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Histoire de la décadence et de la chute de l’Empire romain

Histoire de la décadence et de la chute de l’Empire romain

Titel: Histoire de la décadence et de la chute de l’Empire romain Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Edward Gibbon
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vérité, perdre
insensiblement de son importance et de sa dignité. Mais, en admettant qu’elle
fut devenue une représentation de théâtre, cette scène méritait bien d’avoir
pour spectateur un souverain ; et quelquefois elle pouvait imprimer une grande
leçon dans l’âme d’un jeune prince.
    Si toutes les institutions de Zoroastre eussent porté
l’empreinte de ce caractère élevé, son nom eût été digne d’être prononcé avec
ceux de Numa et de Confucius ; et ce serait à juste titre que l’on
donnerait à son système tous les éloges qui lui ont été prodigués par
quelques-uns de nos théologiens, et même de nos philosophes. Mais, dans ses
productions bizarres, fruit d’une passion aveugle et d’une raison éclairée, on
reconnaît le langage de l’enthousiasme et de l’intérêt personnel. Les vérités
importantes et sublimes qu’il annonce sont dégradées, par un mélange de
superstition méprisable et dangereuse. Les mages formaient une classe très
considérable de l’État. Nous les avons déjà vus paraître, dans une assemblée au
nombre de quatre-vingt mille. La discipline multipliait leurs forces ; ils composaient,
une hiérarchie régulière répandue dans toutes les provinces de la Perse. Le
principal d’entre eux résidait à Balk, où il recevait les hommages de toute la
nation, comme chef visible de la religion, et comme successeur légitime de
Zoroastre [651] .
Ces prêtres avaient des biens immenses : outre les terres les plus
fertiles de la Médie [652] ,
dont, les Perses les voyaient jouir paisiblement, leurs revenus consistaient en
une taxe générale sur les fortunes, et sur l’industrie des citoyens [653] . Il ne suffit
pas , s’écrie l’avide prophète, que vos bonnes œuvres surpassent en
nombre les feuilles des arbres , les gouttes de la pluie, les sables de la mer
ou les étoiles du firmament ; il faut encore, pour qu’elles vous soient
profitables, que le destour, ou le prêtre, daigne les approuver. Vous ne pouvez
obtenir une pareille faveur qu’en payant fidèlement à ce guide du salut la dîme
de vos biens, de vos terres, de votre argent, de tout ce que vous possédez. Si
le destour est satisfait, votre âme évitera les tourments de l’enfer ;
vous serez comblés d’éloges dans ce monde-ci, et vous goûterez dans l’autre un
bonheur éternel : car les destours sont les oracles de la Divinité ;
rien ne leur est caché, et ce sont eux qui délivrent tous les hommes [654] .
    Ces maximes importantes de respect et d’une foi implicite
étaient sans doute gravées avec le plus grand soin dans l’âme tendre des jeunes
Perses, puisque l’éducation appartenait aux mages, et que l’on remettait entre
leurs mains les enfants même de la famille royale [655] . Les prêtres, doués
d’un génie spéculatif, étudiaient et dérobaient aux yeux de la multitude les
secrets de la philosophie orientale. Ils acquéraient, par des connaissances
profondes, ou par une grande habileté, là réputation d’être très versés dans
quelques sciences occultes, qui, par la suite, ont tiré des mages leur
dénomination [656] .
Ceux qui avaient reçu de la nature des dispositions plus actives que les
autres, passaient leur vie dans le monde, au milieu des intrigues des cours et
du tumulte des villes ; et tant qu’Artaxerxés tint les rênes du
gouvernement, la politique ou la superstition l’engagea à se laisser diriger
par les avis de l’ordre sacerdotal, dont il rétablit la dignité dans tout son
éclat [657] .
    Le premier conseil que les mages donnèrent à ce prince était
conforme au génie intolérant de leur religion [658] , à la pratique
des anciens rois [659]  ;
et même à l’exemple de leur législateur, qui, victime du fanatisme, avait perdu
la vie dans une guerre allumée par son zèle opiniâtre [660] . Artaxerxés
proscrivit, par un arrêt rigoureux, l’exercice de tout culte, excepté celui de
Zoroastre. Les temples des Parthes, et les statues de leurs monarques qui
avaient reçu les honneurs de l’apothéose, furent renversés avec ignominie [661] . On brisa
facilement l’épée d’Aristote [662] ,
nom que les Orientaux avaient imaginé pour désigner le polythéisme et la
philosophie des Grecs. Les flammes de la persécution enveloppèrent les juifs et
les chrétiens [663] les plus attachés à leurs dogmes ; elles n’épargnèrent pas même les
hérétiques de la nation : la majesté d’Ormuzd, qui ne pouvait reconnaître

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