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Fiora et le roi de France

Fiora et le roi de France

Titel: Fiora et le roi de France Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Juliette Benzoni
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soir à Lorenzo... au
cours du bal, bien sûr, puisqu’il ne saurait être question de nous rejoindre
autrement.
    – Tu
as bien réfléchi ?
    – Oui.
Vois-tu, Chiara, j’appartiens à cette ville. Jusqu’à la mort de mon père, j’en
ai été l’une des pierres. Un ouragan m’a arrachée et envoyée rouler au loin. Si
Dieu permet que la pierre reprenne sa place, je ne vois aucune raison d’aller
contre sa volonté...
    – Alors,
à quoi bon te mentir à toi-même ? Tu aimes Lorenzo, un point c’est tout.
    – Non,
rien n’est changé depuis que nous en avons parlé. Je te le répète : c’est
mon corps qui l’aime, et je me trouve bien avec lui mais je ne vois aucune
raison de tourner le dos à une vie, à une culture que j’aime pour retourner
vers une autre, qui a sa beauté sans doute, mais qui est moins douce à mon
cœur.
    – Ton
fils n’appartient pas à cette culture ?
    – Pas
plus que je ne lui appartenais quand mon père m’a ramenée de Bourgogne avec
Léonarde et Jeannette. C’est un bébé, encore, et il aimera Florence comme je l’aime.
    Sans
répondre, Chiara embrassa son amie. Ses yeux brillaient de joie :
    – C’est
la meilleure des nouvelles, dit-elle enfin. Il m’en coûtait, tu sais, de me
faire l’avocat du diable, mais que tu restes avec nous me remplit de joie. Tu
garderas Carlo auprès de toi ?
    – Bien
sûr ! Il est heureux à Fiesole et s’entend à merveille avec Démétrios.
Comme il passe pour mort, c’est la meilleure solution. Si tu allais te préparer ?
L’heure de la procession sera bientôt là.
    – Et
pour rien au monde je ne voudrais la manquer. J’ai grande envie de voir à quoi
ressemble l’ambassadeur français.
     
    Tandis
que Chiara se précipitait vers ses robes de cérémonie, Florence fêtait saint
Jean. Tout avait commencé, aux premières heures du matin, par le défilé d’offrandes
que les corporations, les « arts florentins », portaient au saint
patron de la ville, chacune offrant les produits de sa fabrication :
« Calimala » les draps fins et soyeux, véritables produits de luxe
sortis de ses ateliers ; l’art de la Laine ses plus belles futaines et ces
blanchets souples dont le secret avait été pris à Valenciennes ; celui de
la Soie des cendals, des satins et des taffetas chatoyants ; les Orfèvres
des plats et des aiguières d’argent, et ainsi de suite jusqu’aux pains dorés et
aux pâtisseries légères des modestes boulangers. Le défilé dura jusqu’à midi où
se forma une grande procession : le clergé de Florence rejoignit les « arts »,
les délégations envoyées par les cités vassales et de grandes théories de
jeunes gens et de jeunes filles qui, déguisés en anges et portant dans le dos
de grandes ailes blanches dont la réalisation avait donné beaucoup de mal à
Sandro Botticelli, supportaient sur leurs épaules azurées les châsses dorées
contenant les reliques de la ville. Tout ce monde s’engouffra ensuite dans le
Duomo pour y entendre la messe.
    C’était
la première grande cérémonie célébrée dans la cathédrale profanée par le
meurtre de Giuliano. L’avant-veille, l’archevêque de Florence était venu
cérémonieusement purifier l’église majeure à grand renfort d’eau bénite et d’encens.
    Après
la messe, tout le monde rentra chez soi pour prendre des forces en vue des
cérémonies de l’après-midi et de la grande course qui aurait lieu à la fin du
jour. A ceux qui ne pouvaient s’offrir un repas digne d’une si belle journée,
des éventaires en plein vent distribuaient gracieusement pâtés et pâtisseries.
Et, pour accompagner ce festin, les fontaines de la ville laissaient couler du
vin de Chianti à la place de l’eau. Pour ajouter à la gaieté, des bandes de
musiciens jouant de la viole, du fifre ou du tambourin couraient les rues et s’arrêtaient
aux carrefours... le plus près possible des fontaines.
    De la
tribune des dames où elles avaient pris place pour admirer la procession et
suivre tant bien que mal l’office par les portes largement ouvertes, Fiora
aperçut Lorenzo, vêtu de noir comme il en prenait l’habitude, mais portant au
cou une chaîne d’or et de rubis qui valait un royaume. Un bijou assorti
brillait à son bonnet. Auprès de lui marchait un homme blond au chaperon duquel
étincelait une fleur de lys d’or, et Fiora n’eut aucune peine à reconnaître
Philippe de Commynes. Il allait son chemin avec la dignité

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