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Julie et Salaberry

Julie et Salaberry

Titel: Julie et Salaberry Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Louise Chevrier
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vieux. Pis le bon bord, c’est l’bord des Anglois.
    â€” Mais taisez-vous donc, le père, supplia monsieur Boileau en regardant hâtivement autour de lui de crainte qu’un officier entende les propos du vieux. Voyez, notre demoiselle de Rouville, l’épouse du major des Voltigeurs, qui est là. Ah! Madame de Salaberry, pardonnez à mon vieux cousin. Il a vécu des heures pénibles dans sa jeunesse.
    â€” Ne vous en faites pas, le rassura Julie qui riait de bon cœur. Qui ne connaît pas le père Robert et sa nostalgie du monde d’avant, comme il le dit souvent?
    â€” Il est tout à fait inoffensif, renchérit madame Boileau qui s’amusait aussi des divagations du vieil homme. Quel mal y a-t-il à se rappeler la France que nous portons toujours dans nos cœurs?
    â€” Ah! Mam’zelle de Rouville, grand hommage! la salua le père Robert en la reconnaissant. Vous pouvez être fière de vot’ major. C’est un Basque, et vous savez c’qu’on dit?
    â€” Nenni, sieur Robert. Que dit-on?
    â€” On dit «malin comme un Basque». Voilà c’qu’on dit.
    â€” Est-ce un compliment, père Robert? demanda Emmélie.
    â€” Finaude pas pour rire, ton Emmélie, ricana le vieux en direction de monsieur Boileau qui se grattait sous sa perruque à cause de la chaleur. Ça veut dire, belle dame, que ce gars-là, sous son habit d’Anglois, y va bouter hors de chez nous les Bostonnais, ajouta-t-il à l’intention d’Emmélie. V’là c’que j’dis, moi, Antoine Robert.
    Ã‰baudi, les yeux écarquillés, le jeune Melchior écoutait attentivement l’ancêtre parler de la vieille France, ce lointain pays où était né son père.
    â€” Vive le roi! lança encore le vieux.
    â€” Hourra pour le major! cria le garçon à la suite du mal avenant.
    â€” Vive le roi George! fit à son tour monsieur Boileau, soulagé de pouvoir faire la démonstration de sa loyauté.
    Une fois ces considérations patriotiques réglées, madame de Rouville se tourna vers madame Boileau pour lui confier les difficultés qu’elle avait à organiser un repas en l’honneur du gouverneur.
    â€” Vous savez que les officiers offrent le repas à Sir George, ce soir.
    â€” Nous manquons de tout, expliqua Julie: vivres, ustensiles, assiettes, plats, verres. La plupart des habitants ont l’obligation d’héberger les pensionnaires et ne possèdent plus chez eux que le strict nécessaire. Même l’aubergiste est dépourvu. Si je ne vous avais pas rencontrée à la revue, je me proposais de vous rendre visite, pour vous demander le même service.
    Hermine, Julie et madame de Rouville s’étaient vu confier la mission de trouver un nombre suffisant de couverts en faisant appel à toutes les bonnes volontés de Chambly.
    â€” Notre maître d’hôtel et la cuisinière ont emballé ce que nous pouvions prêter de vaisselle et d’ustensiles, et une charrette est partie chez Vincelet, confia madame de Rouville à madame Boileau, que la situation amusait.
    â€” Ainsi, nota-t-elle à Julie avec un brin d’espièglerie, votre nouveau rôle consiste également à compter les fourchettes de vos voisins. Assurez le major de notre collaboration. Je ferai donner des ordres pour faire préparer le nécessaire à apporter chez Vincelet, et le gouverneur verra que les gens de Chambly savent recevoir.
    â€” Et si j’osais, chère madame, vous demander une autre faveur... dit Julie en hésitant un peu. Le fameux gâteau d’Ursule nous garantirait un succès certain.
    â€” Ma chère, dit madame Boileau, c’est comme si c’était fait. Et je serai ravie de revoir votre beau-père.
    Louis de Salaberry était en effet présent à Chambly. Tout comme son fils, il était en campagne. Le vieux gentilhomme était enfin redevenu lui-même et s’ennuyait de sa chère Souris et de ses filles. Après la revue et le souper en l’honneur du gouverneur, il prendrait la tête de son régiment pour se rendre au cantonnement de Blairfindie, un endroit situé à mi-chemin entre Chambly et La Prairie.
    La revue terminée, la foule se dispersa et on se salua gracieusement en se disant «à ce soir». Madame Boileau courut donner ses ordres à

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