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Galaad et le Roi Pêcheur

Galaad et le Roi Pêcheur

Titel: Galaad et le Roi Pêcheur Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean Markale
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avec beaucoup de tendresse. Et le chevalier lui rendait ses baisers avec un plaisir manifeste.
    Quand Perceval les eut bien examinés l’un et l’autre, sa stupeur fut telle, un instant, qu’il arrêta son cheval et se signa. Puis il ne put s’empêcher d’éclater de rire. Comprenant que cette hilarité visait son amie, le chevalier en fut très affligé et, abordant Perceval, lui demanda pourquoi il s’était signé à trois reprises avant de rire aux éclats.
    « Je vais te l’expliquer, répondit Perceval. En voyant ce diable chevaucher à tes côtés, j’ai eu peur, et voilà pourquoi je me suis signé. Mais en le voyant t’accoler et t’embrasser, le spectacle m’a paru si incongru que mon rire a fusé tout seul. Or, mon ami, sans te fâcher, je te prie, dis-moi si c’est là diable ou créature humaine. Quant à moi, j’en jure, on me donnerait en échange tout le royaume de Bretagne, que je n’accepterais pas de chevaucher trois jours de suite avec ce monstre. J’aurais trop peur qu’il ne m’étrangle ou me tue ! » À ce discours, le chevalier éprouva une telle colère qu’il s’empourpra.
    « Comment ? s’écria-t-il d’un ton furieux. Que viens-tu de dire là ? Rien ne pouvait me fâcher plus gravement que tes railleries et tes rires ! Car j’aime mon amie plus que mon propre cœur, et elle me paraît si belle qu’à mes yeux nulle dame au monde, nulle jeune fille ne saurait lui être comparée ! » En lui-même, Perceval se dit que le chevalier avait raison : aucune femme ne lui avait seulement paru comparable pour la laideur. « Mais je ne laisserai pas cette injure impunie ! reprit le chevalier. Je ne mangerai plus, sache-le, que je ne l’aie vengée à tes dépens. Assurément, si mon amie avait entendu tes paroles, elle en serait morte sur-le-champ, tant elle est sensible. Or, si elle mourait, je me tuerais, car, sur ma foi, il me serait impossible d’aimer jamais une autre femme. Je te défie ! – S’il plaît à Dieu, rétorqua Perceval, je saurai me défendre. »
    Ils s’éloignèrent l’un de l’autre, saisirent leurs boucliers par les courroies et, brandissant leurs lances, lâchèrent la bride aux chevaux. La rencontre fut si violente qu’ils se retrouvèrent désarçonnés tous deux. Mais ils se relevèrent prestement et, se ruant sus, reprirent aussitôt la lutte, à l’épée cette fois, mais avec autant d’acharnement, et en s’assenant mutuellement des coups terribles sur les heaumes. Leurs boucliers furent bientôt en piteux état et, vu la folie meurtrière de leurs épées, c’était miracle que l’un ou l’autre ne fût déjà mort. Ils finirent cependant par se fatiguer, tant et si bien que leurs coups avaient de moins en moins de force. Enfin, Perceval rassembla tout son courage, et la honte que lui causait cet interminable duel lui donna la force de lancer une nouvelle attaque et de harceler son adversaire au point d’en venir à bout. Il le renversa dans l’herbe, lui arracha son heaume qu’il envoya rouler à trente pieds de là, et il aurait volontiers coupé la tête du chevalier si celui-ci n’avait demandé grâce et merci, au nom de Dieu et pour l’amour de sa dame. La fureur de Perceval s’apaisa immédiatement. Il remit son épée au fourreau et demanda au vaincu qui il était et d’où il venait. Le chevalier répondit qu’il venait de la Terre Foraine et qu’on l’appelait le Beau Mauvais.
    « Chevalier ! s’écria Perceval, sur ma tête, il y a dans ce nom du vrai et du faux ! Tu n’es certes pas beau et mauvais, mais beau et bon, tu l’as prouvé par ton comportement. » Certes, en regardant la jeune femme, il ne put s’empêcher de rire à nouveau, mais il n’insista pas, se contentant de demander au chevalier le nom de son amie. « Elle se nomme Rosette la Blonde, répondit le chevalier. Apprends qu’il n’est dame plus courtoise au monde, car elle est non seulement belle mais aimable et douce. Et je l’aime avec tant de ferveur que, plutôt que de me séparer d’elle, sache-le, je préférerais perdre un œil ! – Chevalier, il ne serait pas trop courtois de vouloir vous séparer tous deux. Tu vas néanmoins me jurer de te rendre le plus tôt possible à la cour du roi Arthur. Tu t’y constitueras prisonnier de ma part auprès du roi et emmèneras ton amie pour la confier à la reine Guenièvre. – Seigneur, répondit l’autre, cela me convient parfaitement, car il n’est cour plus

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