyager ? Tout au moins par l’esprit. La voici donc qui part pour Rome après le Gloria du Jeudi saint. Pour y faire quoi ? Les réponses varient selon les régions : elle va à Rome y faire ses Pâques, rendre visite au pape et déjeuner avec lui, s’y confesser, ou encore y chercher des œufs, qu’elle laissera tomber au fil du voyage retour, le samedi ou le dimanche matin.
Pourquoi des œufs ? Pourquoi ces traditionnels œufs de Pâques ? Sans doute, parce que l’œuf est le symbole de la fécondité et qu’il incarne en cela le renouveau que connaît alors la nature. Mais aussi et surtout parce qu’il a été banni de la table de nos ancêtres pendant quarante jours et qu’il symbolise la fin des interdits et du jeûne.
Le samedi, les enfants vont donc quêter des œufs de maison en maison. Sous chaque toit, on a soin d’en faire cuire, d’autant qu’il existe une foule de recettes pour leur donner une coloration. Pour les teindre en jaune, on les fait cuire avec des pelures d’oignon, en brun avec de la chicorée, en violet avec de l’anémone, en rose avec des épluchures de radis, en vert avec des racines d’ortie, etc.
Le lendemain, tous ces œufs sont utilisés à des jeux d’adresse dont la « roulée des œufs », que l’on trouve un peu dans toutes les régions. Tant pis s’ils sont perdus ! Le stock est si important qu’il en reste toujours assez pour se confectionner, le jour de Pâques, une énorme omelette, à laquelle on a souvent pris soin d’ajouter du lard pour bien montrer que le temps des privations est terminé.
Tout comme la coutume des œufs de Pâques, celle du poisson d’avril est directement liée à ce temps de carême. On a vu que c’est à la suite d’un remaniement de calendrier que le mois d’avril n’est plus le premier de l’année. On continue donc, le premier jour de ce mois, à s’offrir des petits cadeaux, mais des cadeaux dérisoires. Le poisson, que le carême ramène chaque jour sur la table, convient tout à fait à cette occasion. À cela, on ajoute des farces à l’intention des naïfs du village, envoyant les uns chercher la ficelle à lier les sauces, les autres la corde à virer le vent, un bâton à un seul bout, la presse à cintrer les parenthèses ou bien sûr la clé du champ de
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