Histoire du Japon
testaments et les contrats de vente, d’achat ou d’emprunt. Lorsqu’un membre avait du retard dans le paiement de ses impôts, ils devaient se porter garant pour la somme due ; et lorsqu’un délit était commis, ils devaient en accepter la responsabilité. De façon générale, leurs obligations comprenaient une aide mutuelle et une surveillance mutuelle de toutes les activités publiques et privées à l’intérieur du groupe.
Le gonin-gumi était donc une sorte d’agence d’autogestion non pas née de l’initiative populaire mais imposée à la communauté par la classe gouvernante. Son but principal était de maintenir l’ordre et d’informer les autorités de ce qui se passait dans la ville ou dans le village. C’était en fait un organe de police, d’espionnage et de délation, caractéristique de l’attitude officielle à l’égard des problèmes administratifs.
Ses devoirs étaient exposés dans une préface (zenshojau registre (le gonin-gumi-chö) que possédait chaque village. Ce registre était signé par le chef et contenait, à l’intention des membres des groupes, une liste des devoirs formels et des actes interdits. Certains de ces documents sont courts et simples, d’autres d’une longueur considérable et bourrés de détails. Un exemple relativement bref, datant de 1658, contient quinze articles, dont les principaux peuvent être résumés comme suit :
– Instructions pour les visites de fonctionnaires ; pour le nettoyage des routes ; pour la tenue des chiens et des chats.
– Tous les puits, fossés et cours d’eau doivent être nettoyés et les digues réparées au début de la nouvelle année.
– Toute la terre arable doit être cultivée, sans laisser libre aucun espace.
– Les arbres et les bambous ne doivent pas être coupés sans autorisation. Lorsqu’il faut du bois ou du bambou pour une construction, la demande doit être présentée aux autorités.
– Aucun rônin, marchand ou mendiant n’est autorisé à passer la nuit dans le village s’il vient d’un autre fief ou est inconnu.
– Tous les ponts, routes et chemins doivent être maintenus en état par des soins quotidiens.
– Règles touchant la vente des chevaux et des bœufs.
– Le jeu et la corruption sont interdits.
– Les personnes d’un district rural qui ne sont ni paysans, ni commerçants, ni membres d’autres occupations reconnues, doivent être soumises à un interrogatoire serré et le résultat transmis aux autorités. Si les autorités l’exigent, elles doivent être expulsées.
– Aucun prêtre ou frère chrétien ni aucun autre membre d’une secte interdite n’est autorisé à entrer dans un district rural. Cette interdiction doit être soigneusement appliquée.
– En cas d’incendie ou de vol dans un village, un autre village doit aussitôt se porter à l’aide si on le lui demande.
– Aucune personne ne doit acheter ni vendre en infraction à la loi fixant l’âge minimal à dix ans.
Ces règlements étaient lus plusieurs fois par an aux villageois par le chef du village ou autre fonctionnaire 240 . En tant qu’institution, le gonin-gumi se perpétua jusqu’en 1888, où il fut remplacé par un nouveau système de gouvernement local. Mais le principe d’un groupe de responsabilité survécut, et dans les années 1930, le gouvernement se servit de la confrérie (tonarigumi), groupe plus nombreux et non officiel, comme unité dans l’organisation de la défense civile, le rationnement alimentaire et autres fonctions de guerre imposées aux associations locales dans les villes et à la campagne 241 .
Malgré la nature élaborée de ces règlements établis par les villages, il est douteux que, dans la pratique, les membres des gonin-gumi les aient observés autrement que de manière générale. Ils étaient destinés à faire bonne impression sur les autorités plutôt qu’à guider les paysans, qui avaient leur façon de s’occuper des délinquants qui se trouvaient parmi eux.
Distinctions de classes dans le village : Dans les premiers relevés fonciers, le nom enregistré était celui du paysan réel (sakunin), c’est-à-dire du détenteur de la terre, qu’on appelait hon-byakushô. Mais en fait, il y avait en plus de lui un certain nombre d’hommes, allant du petit exploitant à une sorte de serfs, dont les noms ne figuraient pas dans les registres. Ils étaient nombreux dans les régions arriérées, et on les désignait sous le nom de
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