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Histoire du Japon

Titel: Histoire du Japon Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Georges Sansom
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bakufu ne fit pas grand-chose pour contrôler les prix de la nourriture, et le gouvernement s’avéra incapable de porter secours aux régions qui souffraient de la disette. Par ailleurs, l’isolationnisme des daimyô était si bien ancré que la plupart d’entre eux refusèrent d’envoyer de la nourriture dans les fiefs voisins, quand bien même ils savaient que des paysans y mouraient de faim.
    Un samurai de la province de Shimotsuke décrivait la situation en ces termes : « Quoique, dans le Kantö, la pénurie ne fût pas cause d’une grande famine, le nombre des victimes de la disette dans les provinces du Nord était effroyable. Il n’y avait rien à manger sinon de la viande de cheval, et celle-ci une fois épuisée, les chiens et les chats. Quand ceux-ci furent mangés, beaucoup de gens moururent d’inanition. Dans des villages de trente, quarante ou cinquante foyers, nul ne survécut, et personne ne pouvait dire qui était mort ni à quel moment, car les cadavres n’étaient pas enterrés mais mangés par les bêtes sauvages et les oiseaux. »
    Il existe des récits de cannibalisme tout à fait crédibles. Les provinces du Nord étaient toujours en danger de famine, car leurs terres étaient d’un rendement minime et leur climat très rigoureux. Ainsi qu’on l’a vu, la famine de 1783 dura quelque cinq ans. Ce fut l’une des trois plus graves de l’histoire du Japon des Tokugawa, les autres étant celles de Kyôhô (1732-1733) et de Tempo (1832-1836).
    Des politiques aussi égoïstes que celles que nous venons d’évoquer ne pouvaient que favoriser les disettes, surtout dans les régions où les conditions climatiques normales étaient rudes et les récoltes précaires. Lorsque la famine s’étendait à une vaste région, les résultats étaient tragiques ; mais même si, au début, elle ne touchait que des régions limitées, elle avait tendance à s’étendre du fait que le problème de l’alimentation n’était pas traité à l’échelle nationale. Un exemple frappant nous est donné par la famine de Temmei (1783). Quoiqu’elle eût été grave même l’année précédente, le fief de Tsugaru avait envoyé 400000 sacs de riz à vendre à Edo et à Osaka, et contraint les paysans à payer en nature tous les impôts fonciers. Cette attitude impitoyable eut pour résultat une pénurie d’aliments de base à l’intérieur du clan. Les officiers du daimyô s’en alarmèrent et empruntèrent 10000 ryô au bakufu dans l’intention d’acheter du riz aux fiefs voisins ; mais ce plan échoua, et l’argent qu’ils avaient en poche n’empêcha pas les villageois de mourir de faim.
    Ainsi, sous le régime féodal tel qu’il était administré, le système agricole manqua à sa mission et causa force mécontentement. Il y avait déjà eu des émeutes à Edo pour l’approvisionnement en 1733, mais durant la famine de Temmei le prix du riz atteignit des niveaux si élevés que les citadins eurent recours à la violence dans tous les centres urbains importants : à Edo, Kôfu, Suruga, Kyoto, Nara, Fushimi, Sakai, et jusqu’au Kyüshü. Edo, où les émeutes durèrent trois jours, sombra dans l’anarchie. Les entrepôts et les maisons des négociants en riz furent incendiés, et une hostilité toute particulière se manifesta à l’égard des riches marchands qui, sous l’égide de Tanuma, avaient accumulé du riz durant les famines. Il ne fait aucun doute que (tout à fait à part des tempêtes et des épidémies) le développement rapide de l’économie commerciale dans la société agricole tel que l’avait encouragé Tanuma pesa très lourdement sur le paysannat 266 .
    Le fait est attesté par les statistiques de la population contemporaine. Elles sont certes peu nombreuses, mais il est prouvé que, durant le siècle qui précéda 1720, la population était en expansion, alors qu’après cette date et pendant plus de cent ans, il n’y eut guère d’augmentation. Ce phénomène ne se comprend pas facilement. Il ne s’explique que partiellement comme résultat de l’avortement délibéré et de l’infanticide durant une longue période de misère rurale. Il faut plutôt y voir la conséquence des famines et des épidémies dont le pays fut si souvent victime au cours du XVIIIe siècle.
    Certains historiens voient à ces malheurs une origine sociale, les imputant à la cruauté du régime féodal et au fossé que creusa entre riches et pauvres la pénétration de

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