La naissance du roi Arthur
jouaient aux échecs, assis sur
une couche d’or. Un homme aux cheveux blancs était assis au pied d’une colonne
dans une chaire recouverte d’or, et la jeune fille se trouvait en face, dans
une autre chaire d’or rouge. Les messagers tombèrent à genoux devant elle et la
saluèrent. Puis ils lui exposèrent l’objet de leur mission. « Tu as donc
le choix, princesse. Ou tu viendras avec nous pour que celui qui nous envoie
t’épouse et te fasse impératrice, ou bien l’empereur viendra ici lui-même pour
te prendre comme femme. » La jeune fille répondit : « Je ne veux
pas mettre en doute ce que vous me dites, mais je n’y ajoute pas foi non plus.
S’il est vrai que l’empereur m’aime et qu’il veuille m’épouser, il n’a qu’à venir
jusqu’ici. »
Les messagers repartirent immédiatement et se rendirent en
hâte auprès de Macsen pour lui rendre compte du succès de leur mission. Macsen
partit immédiatement pour l’île de Bretagne avec ses troupes, avec ses treize
messagers pour guides. Il reconnut tous les paysages qu’il avait pu voir dans
son rêve. En apercevant la forteresse sur le rivage, il dit : « Voici
le lieu où j’ai vu la jeune fille que j’aime le plus au monde. » Il entra
donc dans la forteresse et alla vers la grande salle, comme s’il y était déjà
venu de nombreuses fois auparavant. Il vit les deux jeunes gens, Konan, fils
d’Eudav, et Adeon, fils d’Eudav, en train de jouer aux échecs, et leur père,
l’homme aux cheveux blancs assis dans la chaire recouverte d’or, et, en face de
lui, Élen, fille d’Eudav, encore plus belle que lorsqu’il l’avait contemplée
dans son rêve. Il s’agenouilla devant elle et la salua. Alors Élen se leva,
alla vers lui, lui mit ses bras autour du cou et le releva. Ainsi l’empereur
Macsen épousa-t-il Élen Lluyddawc, fille d’Eudav, fils de Caradoc, de l’antique
lignée des rois de Bretagne [43] .
Ce mariage ne fut cependant guère apprécié par Konan, le
frère d’Élen, qui était seigneur de Mériadog et qui, héritier du royaume de son
père, voyait se dresser un rival en son beau-frère. Konan se retira dans le
Nord avec les gens qui lui étaient fidèles, et il engagea la lutte contre
Macsen. De durs combats eurent lieu, qui ne donnèrent raison ni à l’un ni à
l’autre. Finalement, cédant aux supplications d’Élen, Konan et Macsen se
réconcilièrent solennellement et s’engagèrent à gouverner ensemble le royaume.
Et Macsen demeura sept ans en l’île de Bretagne, tandis que, sur le continent,
les Romains avaient choisi un autre empereur [44] .
Or Macsen regrettait vivement le pouvoir qu’il avait perdu.
Les trésors qu’il avait accumulés dans l’île de Bretagne ne lui suffisaient
pas, et il lui vint à l’idée de reconquérir son empire. Il s’ouvrit de son
projet à Konan Mériadog, et celui-ci lui promit son soutien. Tous deux
rassemblèrent des troupes, parmi les meilleurs guerriers de l’île, et ils
préparèrent une grande quantité de navires solides et bien pourvus. Quand tout
fut prêt, Macsen et Konan s’embarquèrent avec leurs hommes et abordèrent sur
les rivages de ce qu’on appelait alors l’Armorique.
Le royaume d’Armorique était tenu par le roi Hymbaut.
Lorsqu’il eut appris que les Bretons commençaient à envahir ses terres, il
assembla le plus tôt qu’il le pût cinq mille Gaulois en armes, et, se mettant à
leur tête, il s’efforça de les refouler et de les rejeter à la mer. Mais après
que les deux armées eurent longuement combattu, le sort fut défavorable à
Hymbaut : il fut tué dans une bataille et tous ses hommes furent mis en
fuite ou moururent de leurs blessures. Ainsi Macsen et Konan furent maîtres de
l’Armorique. Macsen appela son beau-frère et lui dit : « Voici l’un
des meilleurs royaumes de la Gaule, que nous avons soumis et par lequel nous
pouvons espérer avoir encore mieux, car c’est un chemin très convenable pour
aller soumettre les autres peuples. Ce royaume, je te le laisse et je te
l’octroie en récompense des services que tu m’as rendus. C’est un pays fertile
en blé, riche en fleuves, avec des prés où paissent de nombreux troupeaux et
des forêts remplies de bêtes sauvages. Tu en feras une autre Bretagne et tu y
multiplieras ton lignage pour la plus grande gloire de celui-ci. » Konan
fut fort satisfait du discours de Macsen. Il le remercia et promit de l’aider
le plus qu’il pourrait.
Alors
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