Histoire du Japon
contrevenants devaient être punis par des amendes imposées aux individus mêmes ou à l’ensemble du village. L’ensemble du village ou le gonin-gumi étaient tenus de cultiver les terres abandonnées pendant un an ou jusqu’à ce qu’on trouve un cultivateur adéquat. Ici encore, le coût (y compris les impôts) devait être assumé par le village. Le village pris dans son ensemble était plus fort et plus influent que ses membres individuels, de sorte qu’il pouvait résister dans une certaine mesure à la pression des autorités locales, ou, tout au moins, négocier avec un modeste espoir de succès.
Le village du XVII* siècle évolua naturellement à partir du village médiéval, qui était d’origines variées. Ses classes sociales comprenaient les anciens éléments constitués par la noblesse rurale (myôshu, dogô ou jisamurai ) et des groupes ultérieurement formés par les guerriers ayant cherché refuge à la campagne après avoir été défaits durant les guerres civiles. Mais la classe la plus commune était celle des paysans travaillant à l’ouverture de nouvelles terres. Ce type d’entreprise était très encouragé par le bakufu et les principaux daimyô. Il se trouvait facilité par un apport croissant de capital dû à l’expansion de l’économie marchande, et par l’amélioration des techniques de génie civil conséquente au relevé foncier et à la construction de fossés et de digues.
Un village moyen comptait une cinquantaine d’exploitations, et, vers la fin du xvi e siècle, réunissait essentiellement des paysans indépendants de la classe des hon-byakushô (propriétaires et membres du village à part entière), dont certains étaient d’anciens paysans-soldats qui, après la chasse à l’épée ordonnée par Hideyoshi en 1588, avaient rendu leurs armes et étaient devenus des civils. A cette classe, il faut ajouter celle des petits cultivateurs (ko-sakunin), que la chasse à l’épée avait, ainsi qu’on l’a vu, dégagés de leurs liens avec la petite noblesse et transformés en propriétaires indépendants d’une surface généralement minimale de terre cultivable.
Cette période de relative liberté ne dura pas longtemps, car, du fait des études cadastrales effectuées entre 1574 et 1600 238 , et en particulier du grand recensement entrepris par Hideyoshi, qui dura une quinzaine d’années, le village devint l’unité administrative à laquelle le gouvernement féodal (central et provincial) appliquait ses mesures de contrôle y compris la levée d’un impôt foncier calculé pour chaque champ et la détermination d’une politique agricole en général. Pour sa part, le village était une corporation qui agissait pour les cultivateurs dans des domaines tels que les requêtes, les contrats et les prêts, ainsi que pour la gestion des communaux. Durant un certain temps, on le tint même pour responsable des actes illégaux commis par l’un ou l’autre de ses habitants.
Des agents officiels locaux (daikan et gundai) contrôlaient les affaires du village, mais aucun fonctionnaire n’y résidait. Le chef du village (il y en avait de trois espèces : nanushi ou shôya 239 , kumigashira et hyakushôdai) gouvernait celui-ci selon les instructions des agents officiels. Les détenteurs de ces trois types de postes étaient officiellement nommés par élection ou sur la décision d’un comité, mais, en pratique, la plupart des nominations étaient héréditaires dans les familles influentes de la petite noblesse rurale.
En plus de ces nominations, on choisissait habituellement une sorte d’intermédiaire pour aider le chef du village à organiser le paiement des impôts et le conseiller en matière de récolte et de maintien de l’ordre. Le nanushi ou shôya avait trois ou quatre assistants appelés kumigashira. Le hyakushôdai était un officier municipal représentant les intérêts de la majorité des paysans notamment dans le domaine des impôts et la répartition des tâches. Dans la plupart des régions du pays, il était courant qu’un certain nombre de villages forment une unité supérieure, le « gô » ou district rural, que dirigeait un chef, l ’ôshôya, aux fonctions très honorifiques.
Le groupe des Cinq (gonin-gumi) : Les gonin-gumi étaient des groupes de cinq chefs de famille conjointement responsables des actes de chaque membre. Leurs fonctions étaient nombreuses. Ils devaient certifier les mariages, les successions, les
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