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La lanterne des morts

La lanterne des morts

Titel: La lanterne des morts Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Frédéric H. Fajardie
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du Comité de salut public?
    – Vous savez bien, Robespierre, qu’on ne peut répondre d’un mot à pareille question. Oui, je suis en accord sur l’essentiel avec une réserve: la guillotine n’a point le temps de rouiller et, quant à moi, je crois davantage à l’éducation qu’au châtiment.
    L'homme le plus craint de France parut un instant dérouté.
    – Je le pense également… mais nous sommes en guerre, partout. Et nos ennemis de l’intérieur sont les plus vils, les plus lâches, les plus coupables!… Il faut être implacable avec dix mille hommes pour en sauver des millions.
    Il hocha la tête pour appuyer ses propres convictions puis changea de sujet:
    – Et votre arme si… singulière?
    – Il ne m’en reste que deux. Je n’ai plus la matière pour réaliser mes alliages mais, si la Révolution ne triomphait pas, ce serait les deux dernières. J’emporterai mon secret dans la tombe plutôt que de le livrer à une dictature militaire ou aux royalistes.
    – C'est très sage, mon ami, très sage. Vous êtes un homme de bien. Pour vos armes secrètes, les ateliers nationaux sont à vos ordres.
    – Merci. Robespierre, je vous sais pressé, appelé à bien des tâches exigeantes et m’en voudrais, au nom de l’amitié, d’abuser de votre temps.
    – Dînons ensemble: quand partez-vous affronter les brigands de Vendée?
    – Demain matin, ma demi-brigade est déjà en route.
    Il posa ses mains sur les épaules de Valencey d’Adana:
    – Ah, ce nom, «Liberté, liberté chérie», c’est magnifique et nul n’y avait pensé. Il faut l’aimer beaucoup, la liberté, pour avoir eu cette idée…
    Il resta un instant rêveur puis:
    – Demain, c’est hélas impossible. Mais dès votre retour, la chose est promise.
    Ils s’embrassèrent et se dire à bientôt. Ils ignoraient qu’ils ne devaient jamais plus se revoir et qu’il s’agissait là d’un adieu.
    Menée par Pierre-François Gréville, ravi de montrer son savoir-faire, la cérémonie fut rondement enlevée. Cependant, l’officier d’état civil fut comme assommé de marier un ci-devant prince, qui plus est héros national, avec une ravissante ci-devant marquise quand les témoins étaient le chef de la police secrète et un colonel – Mahé avait été promu le matin même à ce grade par «monsieur son frère».
    Seul le chien La Fayette parut boudeur, et l’était de fait, ayant à cet état plusieurs motifs. Ainsi avait-il dû céder sa place dans le lit, qui semblait très confortable, à cette femme arrivée on ne sait d’où. Ensuite, prétextant que le lavage rapide n’était point suffisant pour vaincre des années de crasse, sa tortionnaire l’avait-elle fait tremper plus d’une heure dans un bain aux essences de jasmin, si bien qu’il ne reconnaissait plus sa propre odeur naturelle fortement boucanée, mais qu’il appréciait fort. Enfin, depuis le matin, ce n’était que marches harassantes et mouvements.
    Tout à ses pensées moroses, La Fayette ne vit point, embusqué, un ignoble chat noir à l’air fourbe lequel, attaquant par-derrière, lui sauta sur le dos.
    Dans sa vie de bagarreur, le petit bouledogue en avait vu bien d’autres et, se secouant avec énergie, il fut bientôt face à son adversaire. C'est alors que la mariée, sa tortionnaire, se jeta à coups d’ombrelle sur l’odieux agresseur qui trouva le salut dans une fuite sans gloire.
    Dès cet instant, les sentiments de La Fayette pour la princesse d’Adana changèrent du tout au tout.
    On félicita Victoire pour sa promptitude mais les trois hommes sentirent que, malgré son bonheur, une ombre voilait celui-ci. Avec cette franchise naïve qui paraissait parfois de la rudesse, Valencey d’Adana s’enquit auprès de son épouse du motif de sa contrariété.
    D’une égale franchise, et bien qu’elle en fût par avance très gênée, Victoire répondit bravement:
    – Je pensais à tante Aglaé, la seule de ma famille, avec feu mon père, qui m’eût vraiment aimée. Elle eût tant souhaité que ce mariage ne fût point tout à fait étranger à l’église…
    Brûlant la politesse à Valencey d’Adana, Gréville répondit:
    – Rien de plus facile. Voulez-vous un réfractaire? J’en cache justement un, rue des Postes, un très fin latiniste.
    – Oh non, pas un réfractaire: un jureur ferait l’affaire, surtout s’il est rapide.
    Gréville sourit et les mena devant une petite église proche de la rue des Marmousets,

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