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Julie et Salaberry

Julie et Salaberry

Titel: Julie et Salaberry Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Louise Chevrier
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l’abri des regards attendris mais curieux de la parenté, le lendemain matin.
    Â Après la deuxième danse, les mariés avaient repris leurs places à table. Les conversations et les rires animés créaient un joyeux brouhaha dans la grande salle de l’auberge. Charles observa à la dérobée celle qui était sa femme depuis quelques heures. Elle eut conscience de son regard, et lui sourit.
    â€” Pendant la messe, j’ai bien prié pour que Dieu préserve mon frère Édouard. Je n’ai pas pu m’en empêcher. Mais, par la suite, j’ai prié pour que nous ayons un fils, ajouta-t-il en souriant.
    â€” C’est mon plus cher souhait, Charles, chuchota-t-elle pendant qu’il saisissait sa main pour la baiser.
    â€” J’aurais voulu t’offrir une vie plus paisible que celle qui sera la nôtre. Tu devras me suivre dans mes quartiers d’armée. Dire que je ne peux même pas te donner un logement décent…
    Ã€ l’entendre évoquer ce que serait leur vie dans les jours à venir, elle songea surtout qu’après la nuit, elle deviendrait pour de bon madame de Salaberry. Cette pensée la fit rougir.
    â€” Que signifie ce joli rose sur tes joues?
    â€” Il me tarde d’être à Québec et à Beauport, répondit-elle, rappelant le voyage prévu pour l’empêcher de deviner ses pensées intimes.
    Prévost avait convoqué Charles à Québec et Julie l’accompagnait, ce qui lui donnerait l’occasion de rencontrer sa belle-mère et ses belles-sœurs. Mais les Salaberry ne resteraient pas longtemps à Beauport. Charles devait revenir à Chambly et il avait été convenu que Julie suivrait son mari partout où il se rendrait.
    â€” Encore des formalités à régler et nous partirons. Quelques jours encore à abuser de ta patience, soupira-t-il.
    â€” J’en profiterai pour faire mes visites d’adieu, dit Julie, conciliante.
    â€” En attendant, il me tarde de me retrouver seul avec toi, murmura-t-il à son oreille.
    Elle frissonna, anticipant le moment où elle se dévêtirait, là-haut, dans la chambre. Tout à l’heure, dans le chaos qui avait précédé le dîner, Charles l’avait entraînée en douce dans un coin désert. Le baiser ardent qui s’était prolongé avait provoqué de délicieuses sensations.
    L’orchestre annonçait un cotillon et Charles tendit la main à Julie. Après cette dernière danse, ils filèrent à l’anglaise, avec des mines de conspirateurs.

    L’aubergiste Vincelet s’avança vers la table des Boileau pour remplir les verres, la mine longue comme un sabre.
    â€” Monsieur Vincelet, dit alors madame Boileau, tout sourire et amabilité. Je disais à mon mari que cette noce était fort réussie et que nous nous en souviendrons lorsque viendra le temps du mariage de notre fille Sophie.
    Le visage de l’aubergiste s’éclaira, au contraire de celui de monsieur Boileau.
    â€” Mais tu n’y penses pas, ma chère Falaise. Nous n’en avons pas encore parlé et… hésitait-il, nous ne pouvons rien promettre, puisque Sophie décidera, comme elle le fait toujours.
    La danse reprenait et madame Boileau s’avança.
    â€” Monsieur Vincelet, que diriez-vous d’être mon cavalier?
    Jacques Vincelet, qui n’était plus tout à fait un jeune homme, rougit de la tête aux pieds.
    â€” C’est trop d’honneur! balbutia-t-il.
    Il se souviendrait de l’invitation de la noble dame de Gannes de Falaise pour le reste de ses jours.
    â€” Je crois que vous devriez déposer cette carafe sur la table, ajouta cette dernière en souriant avec la grâce unique que conféraient des siècles de noblesse.
    â€” Bien sûr, bien sûr, bégaya Vincelet, toujours écarlate. Mais permettez, madame, que je retrouve ma veste, ajouta-t-il en dénouant avec maladresse les cordons de son tablier taché de vin et de sauce.
    â€” Ma parole, ma femme! lui reprocha son époux. Mais qu’est-ce qui vous prend? Danser avec mon ennemi! Je me fais l’impression d’un bas malodorant que vous venez de laisser tomber.
    â€” Mesurez vos paroles, mon ami, car on pourrait vous entendre, rétorqua la dame, sans tenir compte du ton courroucé de son époux. Seriez-vous aveugle à ce

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