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La couronne dans les ténèbres

La couronne dans les ténèbres

Titel: La couronne dans les ténèbres Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Paul C. Doherty
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lui-même :
    — J’ai combattu en Terre sainte pour la Croix et en Angleterre pour Édouard contre les rebelles. J’ai fondé des monastères, défendu notre sainte mère l’Église pour que Dieu honore plus encore ma famille. J’ai vu Alexandre se livrer à la luxure, aux beuveries, à la débauche et flatter bassement votre Édouard, et je savais que j’étais meilleur homme que lui. En 1238, son père me promit la couronne, mais il se remaria et engendra Alexandre, troisième du nom, et la coupe me fut retirée des lèvres. Puis Alexandre devint roi sans nul héritier vivant et épousa sa maîtresse française, brûlant d’amour pour elle et proclamant qu’elle lui donnerait un héritier. Et puis...
    Lord Bruce s’interrompit soudain, se souvenant où il était et à qui il parlait. Puis il fixa Corbett d’un air morne.
    — Sortez, Messire Corbett, dit-il avec un geste de la main. Partez ! Partez maintenant !
    Corbett donna un coup de coude à un Ranulf éberlué, se leva, salua, et, suivi des gardes de Lord Bruce, sortit dignement de la pièce.
    L’escorte les raccompagna jusqu’à la sortie de Leith et au début du chemin menant à Édimbourg. Le soir tombait à présent. Les soldats échangèrent quelques insultes avec Ranulf, puis firent demi-tour. Corbett poussa un soupir de soulagement, ordonna à son serviteur de garder ses réflexions pour lui et poursuivit tranquillement sa route, tête baissée, réfléchissant à ce que Lord Bruce lui avait dit. Un homme en colère, amer, jugea Corbett, qui ne portait pas le roi Alexandre dans son coeur, et qui avait beaucoup à gagner à sa mort. Cela dit, raisonna Corbett, il n’était pas le seul dans ce cas.
    La nuit était tombée lorsqu’ils atteignirent les faubourgs d’Édimbourg. Corbett se détendit. Les rues étaient encombrées par les charrettes des marchands et des paysans qui rentraient chez eux. Tout à coup, il y eut un choc, de la confusion et des jurons : un chariot vide s’était retourné et le cheval ruait et se cabrait sur place. Du conducteur, nulle trace. Corbett et Ranulf, chevauchant côte à côte, s’arrêtèrent pour contempler le désastre. Deux individus qui marchaient devant eux firent soudain demi-tour et revinrent nonchalamment vers eux. Corbett les vit et se raidit sur sa selle. Quelque chose n’allait pas. Il aperçut l’éclair de l’acier. Il s’empara des rênes de la monture de Ranulf et lança la sienne au trot d’un coup d’éperons. Quand il contourna le chariot renversé, les deux hommes furent projetés sur le sol et le clerc partit alors au grand galop, priant pour que son cheval auquel il s’agrippait fermement ne s’écartât pas du mauvais chemin creusé d’ornières. Dès qu’ils se retrouvèrent entre les maisons aux volets fermés d’Edimbourg, Corbett ralentit l’allure et grimaça en voyant la mine livide et terrifiée de Ranulf.
    — Ne me demande pas qui c’était, lança-t-il. Je n’en sais rien. Il se peut même qu’ils n’aient pas eu d’intentions hostiles, mais je me suis rappelé le vieux proverbe : « Sur un chemin sombre et isolé, on ne rencontre pas d’amis. »
    Ranulf approuva d’un signe de tête, puis, penché au-dessus de son cheval, il se mit à vomir, son estomac trahissant sa peur soudaine. Corbett eut un petit sourire, mais s’en repentit quelques minutes plus tard lorsque lui aussi se mit à vomir. Il tremblait encore quand ils atteignirent sans autres incidents la porte de l’abbaye.

CHAPITRE IX
    Le lendemain matin, le prieur apporta une lettre à Corbett, une simple note indiquant que Benstede avait été attaqué, la veille, par des inconnus, qu’il était sain et sauf et conseillait à Corbett d’être sur ses gardes. Ce que le clerc se promit en son for intérieur. Puis, après s’être lavé et habillé, il emmena Ranulf au réfectoire où ils déjeunèrent de pain, de fromage, de quelques fruits bien mûrs et de vin coupé d’eau. Il alla s’assurer ensuite que les hommes qui l’avaient escorté jusqu’en Écosse étaient bien logés avant d’envoyer Ranulf laver leurs vêtements et vaquer à d’autres tâches dans l’abbaye.
    Ensuite il regagna sa cellule, referma soigneusement le loquet et sortit d’une grande sacoche en cuir du parchemin, une pierre ponce, un encrier, des plumes, un long couteau fin aussi aiguisé qu’un rasoir et un rouleau de cire à cacheter rouge. Il déroula le parchemin, le racla avec la pierre ponce,

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