Histoire de la décadence et de la chute de l’Empire romain
descendants des sorcières et des démons
devaient hériter en partie de la puissance surnaturelle aussi bien que de la
méchanceté de leurs ancêtres malfaisants. Hermanric se préparait à réunir
toutes les forces de son royaume contre ses ennemis ; mais il découvrit bientôt
que les tribus de ses vassaux, fatiguées de, l’état d’oppression où il les
tenait, étaient plus disposées à seconder qu’à repousser l’invasion des Huns.
Un des chefs des Roxolans [3059] avait déserté précédemment les drapeaux d’Hermanric ; et le tyran cruel s’était
vengé sur son épouse innocente, en la faisant écarteler par des chevaux
sauvages. Les frères de cette victime infortunée saisirent à leur tour le
moment de la vengeance. Le vieux roi des Goths, dangereusement blessé d’un coup
de poignard, languit encore quelque temps ; mais ses infirmités retardaient les
opérations de la guerre, et les conseils de la nation étaient agités par la
discorde et par la jalousie. Sa mort, qu’on a attribuée à son propre désespoir,
laissa les rênes du gouvernement entre les mains de Withimer, qui, avec le
secours suspect d’une troupe de Scythes mercenaires, soutint quelque temps une
lutte inégale contre les Huns et les Alains. Il fut vaincu à la fin, et perdit
la vie dans une bataille décisive. Les Ostrogoths se soumirent à leur sort ; et
nous retrouverons bientôt les descendants de la race royale des Amalis au
nombre des sujets de l’orgueilleux Attila. Mais l’activité d’Alathæus et de
Saptirax deux guerriers d’une fidélité et d’une valeur éprouvées, sauva
l’enfance du roi Witheric. Ils conduisirent, par des marches prudentes, les
restes des Ostrogoths indépendants sur les bords du Danaste où Niester, rivière
considérable qui sépare aujourd’hui les États ottomans de l’empire de Russie.
Le prudent Athanaric, plus occupé de la sûreté des siens que de la défense
générale du royaume, avait placé le camp des Visigoths sur les rives du
Niester, résolu de se défendre contre les Barbares victorieux, qu’il ne croyait
pas devoir attaquer. La célérité ordinaire des Huns fut retardée par l’embarras
des dépouilles et des esclaves ; mais, par leur habileté, ils trompèrent
Athanaric, dont l’armée n’échappa qu’avec peine à une entière destruction. Au
clair de la lune, un corps nombreux de cavalerie passa la rivière dans un
endroit guéable, environna et attaqua le juge des Visigoths, qui défendait les
bords du Niester ; et ce ne fut qu’à force de courage et d’intelligence, qu’il
parvint à se retirer sur les hauteurs. L’intrépide général avait déjà formé un
nouveau et sage plan de guerre défensive, et les lignes qu’il commençait à
construire entre les montagnes, le Pruth et le Danube, auraient mis à l’abri
des ravages des Huns la vaste et fertile contrée connue aujourd’hui sous le nom
de Valachie [3060] ; mais la timide impatience de ses compatriotes effrayés, trompa son espoir et
déconcerta ses projets. Persuadés que le Danube était la seule barrière qui pût
les mettre à l’abri de la rapide poursuite et de l’invincible valeur des
Barbares de Scythie, le corps entier de la nation s’avança vers les bords de
cette grande rivière, sous les ordres de Fritigern et d’Alavivus [3061] , et implora la
protection de l’empereur romain de l’Orient. Athanaric, toujours attaché à ses
serments, ne voulut point entrer sur les terres des Romains : il se retira,
suivi d’une troupe fidèle, dans le pays montagneux de Caucaland, défendu et
presque caché, à ce qu’il paraît, par les impénétrables forets de la
Transylvanie [3062] .
Après avoir terminé la guerre des Goths avec une apparence
de gloire et de succès ; Valens avait traversé ses provinces d’Asie, et était
venu enfin fixer sa résidence dans la capitale de la Syrie. Il employa le
séjour de cinq ans [3063] qu’il fit à Antioche, à veiller, sans s’exposer de trop prés, sur les
entreprises du monarque persan, à repousser les incursions des Sarrasins et des
Isaures [3064] à faire triompher la théologie arienne par des arguments plus irrésistibles que
ceux de l’éloquence et de la raison, et à tranquilliser son âme timide et
soupçonneuse en faisant périr sans distinction les innocents avec les
coupables. Mais il eut bientôt de quoi occuper sérieusement son attention par
l’avis important que lui donnèrent les officiers civils et militaires
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