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Histoire de la décadence et de la chute de l’Empire romain

Histoire de la décadence et de la chute de l’Empire romain

Titel: Histoire de la décadence et de la chute de l’Empire romain Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Edward Gibbon
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l’Église, les hérétiques produisaient
une foule d’histoires dans lesquelles ils avaient adapté à leurs doctrines
respectives [1382] les actions et les discours de Jésus-Christ et de ses apôtres. Le succès des
gnostiques fut rapide et fort étendu [1383] .
Ils couvrirent l’Asie et l’Égypte, s’établirent à Rome et pénétrèrent
quelquefois dans les provinces de l’Occident. Ils s’élevèrent, pour la plupart,
dans le second siècle ; le troisième fut l’époque de leur splendeur. Ils
furent entièrement terrassés, dans le quatrième ou dans le cinquième, par
l’influence supérieure de quelques nouvelles controverses, et par l’ascendant
de la puissance dominante. Quoiqu’ils troublassent sans cesse la paix de
l’Église, et qu’ils en avilissent souvent la dignité, ils contribuèrent plus à
favoriser qu’à retarder les progrès du christianisme. Les païens, convertis,
dont les objections les plus fortes étaient contre la loi de Moïse, pouvaient
être admis dans le sein de plusieurs sociétés chrétiennes, qui n’exigeaient pas
de leur esprit, encore rempli de préjugés, la croyance d’une révélation
intérieure ; insensiblement leur foi s’étendit et se fortifia, de sorte qu’a la
fin l’Église profita des conquêtes de ses ennemis les plus invétérés [1384] .
    A reste, quelle que put être, entre les orthodoxes, les
ébionites et les gnostiques, la différence d’opinion concernant la divinité ou
la nécessité de la loi de Moïse, un zèle exclusif les animait tous également ;
et ils avaient pour l’idolâtrie la même horreur qui avait distingué les Juifs
parmi les autres nations du monde ancien. Le philosophe, qui ne voyait dans le
système du polythéisme qu’un mélange ridicule de fraude et d’erreur, pouvait
librement sourire de pitié sous le masque de la dévotion, sans craindre que son
mépris ou sa complaisance l’exposât au ressentiment de quelque puissance
invisible, ou plutôt, selon lui, imaginaire. Mais les premiers chrétiens
envisageaient avec bien plus d’effroi, et sous un jour beaucoup plus odieux, la
religion du paganisme. Les fidèles et les hérétiques s’accordaient à regarder
les démons comme les auteurs, les patrons et les objets de l’idolâtrie [1385] . Ces esprits
rebelles qui avaient été dégradés de l’état d’ange, et précipités dans le
gouffre infernal, avaient toujours la permission d’errer sur la terre, de
tourmenter le corps des pécheurs et de séduire leurs âmes. Les démons
s’aperçurent bientôt et abusèrent du penchant naturel de l’homme à la dévotion
; détournant adroitement les mortels de l’adoration qu’ils devaient à leur
Créateur ; ils usurpèrent la place et les honneurs de l’Être suprême. Le succès
de leurs détestables artifices satisfit à la foi de leur vanité et leur
vengeance ; ils goûtèrent la seule consolation dont ils puissent être
susceptibles, l’espoir d’envelopper, l’espèce humaine dans leur crime, et dans
leur misère. Il était reconnu, ou du moins on s’imaginait qu’ils s’étaient
partagé entre eux les rôles les plus importants du polythéisme l’un de ces
démons prenait le nom et les attributs de Jupiter ; l’autre d’Esculape, un
troisième de Vénus, et un quatrième peut-être d’Apollon [1386] . On ajoutait
que leur longue expérience et leur nature aérienne les mettaient en état de
remplir ces différents caractères avec une adresse et avec une dignité
convenables. Cachés dans les temples, ils avaient institué les fêtes et les
sacrifices ; ils avaient inventé les fables : les oracles étaient
rendus par ces esprits infernaux, et il leur avait souvent été permis de faire
des miracles. Les chrétiens, qui, par l’intervention des démons, pouvaient
expliquer si facilement toutes les apparences surnaturelles, admettaient sans
peine et même avec empressement les fictions les plus extravagantes de la
mythologie païenne. Mais en ajoutant foi à ces fictions, le chrétien ne les
envisageait qu’avec horreur. La plus petite marque de respect pour le culte
national eût été à ses yeux un hommage direct rendu aux esprits infernaux, et
un acte de rébellion contre la majesté de Dieu. Par une suite de cette opinion,
le devoir le plus essentiel, mais en même temps le plus difficile d’un
chrétien, était de se conserver pur et exempt de toute pratique d’idolâtrie. La
religion des anciens peuples ne consistait pas

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