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Dans l'intimité des reines et des favorites

Dans l'intimité des reines et des favorites

Titel: Dans l'intimité des reines et des favorites Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Guy Breton
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son épouse, Catherine de Médicis poussa en avant M me  de Sauve. Mais cette femme, pourtant ravissante, ne plaisait plus au Béarnais. Il la salua poliment et jeta un coup d’œil sur les demoiselles de l’Escadron Volant qui, dans l’espoir de plaire, frétillaient comme des bassets affectueux. Soudain, son œil s’alluma. Il venait de distinguer dans le groupe une brune étonnamment belle que l’on appelait M lle  Dayelle.
    Cette jeune personne aux prunelles veloutées était grecque. Son charme exotique plut à Navarre qui, sans aucune gêne, déclara à sa belle-mère qu’elle avait là une des plus jolies filles qu’il ait rencontrées dans sa vie. Puis il prit sa femme par le bras gauche, M lle  Dayelle par le bras droit, et annonça que, le voyage pour venir à La Réole l’ayant fatigué, il avait l’intention d’aller se coucher sans plus tarder.
    Alors Marguerite s’installa dans une chambre, la jeune Grecque dans une autre, et Henri, voulant, en ce jour de retrouvailles, se montrer galant époux, passa sa nuit à faire, en une toilette plus que sommaire, la navette entre les deux…
    Au matin, la reine de Navarre et M lle  Dayelle montraient le même air battu mais content.
    Marguerite l’avoue d’ailleurs dans ses Mémoires : « Le roi mon mari, écrit-elle, est devenu fort amoureux de Dayelle, ce qui n’empêchait pas que je reçusse beaucoup d’honneur et d’amitié du roi, qui m’en témoignait autant que j’en eusse pu désirer… »
     
    Après un long séjour à Toulouse, Marguerite entra à Nérac, sa capitale, le 15 décembre 1578.
    Le vieux château de la Maison d’Albret n’avait pas le confort du Louvre ; il n’en avait pas non plus la gaieté… Les princes huguenots qui entouraient Henri de Navarre étaient de mœurs austères, affectaient une grande pudibonderie et une indifférence dédaigneuse pour les fêtes.
    Au contraire, Margot aimait le luxe, le plaisir, les bals : elle résolut de changer, sans attendre, l’atmosphère pesante qui régnait à Nérac.
    Elle organisa donc dès son arrivée quelques sauteries fort joyeuses au cours desquelles Guillaume Raspault et ses amis firent entendre aux Navarrais scandalisés le rythme à trois temps de la volte, cette danse nouvelle dont Henri  III raffolait et que les Allemands devaient un jour baptiser Walzer avant de nous la rendre sous le nom de valse…
    Les premières soirées de ce genre n’ayant obtenu qu’un succès d’estime, les demoiselles de l’Escadron Volant furent chargées de dérider les protestants. Elles y parvinrent plus aisément que la volte, car elles étaient ravissantes et possédaient le don d’énerver les plus chastes. « Aussi, nous dit Pierre Debreaux, les gentilshommes prirent-ils l’habitude de mettre plus fréquemment la main aux fesses des dames qu’aux plats, pourtant savoureux, qui étaient servis [42] . » Bref, sous l’heureuse influence de Margot, le château de Nérac devint bientôt un vaste lupanar, et les coreligionnaires de Navarre, libérés de leurs complexes, commencèrent à considérer la vie d’un autre œil.
    Sully, dans ses Mémoires , nous dit : « L’amour était devenu l’affaire la plus sérieuse de tous les courtisans ; et le mélange des deux cours, qui ne cédaient en rien l’une à l’autre du côté de la galanterie [43] , produisit l’effet qu’on en devait attendre : on se livra aux plaisirs, aux festins et fêtes galantes. »
    Naturellement, une telle atmosphère influait beaucoup sur le langage. Toutes les plaisanteries, même les plus gaillardes, étaient admises. Un jour, quelqu’un dit à Catherine de Médicis – qui avait la réputation d’aimer les hommes bien constitués, « c’est-à-dire pourvus d’une arme d’amour de dimension respectueuse » – que les protestants surnommaient « reine mère » leur plus grosse couleuvrine. La Florentine en demanda la raison.
    — C’est, lui répondit-on, parce qu’elle a le calibre plus grand et plus gros que les autres.
    Loin de se fâcher, Catherine rit beaucoup de cette énorme grossièreté [44] .
     
    Pendant tout l’hiver, on s’amusa ainsi, et la reine mère s’efforça de profiter de la bonne humeur générale pour faire accepter ses conditions de paix aux chefs huguenots. Souriante, volontiers joviale, elle paraissait à ces braves gens la loyauté même, alors qu’elle préparait dans l’ombre une de ces machinations dont elle avait le secret.

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