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Histoire de la philosophie. Tome I, L'Antiquité et le Moyen Âge. I. Période hellénique

Histoire de la philosophie. Tome I, L'Antiquité et le Moyen Âge. I. Période hellénique

Titel: Histoire de la philosophie. Tome I, L'Antiquité et le Moyen Âge. I. Période hellénique Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Émile Bréhier
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jouissent à présent, et dans laquelle, ravis par la douceur d’un goût divin, l’on contemple seulement Dieu dans le repos et la paix. » L’on voit avec quel soin ce mysticisme reste orthodoxe ; la contemplation, à son plus haut degré, n’est qu’une sublimation des vertus chrétiennes fondamentales, foi et charité.
    L’œuvre d’Hugues est continuée par Richard de Saint-Victor dont le mysticisme est encore plus pénétré, si l’on peut dire, de rationalisme et d’intellectualisme ; il veut, comme saint Anselme, trouver des « raisons nécessaires » des dogmes divins ; et son De gratia contemplationis fait une part immense à la préparation intellectuelle de l’extase.
     
    VI. — PIERRE ABÉLARD
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    Chartrains, sententiaires et Victorins, si différents et même si hostiles qu’ils paraissent, sont pourtant animés d’un même esprit : on ressent chez tous le sentiment d’une libération, la joie d’une civilisation commençante, une ardeur intellectuelle qui se heurte aux moyens médiocres dont ils disposaient. Le XII e siècle est le premier qui se délivre véritablement des encyclopédies et des commentaires ; les formes littéraires se font plus souples et plus personnelles.
    Pierre Abélard (1079-1142) en est le représentant le plus caractéristique : pendant de longues années, il enseigne, avec un succès croissant, la dialectique à Melun, à Corbeil, puis à Paris à l’école cathédrale et sur la montagne Sainte-Geneviève : les Introductions pour les commençants, les Gloses et les Petites Gloses sur Porphyre, enfin la Dialectique (1121) sont les résultats de cet enseignement. Mais vers 1112, il commence à p.583 s’appliquer à la théologie avec Anselme de Laon, et l’enseignement qu’il donne à Paris en 1113 à l’école cathédrale est tout théologique. On sait quelle catastrophe y mit fin en 1118, à la suite de son amour pour Héloïse ; cruellement mutilé par l’oncle de celle-ci, le chanoine Fulbert, il se réfugia à l’abbaye de Saint-Denis : Il reprit pourtant son enseignement d’abord à Nogent-sur-Seine, puis de 1136 à 1140 au Paraclet : De cette époque de sa vie date l’inspiration du Sic et non (1121), de la Theologia christiana , de l’Introductio ad Theologiam et de l’ Ethica . De cette époque date aussi cette Histoire de mes malheurs ( Historia calamitatum ) qui ressemble plus aux Confessions de Rousseau qu’à celles de saint Augustin, et la célèbre correspondance avec Héloïse.
    L’enseignement d’Abélard est un de ceux qui, au moyen âge, excita avec le plus de force la réprobation des théologiens : condamnées par deux conciles, à Soissons en 1121, à Sens en 1141, ses opinions théologiques sont considérées comme un résumé de toutes les grandes hérésies : arien, pélagien et nestorien, d’après une lettre de l’archevêque de Reims au cardinal Guido de Castello (1141) [786], il aurait nié l’égalité des personnes divines, l’efficacité de la grâce, la divinité du Christ ; et toutes ces négations auraient une source unique ; l’immense orgueil intellectuel que lui reprocha son grand adversaire saint Bernard [787], orgueil qui fait que « le génie humain ( humanum ingenium ) usurpe tout pour lui, ne réservant rien à la foi ». ou encore qu’il s’efforce de dénier « tout mérite à la foi en pensant qu’il peut comprendre par la raison humaine tout ce qu’est Dieu »,
    C’est donc tout le régime de la vie chrétienne qu’on lui reproche de vouloir changer ; un dogme dont tout mystère est supprimé et qui rend inutile la tradition, une morale qui s’appuie sur la confiance de l’homme en lui-même et rend inutile la grâce avec les sacrements.
    p.584 Qu’était donc, chez Abélard, cette raison ? Une raison formée tout entière par la dialectique qu’il cultiva avec passion, à l’exclusion presque complète des sciences du quadrivium ; de lui est issue, nous le verrons, une école de dialecticiens qui bornaient la philosophie à cet art. Sa Dialectique (celle de 1121) est d’ailleurs uniquement fondée sur les traductions et les travaux de Boèce ; elle ignore encore les grands traités logiques d’Aristote, Analytiques premiers et seconds , Réfutation des Sophistes , Topiques qui ne furent traduits en latin qu’en 1125. La dialectique reste pour lui ce qu’elle était pour Boèce commentant les Catégories , une science qui ne porte pas sur les choses

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