Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Histoire de la décadence et de la chute de l’Empire romain

Histoire de la décadence et de la chute de l’Empire romain

Titel: Histoire de la décadence et de la chute de l’Empire romain Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Edward Gibbon
Vom Netzwerk:
Majorien
retourna en Italie s’occuper du bonheur de ses sujets ; et, fort du sentiment
de sa conscience, il ignora longtemps sans doute la criminelle conspiration qui
menaçait son trône et sa vie. L’événement de Carthage ternissait une gloire
dont l’éclat avait frappé les yeux de la multitude ; presque tous les
officiers, soit civils ou militaires, étaient irrités contre le réformateur des
abus qui leur étaient personnellement avantageux ; et le patrice Ricimer
tâchait de tourner l’esprit inconstant des Barbares contre un prince qu’il
estimait et haïssait également. Les vertus de Majorien ne purent le protéger
contre la sédition qui éclata dans le camp, près de Tortone, au pied des Alpes.
Il fut contraint d’abdiquer la pourpre ; cinq jours après (7 août 461), on
annonça que Majorien était mort d’une dysenterie [4044] , et l’humble
tombe qui couvrît les restes de ce grand homme fut consacrée par la
reconnaissance et par le respect de la postérité [4045] . Le caractère
de Majorien inspirait l’amour et le respect. La satire et la calomnie
l’enflammaient d’indignation ; mais elles n’excitaient que son mépris lorsqu’il
en était l’objet. Il. encourageait cependant la liberté de la conversation ; et
dans les heures que l’empereur donnait à la société, il s’avait se livrer à son
goût pour la plaisanterie, sans jamais déroger à la majesté de son rang [4046] .
    Ce ne fût pas peut-être sans regret que Ricimer sacrifia son
ami à l’intérêt de son ambition ; mais il résolut d’éviter, dans un second
choix, de se donner un supérieur dont le mérite et la vertu pussent lui faire
ombrage. Le sénat, docile à ses ordres, accorda le titre d’empereur à
Libius-Sévère, qui monta sur le trône de l’Occident sans sortir de son
obscurité : à peine l’histoire a-t-elle daigné faire connaître sa naissance,
son élévation, son caractère ou sa mort. Sévère cessa d’exister des que sa vie
devint incommode à son protecteur [4047] ,
et il serait inutile de chercher dans l’intervalle de six années, qui s’écoula
depuis la mort de Majorien jusqu’à l’élévation d’Anthemius, quel a pu être
l’espace de temps occupé par le règne de ce fantôme d’empereur. Pendant cet
intervalle, Ricimer fût, seul maître du gouvernement ; et, sans oser prétendre
au nom de monarque, le Barbare accumula des trésors, eut une armée à lui, fit
des traités particuliers ; et exerça en Italie l’autorité indépendante et
despotique qu’y exercèrent depuis Odoacre et Théodoric. Mais les Alpes
bornaient ses États ; deux généraux romains, Marcellin et Ægidius, demeurèrent
fidèles à la république, et rejetèrent dédaigneusement le fantôme qu’il
décorait du nom d’empereur. Marcellin suivait l’ancienne religion ; et les
païens dévots, qui désobéissaient en secret aux lois de l’Église et de l’État,
respectaient ses connaissances dans l’art de la divination : mais il possédait
des qualités plus estimables, la science, le courage et la vertu [4048] ; il s’était
perfectionné le goût par l’étude de la littérature latine, et ses talents
militaires lui avaient acquis l’estime du grand Ætius, qui l’enveloppa dans sa
ruine : mais il évita par la fuite la fureur de Valentinien, et maintint
hardiment son indépendance au milieu des révolutions de l’empire d’Occident.
Majorien récompensa la soumission volontaire ou forcée de Marcellin, en lui
confiant le gouvernement de la Sicile et le commandement d’une armée placée
dans cette île pour attaquer ou arrêter les Vandales : mais à la mort de
Majorien, les intrigues et l’or de Ricimer firent révolter ses soldats. A la
tête d’une troupe fidèle, Marcellin s’empara de la Dalmatie, prit le titre de
patrice de l’Occident, mérita l’attachement de ses sujets par un gouvernement
doux et équitable, construisit une flotte qui faisait la loi sur la mer
Adriatique ; et menaçait alternativement les côtes d’Afrique et d’Italie [4049] . Ægidius,
maître général de la Gaule, qui égalait ou imitait les héros de l’ancienne Rome [4050] , déclara son
ressentiment implacable contre les assassins d’un prince qu’il chérissait. Une
armée nombreuse et choisie suivait ses drapeaux ; et quoique les artifices de
Ricimer et les forces des Visigoths lui fermassent le chemin de Rome, il
maintint au-delà des Alpes sa souveraineté indépendante, et rendit le

Weitere Kostenlose Bücher