Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
La chambre maudite

La chambre maudite

Titel: La chambre maudite Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Mireille Calmel
Vom Netzwerk:
que richesse et pouvoir dans la découverte de la pierre philosophale. Il avait pour sa part rencontré de vrais sages dont le seul but était la perfection de l’âme, c’était en cela qu’il croyait lui-même.
    Ce qui entourait François de Chazeron n’était rien d’autre qu’une habile machination. L’œuvre d’un fou, peut-être. L’histoire du châtelain contenait pourtant une part de vérité. Il payait le prix de quelque chose. Si ce n’était celui de ses recherches, quel était-il ?
    –  Existe-t-il des souterrains à Montguerlhe ? demanda-t-il tandis que le silence se refermait sur la respiration saccadée de François.
    Raconter avait épuisé le seigneur. Il répondit dans un souffle, les yeux fermés.
    –  Non. Je peux vous l’affirmer. Lorsque j’étais enfant une vieille légende prétendait que, durant la guerre de Cent Ans, de nobles chevaliers arrivaient à Montguerlhe par des passages secrets pour faire forger des épées et émoudre des coutelas par les coustelleurs qui s’y étaient réfugiés. J’ai passé mon enfance et mon père avant moi à battre les collines pour localiser les accès et à sonder les murs comme vous l’avez pu faire. Aucun des miens depuis quatre générations n’a rien trouvé, et dans les registres rien n’indique le bien-fondé de cette légende.
    Le mal dont je souffre, messire Philippus, n’a d’autre réalité que celle que je viens de vous conter, je vous l’assure.
    Philippus acquiesça. Peu importait au fond ce que croyait François de Chazeron. Il valait mieux qu’il se reposât à présent.
    Quant à lui, il avait son idée. La nuit prochaine, son énigmatique apparition reviendrait, et alors il saurait bien faire la part entre rêve et réalité. D’un geste sûr, il referma le coffret qu’il replaça sous le lit et rattacha la clé au cou de son propriétaire. Il était prêt à accueillir la vérité.

10
     
     
     
    Depuis un long moment déjà, Isabeau sentait peser sur elle un regard de jais à travers la fenêtre, mais elle s’en amusait, s’obstinant à garder la tête baissée sur son ouvrage. L’après-midi avançait dans la tiédeur de l’arrière-boutique où depuis quelques jours elle obligeait son cerveau, plus que ses doigts, à retrouver la rigueur des points de couture. Rudégonde lui avait donné à assembler une gorgerette 1 dont la toile venait de Flandre et avait coûté fort cher. Isabeau avait d’abord été paniquée en apprenant que l’ouvrage était destiné à la mère du roi François. Les aiguilles étaient si fines entre ses mains gauches. Si elle se trompait, si elle massacrait l’ouvrage par des points irréguliers ? Elle avait suggéré qu’il valait mieux commencer sur un mouchoir, mais Rudégonde n’avait rien voulu savoir.
    –  Oubliez qu’il s’agit de la reine, voyez comme la toile est fine et agréable sous les doigts. Sentez-la avec respect. Appliquez-vous, prenez votre temps, Isabelle, et ainsi vous vaincrez vos appréhensions.
    Elle avait obéi, après avoir obtenu de travailler une heure sur du coton grossier pour réapprendre le point demandé. Curieusement, cela lui avait paru facile, de sorte qu’elle en avait conclu que Rudégonde était dans le vrai.
    Depuis son arrivée, elle était figée par la peur, une peur viscérale. La première nuit, elle s’était demandé ce qui la générait, à présent elle savait. Elle avait passé ces dernières années à oublier tout ce qu’elle avait pu être et apprendre, afin que cela ne puisse lui manquer.
     
    1. Chemise en toile de lin portée à même la peau.

 Parce qu’elle n’imaginait pas les retrouver. Elle devait désormais faire le chemin inverse, et elle s’en effrayait. La négation avait éteint la douleur. Pour rien au monde elle n’aurait voulu la réveiller. Et cependant il le fallait. Elle venait d’avoir trente ans. Ce n’était pas trop tard pour recommencer à vivre et à aimer.
    L’ouvrage avançait précautionneusement. Elle entendait la conversation et les rires de ses compagnes assises en cercle auprès d’elle, sans les écouter. Elle ne voulait pas se laisser distraire car les coutures sur les côtés de la chemise devaient être subtiles pour que le corps ne les sente pas. Elle ne s’autorisait au bavardage qu’au moment des pauses. La première était au déjeuner, les deux autres dans le courant de l’après-midi. De fait, les lingères travaillaient jusqu’à la nuit tombée ; été

Weitere Kostenlose Bücher