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Histoire de la décadence et de la chute de l’Empire romain

Histoire de la décadence et de la chute de l’Empire romain

Titel: Histoire de la décadence et de la chute de l’Empire romain Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Edward Gibbon
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Bourguignons, les Suèves, et les
Alains, s’assemblèrent par milliers dans les plaines de la Ligurie, diminuant
par leurs mutuelles animosités, ce qu’on pouvait avoir à craindre de la réunion
de leurs forces [4036] .
Ils passèrent les Alpes au cœur de l’hiver. L’empereur marchait à leur tête, à
pied et entièrement couvert de son armure ; il sondait avec un bâton la
profondeur de la glace ou de la neige et encourageait les Scythes, qui se
plaignaient de l’excès du froid en leur promettant avec gaîté qu’ils seraient
contents de la chaleur de l’Afrique. Les citoyens de Lyon osèrent fermer leurs
portes ; mais ils implorèrent bientôt et éprouvèrent la clémence de Majorien.
Après avoir remporté une victoire sur Théodoric, il accepta l’alliance, et
l’amitié d’un roi dont il estimait la valeur. La force et la persuasion
concoururent utilement à réunir pour un moment la plus grande partie de
l’Espagne et de la Gaule ; et les Bagaudes indépendants, qui avaient
échappé ou résisté à la tyrannie des règnes précédents, cédèrent avec confiance
aux vertus de Majorien [4037] .
Son camp était rempli d’alliés barbares : le zèle et l’amour des peuples
mettaient son trône en sûreté ; mais l’empereur avait prévus qu’il était
impossible d’entreprendre la conquête de l’Afrique sans une force maritime.
Dans la première guerre contre les Carthaginois, la république fit des efforts si
incroyables, que soixante jours après le premier coup de hache donné au premier
arbre de la forêt, une flotte de cent soixante galères se déployait fièrement
dans le port, toute prête à faire voile [4038] .
Dans des circonstances moins favorables, Majorien égala le courage et la
persévérance des anciens Romains. On abattit les bois de l’Apennin ; on
rétablit les arsenaux et les manufactures de Misène et de Ravenne. L’Italie et
là Gaule contribuèrent à l’envi, et la flotte impériale composée de trois cents
fortes galères et d’un nombre proportionné de moindres navires et de bâtiments
de transport, se rassembla dans le port vaste et sûr de Carthagène en Espagne [4039] . Les soldas de
Majorien, animés par l’intrépidité de leur général, ne doutaient plus de la
victoire ; et, si l’on peut en croire l’historier Procope, l’empereur se
laissait quelquefois emporter par son courage au-delà des bornes de la
prudence. Curieux d’examiner par lui-même la situation des Vandales, il se
hasarda, en déguisant la couleur de ses cheveux, d’entrer dans Carthage, sous
le nom de son ambassadeur ; et Genseric, lorsqu’il en fut instruit, regretta
vivement d’avoir laissé échapper l’empereur des Romains. Cette anecdote peut
paraître apocryphe ; mais elle n’était applicable qu’à un héros [4040] .
    Genséric n’eut pas besoin d’une entrevue pour apprécier le
génie et les desseins de son adversaire. Il eut bientôt épuisé sans succès ses
ruses et ses délais accoutumés : ses propositions de paix devenaient à chaque
instant plus soumises et peut-être plus sincères ; mais l’inflexible, Majorien,
fidèle à l’ancienne maxime, croyait que le salut de Rome dépendait de
l’assujettissement de Carthage. Le roi des Vandales n’osait plus compter sur la
valeur de ses sujets naturels, énervés par le luxe du Midi [4041] ; il soupçonnait
la fidélité d’un peuple vaincu, qui le détestait comme protecteur des ariens ;
et la précaution qu’il prit de faire un désert de la Mauritanie [4042] , n’arrêta point
l’empereur romain qui pouvait choisir le lieu de sa descente sur toute la côte
d’Afrique : mais la perfidie de quelques sujets puissants, envieux ou effrayés
des succès de leur maître, délivra Genseric du danger. Par le moyen de cette
intelligence, il surprit la flotte dans la baie de Carthagène. Une partie des
vaisseaux furent pris, coulés à fond ou brûlés, et un seul jour vit détruire
les travaux de trois années [4043] .
Après cet événement, les deux rivaux se montrèrent supérieurs à leur fortune.
Le Vandale, au lieu de s’enorgueillir d’une victoire accidentelle, renouvela
ses propositions de paix. L’empereur d’Occident, capable de former de vastes
desseins et de supporter de grands revers, consentit à un traité ou plutôt à
une suspension d’armes, convaincu qu’avant d’avoir pu rétablir sa flotte, il ne
manquerait pas d’un sujet légitime pour justifier une seconde guerre.

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